Le houblon français se met la pression

L’essor des micro-brasseries et l’expansion de la consommation de bière stimulent la relance de la production nationale de houblon. Après l’interprofession InterHoublon, la création de l’Institut technique du houblon est en vue. La création variétale concentre à elle seule de nombreux enjeux.

Des assises nationales (août 2019), la création de l’interprofession InterHoublon (février 2020) et un premier congrès national rassemblant les houblonniers français, organisé à la mi-octobre dans le Lot-et-Garonne : la filière houblonnière fait preuve d’un certain activisme. Pourquoi tant d’agitation ? « Depuis quelques années, des producteurs se lancent dans la production de houblon en dehors des bastions traditionnels et historiques que sont l’Alsace et dans une moindre mesure Haut-de-France, explique Matthieu Luthier, président d’Agranova, une start-up spécialisée dans l’accompagnement des filières agroalimentaires. Il y une impérieuse nécessité de fédérer tous les acteurs, chercheurs, houblonniers et brasseurs pour répondre aux enjeux technique, économique, commercial et financier. La filière doit gagner en visibilité et doit mobiliser des fonds pour relever ces défis ».

Un institut technique dédié

Si le houblon ne part pas d’une feuille blanche, l’extension de la culture hors de ses plates-bandes historiques conduit nécessairement à revisiter les itinéraires culturaux, à commencer par les choix variétaux. « Il faut trouver l’adéquation entre le terroir d’une part et les attentes des brasseurs, poursuit Matthieu Luthier. L’aspect variétal est primordial car il conditionne pour une bonne part les caractéristiques intrinsèques du houblon, à savoir les arômes et l’amertume conditionnée par la teneur en acide alpha. Or il faut entre 10 et 15 ans pour mettre au point une variété. Il faut du temps, de l’argent et s’assurer que les variétés développées sont en phase avec la demande ». D’ici un ou deux ans, la filière devrait se doter d’un institut technique, qui existe aujourd’hui de manière informelle au sein de l’Association générale des producteurs de houblon.

Les micro-brasseries mais pas que

Le houblon made en France, c’est environ 500 ha et 65 houblonniers, concentrés en Alsace et dans une moindre mesure dans les Hauts-de-France, mais qui essaiment un peu partout sur le territoire, sous l’impulsion des micro-brasseries, mais pas seulement. « Les brasseries artisanales veulent très clairement rimer avec local, indique Matthieu Luthier. «Mais les grandes entreprises du secteur sont également soucieuses d’afficher l’origine France de leur ingrédients ».

Si la bière est une des rares boissons alcoolisées à voir sa consommation progresser au plan mondial, la filière houblonnière française joue la prudence. Les houblonniers ont dans le passé enregistré de grosses déconvenues, qui se sont traduites par la réduction drastique des surfaces, qui pointaient à 7000 ha au début du siècle dernier. Actuellement, c’est le Covid-19 qui joue les trouble-fête. La filière escompte cependant accroitre la sole de 200 ha dans les deux ans à venir. Avec la recherche variétale en amont, le sujet de la contractualisation avec l’aval devrait également être prégnant.