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Conjoncture : Grande restructuration autour des métiers de la viande

Le manque structurel de marchandise impose une restructuration importante de l’approvisionnement des outils industriels.

Conjoncture – Cela fait des mois que les outils industriels sont en tension sur le volet approvisionnement. Les raisons sont connues avec une pyramide des âges des éleveurs très défavorables, un taux de renouvellement insuffisant et une pression sanitaire qui amplifie la décheptelisation. Les abattoirs fonctionnent en flux tendu, avec une logistique de plus en plus compliquée à assurer. Il n’est plus rare d’observer des ruptures d’approvisionnement entraînant des arrêts de chaîne sur certains outils qui connaissent des ruptures. La guerre commerciale engagée depuis le début d’année qui a conduit a une envolée des prix, en est une des conséquences.

Il n’est plus question de complémenter le marché français avec des viandes UE. Nos voisins européens sont dans la même situation. Cela n’arrête pas les flux de matière entre pays, mais le prix n’est plus un argument, car les tarifs sont souvent aussi élevés, voire plus dans ces pays.

Face à ce constat, les grandes manœuvres se font autour du pôle approvisionnement des abattoirs. Les regroupements de coopératives, le rachat de clientèle de négociant par les grands groupes industriels ou des regroupements d’entreprises de négoces se multiplient. Chacun cherche à conforter ses positions dans un paysage de déficit chronique de marchandise. Cette guerre commerciale peut même prendre des aspects d’étouffement de la concurrence dans certaines régions (notamment dans l’est du pays).

Les éleveurs observent ces changements de loin et profitent pleinement de cette chasse aux vaches, qui renforce la position inflationniste du marché de la viande. Il est bon de rappeler que les Charolaises R = se vendaient à 5,40€ il a un an et que les laitières ont gagné 2€/kg de carcasse soit 68 % de hausse. Il n’est pas si loin le temps où les éleveurs étaient payés 4,00€ pour des vaches blanches.

L’ensemble des observateurs du marché se posent la même question : jusqu’où iront les prix ? Sur un marché de libre-échange qui ne reverra pas de croissance des volumes, cette limite semble difficile à envisager. Il y a encore des marges de manœuvre, notamment sur le prix de la viande hachée, mais il faudra que le consommateur l’accepte et que les distributeurs rognent sur leurs marges. Les pièces bouchères vont-elles devenir des produits de luxe, réservés à une élite ? Le prix de la bavette, muscle emblématique parmi les pièces d’import en France, continue ainsi de progresser sur le marché de Rungis pour atteindre les 15€/kg (+ 24 % /2024 et + 48 % /2023).

Dans une économie de marché, tout excès a ses revers (parfois violents). L’envolée des prix a créé un différentiel très important avec les viandes des grands pays producteurs, le Brésil en tête accompagné des pays du Mercosur. La guerre commerciale à laquelle se livrent les pays est féroce, sur fond de politique américaine très agressive et surtout difficile à anticiper. Malgré la très forte mobilisation des éleveurs contre ce traité, l’UE a renforcé ces importations. Le quota de 66000 tec à droit nul a largement été dépassé avec 133000 tec sur les sept premiers mois de l’année. La taxe de 12,80 % plus 3€/kg de viande pour les viandes hors quota n’est pas un frein, pour des produits à fortes valeurs ajoutées comme les aloyaux. En juillet, la viande brésilienne réfrigérée désossée a été importée au prix moyen CAF (avant droits de douane) de 11,20 €/kg net d’os. Pour sa part, la viande congelée désossée a été reçue en moyenne à 6,60 €/kg net d’os (prix CAF). (Source : https://tendances-lait-viande.fr/category/viande-bovine/)

Ces importations n’ont aucun effet pour le moment sur un marché fortement déficitaire, mais l’accord avec les pays du Mercosur prévoit l’exportation vers l’Europe d’un volume de 99 000 tonnes de bœuf avec un droit de douane réduit à 7,5 %.

Dans une agriculture en plein questionnement, quels seront les contours de la production dans les décennies qui arrivent ? Le savoir-faire et les services pour la nature et l’environnement de nos éleveurs sont incommensurables, mais les jeunes générations auront-elles la possibilité économique de manger de la viande française ? Oui sans aucun doute, notre culture culinaire est forte, et les Français restent fortement attachés à nos productions de qualité, la plus contrôlée au monde.

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