Le séchage en grange pour plus d’autonomie

Depuis 2009, les associés de la ferme de Rublé se sont équipés d’un séchoir en grange. Sur cette exploitation située à Saint-Colomban en Loire-Atlantique, le maître mot est "autonomie". Depuis qu’ils ont réalisé cet investissement, les éleveurs ont stoppé les achats de luzerne déshydratée et de tourteau de colza.

Au-delà de l'autonomie alimentaire, les exploitants ont également décidé de se passer de maïs pour nourrir les 100 vaches laitières en agriculture biologique. « Nous transformons une partie du lait à la ferme, donc les ensilages nous posaient un problème de qualité », témoigne Benjamin Boileau, installé avec son frère et ses parents sur le Gaec. Si le système laitier est essentiellement basé sur le pâturage, le foin est primordial pendant les deux mois d'hiver durant lesquels il complète la betterave fourragère.

En été, pendant les périodes de sec, le foin est accompagné de méteil dans l'auge. Avec cette ration, les vaches produisent en moyenne 3 900 litres de lait en système monotraite. « Pour ce type d'alimentation, il nous fallait vraiment un foin de qualité. Le séchoir en grange s'est imposé », se souvient l'éleveur ligérien. Cette technique offre l'avantage de ramasser l'herbe entre 50 % et 70 % de matière sèche (MS), avec un optimal à 60 % qui évite de perdre les feuilles des légumineuses.

350 tonnes de stockage

Au Gaec de Rublé, le bâtiment de séchage n'est pas mitoyen de la stabulation. C'est une distributrice d'aliments qui est chargée par une griffe suspendue au plafond, avant d'aller alimenter les vaches. En plus de la zone de chargement et déchargement, le bâtiment se compose de trois cellules pour une capacité totale de stockage de 350 tonnes de foin.

« Dans la première cellule, je mets les premières coupes, du 15 avril au 15 mai. La seconde reçoit le foin de mi-avril à mi-mai et la troisième tout le reste », indique Benjamin Boileau. Lors du chargement de la distributrice, l'éleveur fait un mélange entre les trois cellules. « Le foin de la première zone de stockage a un bon équilibre énergie-protéine, mais plus on avance en saison, plus la protéine est importante et avec elle le risque d'acidose », analyse-t-il.

L'investissement du séchoir en grange représente 250 000 €, distributrice d'aliment et autochargeuse comprises. « Nous avons auto-construit une partie du bâtiment. Notamment tout le bardage bois et l'aménagement des cellules », décrit l'éleveur. S'il y a bien un choix que ne regrettent pas les associés, c'est l'achat en propre de l'autochargeuse. « Pour que le séchage se fasse de manière optimale, on ne peut pas rentrer plus de 10 hectares d'herbe par jour. Il faut aussi privilégier la rosée pour ne pas perdre les feuilles des légumineuses. Ce serait trop compliqué de partager ce type de matériel en période de pousse de l'herbe », constate Benjamin Boileau.

Une technicité à acquérir

Le séchoir fonctionne avec une gaine de ventilation qui souffle de l'air par les caillebotis au sol. L'air est aspiré dans le faux plafond du bâtiment où il est monté en température grâce à une couverture de tôles noires. Le remplissage des cellules en lui-même demande une certaine technicité afin d'éviter de compacter le fourrage, ce qui empêcherait l'air amené par la ventilation de monter dans les couches supérieures. Pour ce faire, l'herbe doit être lâchée en hauteur par la griffe pour se déposer en couches aérées.

« Les premières fois, il y a forcément des petites erreurs. Il faut alors re-brasser le foin pour qu'il sèche correctement. La première couche est la plus compliquée car il faut stocker entre 1,5 et 2 mètres de foin en une seule fois avec plus de poids sur les côtés pour que l'air ne s'échappe pas », rapporte Benjamin Boileau.

Une formation de 3 jours avec l'association des éleveurs de séchage en grange des fourrages (Segrafo) a été nécessaire pour maîtriser les techniques de conservation mais aussi de récolte. « Comme on ne peut mettre que 10 hectares par jour, il faut commencer à récolter tôt pour ne pas être dépassé par l'herbe. En avril, on fauche à partir de 1,5t/ha de matière sèche », explique l'éleveur.

La composition des prairies est elle aussi adaptée au séchage en grange. Les espèces tétraploïdes, trop chargées en eau, ont été bannies de l'exploitation. Dans l'association prairiale, la fétuque élevée permet de récolter tôt au printemps et à l'automne alors que le ray-grass anglais prend toute sa place au cœur de la saison. Trèfle blanc, hybride, violet et luzerne viennent compléter ce mélange.

« L'herbe est rentrée entre 24 et 48 heures après la fauche avec un ou deux passages de fanage selon l'avancée de la saison. Pour le ramassage, l'auto-chargeuse ne doit pas être réglée trop serrée pour ne pas compacter le fourrage. Ce serait préjudiciable pour le séchage », conclut Benjamin Boileau.