Frederike, la biologiste allemande devient fromager pour l’AOP

Depuis des mois, le Gaec Pellissier était à la recherche d’un agent fromager, en vain. Grâce à la formation POEC, ils ont embauché Frederike Alwes d’abord pour trois mois.

Avec la traite de 93 vaches et la fabrication de 150 saint-nectaire par jour en moyenne, le Gaec Pellissier à Saulzet-le-Froid (63) avait besoin de main d'œuvre à la fromagerie. "Chez nous, la main-d'œuvre est un besoin à long terme à cause de deux retraites à venir. Nous avons mis des annonces sur les sites dédiés, en vain. Nous voulions quelqu'un qui n'avait jamais fait les fromages pour lui enseigner notre façon de faire", précise Élodie Pellissier. Début 2018, elle s'est rendue à l'Interprofession saint-nectaire afin de sélectionner les candidats (lire ci-dessous) qui deviendraient les fromagers de demain. "Nous avons pris en compte leur envie et leur motivation, pour assurer une pérennité des personnes formées sur la zone."

Technique et polyvalence

Dès le début de la formation, les stagiaires se sont vu remettre une liste avec les coordonnées des exploitations d'accueil. À eux de trouver leur stage. Pour Frederike Alwes, 42 ans, le premier coup de fil, au Gaec Pellissier, a été le bon. Pendant les semaines de cours, elle a acquis toutes les bases, de la maîtrise des températures jusqu'au dosage de la présure. Fin de la formation le 24 avril. Dès le lendemain, Frederike remettait le pied à l'étrier avec en poche un CDD de trois mois, rémunérée au Smic pour 35 heures par semaine. "Ça me plaît beaucoup, j'ai vraiment eu de la chance d'arriver sur cette exploitation. Tout le monde est très sympa et patient pour m'expliquer les étapes de la fabrication", insiste-t-elle.

En reconversion En France depuis cinq ans, Frederike Alwes, de nationalité allemande et biologiste de formation, rêve de reconversion professionnelle. Dans un français impeccable à l'accent chantant, elle raconte son parcours. "Je me suis retrouvée sur la zone saint-nectaire un peu par hasard. Je voyais des offres d'emploi dans des exploitations, mais je n'osais pas postuler car je ne savais pas comment transformer du lait en fromage. À l'automne, j'ai suivi un stage Adema(1) qui m'a permis de découvrir l'agriculture. J'ai travaillé trois semaines dans une chèvrerie avec fromagerie, et j'ai adoré la transformation. J'aime travailler dans l'agroalimentaire. Quand j'ai reçu le mail de Pôle emploi sur la formation, je n'ai pas hésité. Pour être sélectionnée, j'ai dû me présenter devant un jury, j'étais très stressée !" Et pourtant, le fromage, Frederike semble en avoir toujours façonné. "C'est dur d'apprendre à mouler les fromages car il faut s'adapter à la tome. Dès la fin de la première semaine, Frederike maîtrisait le moulage, j'ai senti que ça allait le faire", sourit Élodie Pellissier. Aujourd'hui, la jeune agricultrice a confiance en son employée. "Je suis contente de son travail, elle écoute bien, elle suit mes conseils et elle n'a pas peur de poser une question quand elle ne sait pas. Et ça, c'est génial".

Partenariat gagnant-gagnant

"L'avantage, c'est que Frederike est biologiste à l'origine, ce qui fait qu'elle aussi m'apprend des choses. C'est un échange, ce n'est pas unilatéral", se réjouit Élodie Pellissier. L'arrivée de la fromagère a permis à l'exploitation de prendre un nouveau souffle et de dégager un poste pour les animaux et le travail extérieur. Résidant actuellement à une heure de Saulzet-le-Froid, pour Frederike, la route est la seule ombre au tableau. En attendant un éventuel déménagement, le Gaec Pellissier l'héberge gratuitement à côté de l'exploitation plusieurs nuits par semaine. Une solution sans doute provisoire, le temps de se rapprocher et de poursuivre sur un CDI...

(1) Accès des demandeurs d'emploi aux métiers agricoles.