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Mercredi 10/12/2025

DNC : un foyer dans l’Ariège, une nouvelle zone réglementée, une colère grandissante et un protocole expérimental ?

Un troupeau de 208 Blondes d’Aquitaine doit être abattu sur la commune des Bordes-sur-Arize (Ariège), au centre d’une nouvelle zone réglementée. Dans ce département, un front alliant la Chambre d’agriculture départementale et tous les syndicats réclame la suspension de l’abattage total et la mise en œuvre d’un protocole expérimental.

Le ministère de l’Agriculture ne s’était malheureusement pas trompé, en appelant à l’issue de la réunion du « parlement sanitaire » mardi matin à la « stricte observance des piliers de la stratégie de lutte » après l’apparition « récente » et « préoccupante » de foyers dans des zones réglementées existantes. L’après-midi même, la préfecture de l’Ariège annonçait qu’un foyer de DNC était confirmé au sein d’un troupeau allaitant situé sur la commune des Bordes-sur-Arize. Problème : la commune est située à 100 km des foyers les plus proches, à savoir ceux situés dans le département voisin des Pyrénées-Orientales, déclenchant la création d’une nouvelle zone réglementée.

Les zones réglementées DNC en date du 10 décembre (Source : ministère de l’Agriculture)
Les zones réglementées DNC en date du 10 décembre (Source : ministère de l’Agriculture)

Tir de barrage dans les Pyrénées-Orientales, le Doubs et l’Ariège

Dès l’annonce officielle, à l’initiative de la Coordination rurale de l’Ariège, des agriculteurs ont convergé vers l’exploitation touchée et ils étaient environ 200 ce matin à l’aube, bloquant les routes d’accès à l’exploitation pour empêcher l’abattage des 208 Blondes d’Aquitaine de l’élevage concerné. Depuis plusieurs semaines, la fronde se fait de plus en plus tangible pour dénoncer la stratégie d’abattage total des animaux. Le 2 décembre, l'abattage d'un troupeau de 83 vaches dans un élevage de Pouilley-Français (Doubs) s'est déroulé de manière houleuse, les forces de l'ordre usant de gaz lacrymogène pour repousser des centaines de manifestants. Le 12 novembre, c’est dans les Pyrénées-Orientales que des manifestant ont tenté d’empêcher l’abattage d’un troupeau sur la commune de Nyer.

Une stratégie assumée par le ministère…

Depuis son apparition en Savoie le 29 juin, la France a déployé une stratégie reposant sur le dépeuplement total des unités épidémiologique infectées, sur la vaccination de tous les bovins situés dans les zones réglementées autour des foyers (50km) et sur le renforcement de la biosécurité, notamment les restrictions de mouvement d’animaux à l’intérieur des zones réglementées. Une stratégie contestée par trois des cinq syndicats agricoles (Confédération paysanne, Coordination rurale et Modef), mais assumée par le ministère de l’Agriculture, dont l’objectif est d’éradiquer la maladie et pas de « vivre avec », et qui défend son bilan, avec la levée successive de trois des cinq zones réglementées et leur conversion en zone vaccinale.

… en attendant la stratégie 2026

Le ministère affirme par ailleurs que la stratégie de vaccination pour 2026 est en cours de « réflexion », les parties prenantes étant invitées à soupeser la balance bénéfices / risques d’un vaccination préventive généralisée, et notamment ses impacts sur l’export de bovins, de produits laitiers et de semences. L’Italie, qui a donné mardi son accord à l’introduction sur son territoire de bovins issus des zones vaccinale françaises, exige en contrepartie, avant le départ des animaux, une protection insecticide contre les vecteurs de la DNC, un examen vétérinaire et de tests sanguins favorables. Il faut par ailleurs que l’ensemble du troupeau concerné ait été vacciné depuis au moins 28 jours et que l’immunité collective ait été attinte dans les 50 km autour de l’élevage depuis 60 jours. De quoi faire réfléchir avant de vacciner à tout va, d’autant que la réponse et les conditions de l’Espagne se font encore attendre.

Un front syndical uni en Ariège pour un protocole expérimental

Dans le département de l’Ariège, la Confédération paysanne et Coordination rurale ont trouvé de nouveaux alliés pour contester la stratégie de lutte. Pas moins de 10 organisations (*), dont la FDSEA 09 et les JA 09, réclament « la suspension immédiate du dépeuplement systématique et la mise en place d’un protocole expérimental, complémentaire aux mesures prévues par l’arrêté préfectoral en vigueur ». Il comprend l’abattage systématique des animaux PCR positifs issus d’une suspicion, la surveillance PCR hebdomadaire des animaux appartenant à la même unité épidémiologique, pendant 4 à 6 semaines, la surveillance vétérinaire renforcée pour les autres unités épidémiologiques du cheptel, la lutte intensifiée contre les vecteurs, la recherche approfondie de l’origine de la contamination (analyses, traçabilité, appuis scientifiques), la vaccination massive, rapide et efficace au-delà des zones règlementées, la mise en place d’une zone de protection renforcée de 5 km autour du foyer, avec surveillance vétérinaire bihebdomadaire pendant 4 semaines.

« Contexte spécifique de l’exploitation concernée »

Les 10 organisations signataires de ce protocole invoquent le « contexte spécifique de l’exploitation concernée », citant notamment la distance séparant le foyer des cas connus dans les Pyrénées-Orientales, l’absence d’introduction et de mouvement d’animaux provenant de zones proches de foyers ou de zones réglementées, le caractère sédentaire de l’élevage, son éloignement des grands axes routiers, l’absence de contact direct avec les animaux des élevages voisins ou encore la contamination durant une période de faible activité vectorielle. « La croyance que l’État réussirait à éradiquer la maladie pendant l’hiver perdure », dénonce la Confédération paysanne.

109 foyers, 3089 animaux abattus

En date du 10 décembre, 109 foyers ont été détectés en France, répartis dans sept départements : Savoie (32), Haute-Savoie (44), Ain (3), Rhône (1), Jura (7), Pyrénées-Orientales (19), Doubs (1) et >Ariège (1). Ces foyers affectent 74 élevages. Le nombre d’animaux euthanasiés s’établit à 3089, non comptés les 208 du foyer ariègeois. Près de six millions d’euros ont été versés, dont 5,3 M€ d’acompte sur la valeur marchande des animaux (soit 95 % des acomptes prévus), et 0,565 M€ pour le renouvellement des cheptels. Un deuxième versement interviendra avant la fin d’année.

(*) Chambre Agriculture de l’Ariège, Libres de Cultiver Notre Avenir, FDSEA 09, JA 09, Confédération Paysanne 09, Confédération Paysanne Occitanie, Coordination Rurale Occitanie, Coordination Rurale 09, Chambre d’agriculture de la Haute Garonne, Ultras 64