Une nourrice automatisée au Gaec Hérault

Pas de robot de traite au Gaec Hérault, producteur fermier de saint-nectaire, mais un système entièrement automatisé de distribution de lait et concentrés aux veaux laitiers jusqu’au sevrage.

Au Gaec Hérault(1), à Maucher de Marcenat, une butte du Cézallier exposée aux quatre vents, “on a toujours voulu travailler confortablement, ça n’enlève pas la charge de boulot mais ça permet de l’accomplir plus facilement”, estime Frédéric Hérault, qui a rejoint ses parents sur l’exploitation en 2008, imité par son frère Romain en 2012. Réputé pour la qualité de ses saint-nectaire fermiers, le Gaec a aussi entrepris, à l’initiative de Romain, un travail d’amélioration génétique sur le second troupeau, allaitant. 
Ce souci d’améliorer leurs conditions de travail s’est traduit pendant des années par l’acquisition de matériel fonctionnel et performant, “pour ne pas tomber en panne tous les quatre matins”, une époque qui a laissé place à une autre vision stratégique que décrit Frédéric : “On s’est rendu compte que le matériel, ce n’était pas ce qui faisait gagner de l’argent ; notre porte-monnaie ce sont bien les vaches allaitantes, la production de lait et de fromages qui le remplissent.” D’où le choix des associés de déléguer des tâches comme l’épandage de lisier, ou encore, en réflexion, la fauche des parcelles, pour se consacrer à celles génératrices de valeur ajoutée. 
Se consacrer aux tâches à valeur ajoutée
Depuis quelques mois, c’est à un nouvel assistant, robotisé, qu’une autre mission a été confiée : nourrir les veaux laitiers. Un projet de nurserie automatisée audacieux “et un petit bijou d’innovation”, salue Vincent Charbonnel, conseiller bâtiment à la Chambre d’agriculture, qui a accompagné les réalisations successives des infrastructures de l’exploitation. Concrètement, les veaux naissants sont nourris au biberon les deux premiers jours de leur vie afin de bénéficier des bienfaits du colostrum, puis ils sont isolés en box individuels, “pour éviter toute contamination croisée”, précise l’agriculteur de Marcenat. Ils font rapidement l’apprentissage de la tétée automatisée via un bras mécanique relié à un Dal (distributeur automatique de lait) qui délivre trois fois par jour un lait “à la bonne température, à la bonne concentration, à la bonne quantité”, avec un système d’identification des veaux, permettant une alimentation individualisée. L’unité centrale installée dans la pièce attenante constitue la tour de pilotage de l’ensemble, délivrant le lait selon une courbe d’alimentation enregistrée dès l’entrée en cases individuelles et suivie jusqu’au sevrage
Au bout de 15-20 jours, les veaux passent d’abord par un parc d’adaptation puis en box collectifs à raison de petits lots homogènes de six à dix veaux. La quantité de lait est ajustée à la baisse dès lors que les veaux commencent à consommer de l’aliment, Dal et Dac étant connectés.
Cette deuxième partie de la nurserie est équipée de trappes d’entrée d’air et de cheminées d’extraction assurant par une ventilation dynamique une ambiance saine au bâtiment. 
Tétée optimisée
“Quand on a eu le projet bâtiment, on réfléchissait déjà à un Dal à veaux, mais on ne connaissait pas ce système CalfRail qu’on nous a proposé, sachant qu’il n’y en avait alors qu’un autre en France, dans le Jura”, relate l’exploitant. 
Ce qui a convaincu les associés, c’est le gain de temps permis dans un quotidien chronométré. “On trait 70 à 80 laitières et dès qu’on a fini, on enchaîne avec la fabrication, on travaille toujours à deux : le premier qui sort de la salle de traite attaque à la fromagerie, le second qui finit de nettoyer passait jusqu’alors 35 à 45 minutes à la nurserie pour faire boire les veaux ; aujourd’hui, la machine commence à les alimenter pendant qu’on débute la fabrication, on a une alarme sur smartphone si un veau ne tête pas bien ou pas assez, ça évite de courir partout !”, se félicite Frédéric Hérault avec désormais cinq mois de recul. 
Sanitairement au top
Tout en prévenant : la machine ne se substitue pas au regard attentif des éleveurs, soucieux du bien-être et d’une croissance régulière et optimale de ces velles qui constituent l’avenir du troupeau. Alain, leur père, assure pour l’heure cette surveillance, remplit le nourrisseur et passe un coup de jet pour le nettoyage. Sachant que les cases individuelles sont désinfectées entre chaque veau. “On voulait que les veaux entrent dans une nurserie saine, c’est le cas, on n’en a piqué aucun depuis janvier”, souligne le producteur fermier, pour qui tout projet bâtiment devrait débuter par une réflexion sur les jeunes animaux qu’ils soient laitiers ou allaitants. “C’est la base ! Certes ce sont des projets qui coûtent cher (250 000 € la nurserie équipée de l’installation automatisée) mais c’est un investissement rentable.”
Frédéric Hérault souhaiterait en outre aménager un parc extérieur dans le prolongement de la nurserie pour une phase transitoire et dans l’idéal, encore utopique, pouvoir suivre et assurer une courbe d’évolution régulière des petites génisses post-sevrage. “Plus tôt on met les animaux à la reproduction, moins ils prennent de place en bâtiment et moins ils coûtent”, résume-t-il.  

(1) Gaec à quatre : Alain et Marie-Jeanne, leurs fils Frédéric et Romain. SAU : 286 ha sur trois communes. Troupeau : 90 VL (55 t de saint-nectaire fermier fabriquées) et 85 allaitantes (65 salers, 20 aubrac).