Le cours de l’œuf explose et l’origine « France » s’arrache sur le marché européen

Depuis le scandale du Fipronil, le marché est soumis à de fortes tensions, car il manque des œufs pour satisfaire la demande. Les œufs français, non contaminés, sont particulièrement recherchés.

Depuis la crise estivale du fipronil, les œufs d'origine française suscitent l'engouement, car préservés de la contamination. « La demande s'est envolée », observe le CNPO, l'interprofession des œufs, à l'occasion d'un point presse, le 5 octobre. Passé le choc des annonces en août, qui a d'abord entraîné une baisse de la consommation, les Français ont vite repris leurs habitudes d'achat. Quant aux utilisateurs européens d'œufs et d'ovoproduits, ils se sont eux aussi reportés sur l'œuf tricolore.  

À cela s'ajoute « une baisse de la production européenne estimée autour de 4% » selon Loïc Coulombel, président du syndicat national des industriels et professionnels de l'œuf (SNIPO). Résultat : entre début août et la troisième semaine de septembre, le cours des œufs coquilles destinés aux magasins est en hausse de 25 %. « Entre cet été et aujourd'hui, le prix a même augmenté de 90 % pour l'œuf coquille destiné à l'industrie », précise Loïc Coulombel. Ce dernier constate déjà « des ruptures de livraison pour les industriels et la restauration hors domicile ».

Les élevages alternatifs tirent le marché

La France est le premier producteur d'œufs en Europe, avec 14,3 milliards d'œufs en 2016, talonnée par l'Italie puis l'Allemagne. Le marché français est toujours tiré par la demande d'œufs alternatifs, c'est-à-dire produits dans des élevages bio, Label rouge et plein air. Les œufs standards représentent encore 53 % des achats des ménages, mais les ventes sont en recul de 7,5% entre septembre 2016 et septembre 2017. Au contraire, le marché des œufs bio (12 % des volumes) progresse de 13,2%. Celui des œufs Label rouge (8 % des volumes) est en hausse de 13,5%. Quant au marché des œufs de plein air, hors Label rouge, (25 % des volumes), il augmente aussi de 6,7 %. 

Une transition difficile

Le principal challenge de la filière est de s'adapter à cette tendance de fond. Un « contrat sociétal d'avenir » a été engagé en 2016. « L'objectif est d'arriver à 50 % de poules pondeuses en élevage alternatif en 2022 », commente Philippe Juven, président du CNPO. Ce changement de système d'élevage nécessite, selon l'interprofession, 500 millions d'euros sur cinq ans. Pour les éleveurs qui ont réalisé de gros investissements, l'arrêt de la production en cage ne va pas être facile. Une telle transition demande « du temps et des moyens », insiste Philippe Juven.

Or, plusieurs enseignes de la grande distribution ont annoncé dans les médias vouloir arrêter leurs approvisionnements auprès des exploitations élevant des poules en cage. De quoi inquiéter la filière. « Leurs objectifs ne sont pas réalisables en termes de calendrier. Si la GMS veut enlever de ses rayons tous les œufs issus des élevages en cage, elle n'aura rien à mettre à la place », prévient Loïc Coulombel.