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Pommes : la lutte contre le puceron se réinvente
Trois régions de l’Ouest mettent en test des solutions de lutte biologique contre le puceron cendré et le puceron lanigère sur pommier. Ces essais doivent permettre d’apporter des solutions aux vergers biologiques, mais aussi aux exploitations conventionnelles qui seront privées dans un avenir proche de la principale matière active de lutte contre ces ravageurs.
Alors que l’autorisation de mise sur le marché du spirotétramate (movento) est en sursis, les producteurs de pommes cherchent de nouvelles méthodes de lutte contre le puceron cendré et le puceron lanigère. À l’occasion d’une conférence lors du Sival à Angers le 15 janvier, les conseillères arboriculture de trois chambres d’agriculture de l’ouest de la France ont pu présenter plusieurs solutions basées sur des méthodes de lutte biologique et testées depuis 2023.
Les auxiliaires en premières lignes
Arrivé des États-Unis au début du XIXᵉ siècle, le puceron lanigère a été rapidement rejoint par son parasitoïde, un hyménoptère dénommé Aphélinus Mali. Présent dans le milieu naturel, cet auxiliaire permet de réguler les populations de lanigères. « Mais seul, il ne suffit pas », assure Julie Cadot, de la chambre d’agriculture du Tarn-et-Garonne. Pour compléter son action, en Pays de la Loire, des essais ont été menés avec des lâchers de coccinelles à deux points (Dipuntada) et de coccinelles farineuses. Dans des conditions climatiques difficiles, avec beaucoup de pluie et des températures fraiches, seules les larves de coccinelles farineuses ont été observées ensuite sur les arbres de l’essai. « Elles sont restées présentes pendant trois semaines. Cela montre que cet auxiliaire est plus adapté à des conditions de pluie et de température fraîche que la coccinelle dipuntada », conclut Nadia Tounsi, conseillère en arboriculture chargée de ces essais.
Une autre expérimentation, sur puceron cendré cette fois, a été menée en 2023 et 2024 en Charente-Maritime. « Nous avons réalisé des lâchers de pupe de syrphe », décrit Julia Crombez, conseillère arboriculture pour la chambre d’agriculture interdépartementale Charente-Maritime/Deux-Sèvres. Le stade pupe, situé après la larve et avant l’adulte, permet de positionner les insectes de manière espacée dans le verger. Les adultes colonisent ensuite par eux-mêmes les colonies de pucerons. « L’espèce de syrphe a été choisie avec Koppert pour que l’éclosion s’adapte aux températures de floraison des pommiers », évoque la technicienne. En 2023, le lâcher a permis de réduire significativement la présence de pucerons par rapport à la parcelle témoin. Le nombre d’œufs de syrphe observé était également plus important dans la parcelle test. « Mais le nombre de larves n’était lui pas plus élevé que dans la parcelle témoin. Est-ce que les traitements ont eu un impact ? Ils avaient été choisis pour être peu impactants », évoque Julia Crombez.
En 2024, les résultats ont été moins significatifs entre les parcelles témoins et les parcelles tests volontairement choisies dans des zones riches en biodiversité. La technicienne émet l’hypothèse que les syrphes y étaient déjà présentes. Pour les lâchers de ces auxilliaires, elle préconise donc de « privilégier les situations dans lesquelles un réensemencement est nécessaire, car le coût est important ».
Produits alternatifs et douchage
Les auxiliaires ne sont pas les seules méthodes de lutte biologique testées par les chambres d’agriculture. En Pays de la Loire, Nadia Tounsi a expérimenté le produit Afik, considéré comme substance de base et utilisable en agriculture biologique sur puceron cendré. « Cette solution emprisonne les larves, qui ne peuvent plus bouger ni se nourrir et meurent rapidement », décrit la technicienne. L’application s’est faite en deux passages, le 16 et le 19 juillet 2024. Avant la première application, la conseillère a relevé un niveau 3 d'infestation, soit très élevé. Après le premier passage, ce niveau était redescendu au niveau 1, équivalent à quelques colonies de pucerons encore visibles. Le deuxième passage, tout en ayant un effet positif, n’a pas permis de supprimer complètement les dernières colonies de puceron cendré.
Dans un deuxième essai mené simultanément, les arbres ont été lessivés à l’eau, avant l’application du produit. « Visuellement, après le douchage, les pucerons ne sont plus visibles », témoigne la technicienne des Pays de la Loire. La solution Afik a été appliquée lors de la remontée des pucerons. Après le premier passage, le niveau d’infestation était équivalent à 0. Il n’y avait plus de pucerons visibles sur les arbres. Autre impact et non des moindres, lors du retour des pucerons en octobre dans les pommiers des Pays de la Loire, les parcelles testées avec Afik se sont révélées plus propres que les témoins. « Le douchage n’est pas facile à réaliser sans un matériel adapté. Je cherche un concessionnaire qui pourrait construire une machine spécifique, mais ce n’est pas gagné », assure Nadia Tounsi.
Identifier la période de retour des puceronsFaute de moyens d’interventions au printemps, les expérimentations de lutte biologique s’intéressent à la période de retour des pucerons cendrés dans les arbres durant l’automne. Les actions mises en place sont la défoliation des arbres en septembre ou l’application de barrières physiques telles que l’argile, en octobre, pour perturber la reconnaissance des pommiers par les pucerons. |