Fongicides sur céréale à pailles

Retrouvez dans cette note l’état des résistances aux fongicides utilisés pour lutter contre les maladies des céréales à paille et les recommandations pour limiter leur développement en 2020.

A l'issue de la campagne 2019, les résistances de l'helminthosporiose de l'orge aux SDHI et de la septoriose aux triazoles gagnent encore du terrain en France. Dans ce contexte, le recours à des fongicides multisites (chlorothalonil, folpel, mancozèbe, soufre) dans les programmes de protection devient stratégique. Ils permettent de maintenir un niveau de protection acceptable tout en ralentissant le développement des résistances. La recommandation de limiter l'utilisation des SDHI à une seule application par saison est maintenue, sur orge comme sur blé.

Helminthosporiose de l'orge : un compromis entre efficacité et sélection de résistance

Du côté des orges, la proportion de souches d'helminthosporiose résistantes aux SDHI reste très élevée (70 %). Quant à la résistance aux strobilurines (QoI), elle semble stabilisée à une fréquence de l'ordre de 30 % de souches. L'efficacité des SDHI est sévèrement affectée au point de s'avérer parfois moins élevée que celle apportée par une strobilurine. Il est donc toujours recommandé d'associer les SDHI avec des fongicides efficaces présentant un autre mode d'action. Mais le recours généralisé à des mélanges triples (SDHI + IDM* + QoI), s'il renforce significativement l'efficacité sur l'helminthosporiose de l'orge, accentue la sélection de phénotypes multirésistants aux SDHI et aux QoI. Un tel mélange trois voies doit être rigoureusement limité aux situations où l'helminthosporiose est la plus difficile à contrôler, en particulier sur variétés sensibles.

Septoriose du blé : les résistances progressent

Du côté des blés, les souches de septoriose dites MDR (pour Multi Drug Resistance), qui présentent une résistance croisée à plusieurs modes d'action, continuent lentement de progresser et représentent à présent plus d'une souche sur quatre (contre 14 % l'an dernier). L'occurence et la fréquence des phénotypes résistants aux SDHI a également augmenté en 2019, pour atteindre 13 %. Si cette faible fréquence ne devrait pas impacter l'efficacité des SDHI en 2020, la prévention de cette résistance est plus que jamais de rigueur.

Devant la multiplication des résistances sur blé, la protection au stade 1-2 nœuds (T1) n'interviendra que si strictement nécessaire et le maintien de fongicides multisites dans les programmes (chlorothalonil, folpel, mancozèbe, soufre) représente un enjeu stratégique, à la fois pour maintenir un niveau de protection acceptable et ralentir la progression des résistances.

Les recommandations formulées dans cette note visent en première intention à limiter la pression de maladie en encourageant le recours à la prophylaxie, aux variétés résistantes et aux outils d'aide à la décision, pour limiter le recours aux traitements et leurs effets non-intentionnels.
Rappelons que la résistance a pu conduire par le passé à renforcer les doses d'utilisation des solutions mises en œuvre, à multiplier les applications, ou encore à recourir à des mélanges de plus en plus complexes associant deux, voire trois molécules. Pour cette raison, le développement de populations résistantes augmente les coûts de production et nuit potentiellement à la santé et à l'environnement. Observer la résistance et formuler des recommandations adaptées pour en retarder l'émergence ou la progression contribue positivement à une agriculture durable et moins dépendante aux produits phytopharmaceutiques.

(*) IDM (Inhibiteur de DéMéthylation) : famille de fongicides dont les triazoles sont les principaux représentants.

Claude MAUMENE - Jean-Yves MAUFRAS - Gilles COULEAUD