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Vignes : choisir son couvert en fonction de l’objectif recherché
Pour optimiser l’utilisation de couvert végétaux dans les vignes, il faut avant tout définir l’objectif recherché : engrais vert ou simple couverture ? L’itinéraire cultural a lui aussi son importance pour privilégier l’enrichissement du sol ou l’effet occultant.
Avec l’évolution de la gestion du désherbage dans les vignobles, les couverts végétaux s’imposent comme une suite logique à l’enherbement naturel. C’est le parcours qu’a suivi Julien Bourchet, viticulteur dans le Vaucluse. « J’ai arrêté l’enherbement naturel permanent au bout de 8 ans car j’avais des problèmes de concurrence. J’ai continué l’enherbement naturel mais de manière temporaire pendant l’hiver. Enfin depuis deux ans, j’ai franchi l’étape du semis de couverts végétaux », retrace-t-il.
C’est une démarche qu’il mène collectivement, au sein du GIEE intitulé « Développer l’agroécologie sur les cultures pérennes des coteaux méditerranéens dans l’implantation de couverts végétaux temporaires ». Parmi ce groupe composé de 40 membre, il côtoie Claude Sollier, lui aussi adepte de l’enherbement naturel avant de passer aux couverts végétaux il y a 4 ans. « La réflexion du groupe est partie des problématiques de sols pentus et d’érosions rencontrés dans notre zone du parc du Luberon », explique Claude Sollier. D’une manière générale, l’objectif est d’améliorer la structure du sol et sa portance, l’enrichir en humus, garder une couverture hivernale et séquestrer du carbone, tout en réduisant l’érosion physique mais aussi organique.
La concurrence n’est pas un problème
Après 3 ans d’expérimentation, Claude Sollier n’a pas constaté de concurrence significative du couvert sur la vigne. Mais il n’a pas non plus observé d’amélioration majeure de la fertilité ou de la portance du sol en comparaison du couvert naturel de ray-grass/fétuque qu’il avait précédemment dans ses inter-rangs. « C’est un travail sur le long terme. J’attends de constater un impact visuel et sur les rendements avant de tirer des conclusions », relativise le viticulteur du Sud-Est.
En creusant une fosse pédologique, il a quand même pu constater une meilleure fissuration du sol sur les zones où il a semé des couverts. « Avec l’enherbement naturel, les plantes ont des plus petites racines, le sol est plus tassé et il y a moins de vie », souligne-t-il.
Quels couverts, pour quelles utilisations ?
Dans l’inter-rang, il est possible d’implanter trois types de couverts : un engrais vert, une simple couverture du sol et enfin un couvert mellifère. « Je déconseille ce dernier car il est interdit de traiter dans une parcelle où il y a des pollinisateurs. Ce serait comme arriver avec un paquet de bonbon empoisonnés au milieu d’une cours d’école », illustre Perrine Dubois, technicienne de l’association technique viticole du Maine et Loire (ATV 49).
Pour l’engrais vert, elle préconise un mélange essentiellement composé de graminées/légumineuses. « Le trèfle ou la vesce conviennent pour les semis avant le 15 septembre, sinon il faudra se tourner vers la féverole ou le pois fourrager », détaille-t-elle. Pour les graminées, le choix est large. L’avoine convient aux zones calcaires, le seigle pour les sols acides et le triticale partout. Il est possible d’y ajouter d’autres types de plantes comme le lin, la moutarde ou la phacélie, mais Perinne Dubois propose de le « faire avec parcimonie, soit pas plus de 5 à 10% du mélange ». C’est ce type de couvert que le GIEE de Julien Bourchet et Claude Sollier, par l’intermédiaire de l’association Adael, commandent chaque année. « Nous avons élaboré le couvert qui convenait le plus à l’ensemble des membres. Pour un semis en plein de 175 kg/an, il se compose de 75 kg de féverole, et de 25 kg de chacune des cinq autres espèces : pois fourrager, vesce, orge, triticale et avoine. A titre personnel, je rajoute 5 kg de crucifère pour l’effet racine pivot important », témoigne Julien Bourchet.
Bien choisir l’itinéraire cultural
Pour les engrais verts, Perrine Dubois insiste sur la nécessité de les détruire dès la sortie d’hiver. « Même si la partie aérienne ne s’est pas beaucoup développée, ce qui nous intéresse pour rendre les éléments puisés à la vigne, c’est la partie racinaire », souligne-t-elle. La destruction est mécanique, suivie d’une réincorporation au sol. Ces interventions doivent être réalisées relativement tôt pour éviter les gelées blanches dues au travail du sol.
Pour les couverts de couverture, un roulage lorsque les épis sont murs est suffisant. « S’il a trop poussé, il est possible de réaliser un broyage au printemps, à nouveau pour éviter les gelées blanches », indique Perrine Dubois. Si les grains sont à maturité au moment de la destruction du couvert, il peut se ressemer spontanément trois années de suite.
Si la composition de leurs couverts s’apparente à un engrais vert, Julien Bourchet et Claude Sollier le gèrent plutôt comme un mélange de couverture. « Je broie une première fois à 15 cm mi-avril, puis je repasse au ras du sol mi-mai. Forcément, la repousse entre les deux coupes pompe dans les réserves hydriques du sol, mais ce n’est pas une période à laquelle la vigne en a besoin. Par la suite, le cumul des deux mulchs va complètement occulter le sol, empêchant la repousse d’adventices », rapporte le premier. Claude Sollier garde lui son couvert le plus longtemps possibles. Pour ne pas gêner les travaux dans les vignes, il l’implante dans un inter-rang sur deux. « Depuis l’an dernier, je teste le rouleau Faca à la place du broyeur sur une partie des vignes. C’est sûr que visuellement le résultat est moins bon, mais ça permet d’aller plus vite ».
La gestion du rang
Des couverts végétaux pour le rang existent, mais ils doivent être utilisés avec prudence. « Ce sont des espèces comme la fétuque rouge ou gazonnante avec du ray-grass et du pâturin. Mais attention à la concurrence. Ils peuvent être compliqués à détruire. Il faut vraiment piloter à la parcelle », avertit Perrine Dubois. Les deux viticulteurs du Vaucluse ont plutôt tendance à laisser le couvert de l’inter-rang se rapprocher du rang, puis à le calmer en fin d’hiver. « Je passe un glyphosate à 2% fin mars sur 10 cm de chaque côté du rang pour éviter d’être piégé avec des vesces qui poussent dans les souches. Ce qui est intéressant, c’est que le couvert a quand même un effet bénéfique sur le sol du rang jusqu’à sa destruction », rapporte Julien Bourchet. Dans le même esprit, Claude Sollier teste le passage d’interceps dans les parcelles faciles d’accès pour détruire le couvert sur le rang.