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Les nouvelles taxes chinoises sur le porc européen, coup de massue pour la filière
La décision de Pékin d'imposer provisoirement des taxes supplémentaires sur les importations de porc européen est « une très mauvaise nouvelle » pour les éleveurs et abattoirs français, qui envoient en Chine les oreilles et pieds de cochon dont les Français sont peu friands.
« C'est une très mauvaise nouvelle pour la filière porc dans son ensemble, et pas seulement à l'export, car cela aura sûrement un impact baissier sur le prix à la production en Europe », a déclaré à l'AFP Thierry Meyer, vice-président de l'interprofession française Inaporc, chargé des questions d'export. « Malheureusement, tout le monde va payer ». Cette taxe représente un nouvel épisode dans les frictions commerciales et politiques entre Bruxelles et Pékin, qui a entre autres mesures de rétorsion diligenté une enquête pour vérifier que les prix des morceaux de porc vendus en Chine par l'Union européenne (UE) ne sont pas artificiellement bradés.
Caution de 20%
En attendant la fin de cette enquête antidumping en décembre, les exportateurs européens s'étant fait connaitre auprès des autorités chinoises devront payer à partir du 10 septembre une caution correspondant à 20% de la valeur des produits, soit environ le double des droits de douane actuels. Certaines entreprises, en Espagne, au Danemark et aux Pays-Bas, ayant servi d'échantillon pour une enquête détaillée, ont eu des taux « personnalisés » allant de 15,6% à 32,7%. Les entreprises n'ayant pas coopéré auront par défaut un taux à 62,4%. La Chine est la première consommatrice mondiale de porc, une viande très utilisée dans la cuisine locale.
La Chine, le 1er marché export de la filière
En 2024, la France a exporté 115.000 tonnes de porc en Chine, de loin son premier marché à l'étranger puisqu'il représente environ un sixième du total exporté pour environ 240 millions d'euros. Sur les six premiers mois de 2025, les exportations ont atteint 62.722 tonnes (dont 38.000 tonnes d'abats congelés) pour 123 millions d'euros, selon les chiffres des douanes.
La Chine avait lancé l'enquête antidumping sur le porc européen en juin 2024, peu de temps après l'annonce par l'UE de sa volonté d'imposer des droits de douane supplémentaires sur les véhicules électriques fabriqués en Chine. Dans la même veine, Pékin a lancé des enquêtes sur le cognac et les produits laitiers.
Sur la viande de porc, « il n'y a jamais eu de pratiques européennes de dumping en Chine, car si on les vend là-bas, c'est parce que les prix sont bons », affirme M. Meyer, aussi directeur de la filière porc du groupe agroalimentaire français Bigard. « La Chine est notre premier pays d'exportation, nous y exportons des morceaux non consommés en Europe : pieds, oreilles... Donc pour nous c'est un marché important », a expliqué à l'AFP Anne Richard, directrice d'Inaporc. Ces produits sont des pièces très appréciées des Chinois, qui les payent bien plus cher que ne les payeraient les Français, plus friands de jambons et chorizo espagnols et italiens.
La France importe bien plus de charcuterie qu'elle n'en exporte ; les exportations de produits autres que la charcuterie vers la Chine permettent de redresser la barre de la balance commerciale globale de la France sur la viande porcine. Pour l'Espagne, l'impact sera encore plus important, puisque ce pays, premier producteur européen de porc devant l'Allemagne et la France, exporte la moitié de sa production, principalement en Chine. La décision chinoise pourrait accroître la concurrence au sein de l'UE pour les clients européens, et « le risque est que cela génère une pression à la baisse sur les prix du porc en Europe », signale Mme Richard.
D'ici la fin de l'enquête en décembre, les entreprises espèrent savoir si elles pourront négocier individuellement avec la Chine, comme ont pu le faire des producteurs de cognac.