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Composition en acides gras du lait : un miroir de la santé bovine
Etudier la composition des acides gras du lait est riche d’enseignements. Les résultats de ces analyses mettent en avant la santé animale, le fonctionnement du rumen, le déficit énergétique. Autant de pistes de réflexion permettant aux éleveurs de gagner en performances laitières. Explications avec Laura Benoist, conseillère bovin lait à la chambre d’agriculture de l’Indre.
Dans les grandes lignes, le lait est composé d’eau, de matière grasse, de glucides et de protéines. En y regardant de plus près, il s’avère que la matière grasse est quasiment égale au taux butyreux (TB). Les acides gras sont à 95 % sous forme de triglycérides. Acides gras eux même composés à 65 % d’acides saturés, à 30 % mono-insaturés et poly-insaturés à environ 5 %, selon ce que l’on appelle les Oméga 3.
« Le lait en tant que produit final est un indicateur de ce qu’il faut travailler », a glissé Laura Benoist, conseillère bovin lait à la chambre d’agriculture de l’Indre, à l’occasion de l’assemblée générale d’Indre lait bovin, le 4 février, à Martizay (36). La composition des acides gras est déterminée lorsque les échantillons de lait issus du contrôle de performance sont analysés, au même titre que les TP-TB* et les cellules pour chaque animal.
Les acides gras du lait viennent de la ration, de la digestion ruminale, de la glande mammaire et des tissus adipeux. A noter que les acides gras présents dans les fourrages et ceux présents dans les concentrés ne sont pas les mêmes. « Les acides gras dits de novo sont produits à partir des fermentations du rumen, ils sont un indicateur du bon fonctionnement du rumen. Les acides gras préformés, eux, proviennent des tissus adipeux mais aussi de l’alimentation et notamment des ensilages et de la matière grasse protégée. Les acides gras mixtes, quant à eux, peuvent être synthétisés dans la glande mammaire comme le C16:0 ou provenir de l’alimentation », détaille la conseillère. Ces acides gras sont à ne pas confondre avec les acides gras volatiles issus de la digestion des glucides dans le rumen.
Une analyse plus poussée
L’outil Lait'Age, disponible dans Mil’klic, permet de combiner d’aller plus loin dans l’analyse des données collectées, « ce qui permet in fine d’être plus performant dans le conseil donné à l’éleveur », note Laura Benoist. Lait’Age donne la carte de santé de chaque vache le jour du contrôle performance.
Ainsi, sur un élevage effectuant le contrôle laitier, il est possible d’isoler les vaches par catégories d’âge. Il est ainsi possible, par exemple, de mettre en avant le déficit énergétique des primipares âgées de moins de 100 jours. « Ce déficit peut traduire une concurrence à l’auge. De ce fait elles ne mangent pas suffisamment, donc elles puisent dans leur réserve pour synthétiser les acides gras longs. Par conséquent, on retrouve dans leur lait plus d’acide gras longs saturés », illustre-t-elle.
Partant de ce constat, il est possible de travailler sur l’intégration des primipares dans le lots des vaches taries, de voir le plan d’alimentation en cas d’utilisation d’un robot de traite. « Il faudra être vigilant lors de la mise à la reproduction de ces jeunes vaches, souligne la conseillère. Les informations mises en avant par Lait’Age sont complémentaires des visites d’élevage, car ce sont des éléments que nous ne pouvons pas détecter de visu ».
Une complémentation en matières grasses, si nécessaire
En cas de mauvais fourrages, où la concentration en azote et en énergie n’est pas suffisante, la vache va créer plus d’acides préformés que d’ acides courts qui représentent en général 55 à 70 % de la matière grasse. Dans ces cas-là, une supplémentation en matières grasses telles que l’huile de colza hydrogénée, huile de palme, les tourteaux de lin ou de tournesol, peut être envisagée (max 5-6 % de la ration MS).
« Selon le complément choisi, l’éleveur peut orienter la composition fine du lait, c’est-à-dire modifier le profil des acides gras, soit la partie qui va les produire (rumen, la glande mammaire, les tissus adipeux). Mais cette stratégie est à mettre en corrélation avec l’objectif technico-économique de l’éleveur et également la possibilité des cahiers des charges », insiste la conseillère.
Avant d’apporter des acides gras dans la ration, il est indispensable de s’assurer que cette dernière est équilibrée, avec si possible du fourrage bien conservé. « Il faut garder en tête que si l'on augmente trop la teneur en acide gras de la ration, on baisse l’ingestion totale, c’est-à-dire que les vaches vont manger moins. Parfois ce que l’on pense efficace peut avoir un effet pervers jusqu’à bloquer la flore du rumen », alerte Laura Benoist.
*TP-TB : taux protéique - taux butyreux.