Le guide de l’épargne pour les agriculteurs

Partie 3/7

La DEP, outil fiscal pour améliorer la résilience des exploitations

Lorsqu'une exploitation dispose d'une trésorerie suffisante, notamment les « bonnes années », les agriculteurs soumis à l'impôt réel peuvent opérer une DEP (Déduction pour épargne de précaution) sur leur revenu imposable. Au moins 50% de cette déduction doivent être placés sous forme d'une épargne : soit sur un compte bancaire dédié, soit sous forme de fourrages et stocks à rotations longues, soit, et c'est nouveau, sur un compte au sein d'une coopérative.

Dans la loi de finance 2019, la DPI (Déduction pour investissement) et la DPA (Déduction pour aléas) ont été remplacées par un dispositif unique, plus simple et plus souple : la DEP, Déduction pour épargne de précaution.

Cet outil a le même objectif que les dispositifs passés : inciter les exploitants à placer de l'argent les bonnes années, pour pouvoir le réutiliser les mauvaises années. La DEP fait partie d'une politique globale de gestion des risques en agriculture : elle se renforce et se professionnalise depuis plusieurs années pour améliorer la résilience des exploitations agricoles françaises. L'épargne de précaution s'intègre ainsi dans les outils de gestion des risques, aux côtés des assurances, des fonds de mutualisation professionnelle, et des équipements de protection (filets para-grêle, dispositifs antigel...).

Encourager fiscalement l'épargne

La DEP incite les agriculteurs à épargner via un avantage fiscal et social : la déduction réalisée sur le résultat imposable engendre une réduction de l'assiette sur laquelle sont calculés les impôts et les cotisations sociales. Toutefois, il ne faut pas oublier qu'une DEP devra toujours être réintégrée et donc qu'elle sera alors imposée et source de prélèvement sociaux.

Toutefois, cette réintégration est beaucoup plus souple qu'avant : il n'y a plus besoin de justifier de la survenue d'un aléa ou d'une baisse de chiffre d'affaires, car la DEP peut être utilisée pour « toute dépense nécessaire à l’activité professionnelle ». Cette réintégration doit être opérée, en une ou plusieurs fois, dans la limite de 10 années après la déduction. Un point de vigilance cependant : la réintégration devient obligatoire à la clôture du résultat lors de la retraite de l'exploitant. Il vaut donc mieux s'assurer d'avoir anticipé cette opération, pour ne pas se retrouver à devoir payer des impôts et charges à ce moment-là.

Autres points de vigilance : les ventes de matériel roulant agricole détenu depuis moins de deux ans et qui auraient été acquis avec des sommes issues de la DEP, ne peuvent pas bénéficier de l'exonération des plus-values ; en outre, le bénéfice engendré par la DEP peut être considéré comme une aide et doit donc être pris en compte pour les limites des minimis européens.

Des montants intéressants

Les montants qu'une exploitation agricole peut épargner sont plafonnés selon son bénéfice et son nombre d'associés (voir tableau ci-dessous). L'outil DEP ne peut s'appliquer qu'aux exploitations soumises à l'impôt sur le revenu réel. Celles soumises au régimes micro-BA ou à l'impôt sur les sociétés en sont exclues.

Montant maximal de déduction en fonction du bénéfice.

Au moins 50% des sommes retirées du revenu imposable au titre de la DEP doivent être effectivement placées dans une forme d'épargne. La Loi en prévoit trois pouvant se cumuler entre elles : l'épargne monétaire sur un compte dédié dans une banque (rémunéré souvent comme un « dépôt à terme ») ; l'épargne sous forme de fourrages et stocks à rotations longues ; l'épargne sur un compte de coopérative.

Protélis : la DEP au sein de la coopérative

C'est sur ce dernier « créneau » qu'un nouvel acteur est apparu en 2019 : Protélis. Son directeur, Franck Roger, est lui-même issu du monde coopératif, et l'idée de proposer un outil d'épargne de précaution « interne » est né d’une demande des adhérents. Cet outil permet de transférer directement de l'argent depuis le compte courant adhérent-coopérateur (ou de son compte bancaire) vers un compte dédié à la DEP au sein de la coopérative.

« Protélis est ouvert aux coopératives qui souhaitent développer leurs services « gestion du risque » à destination de leurs adhérents », décrit Franck Roger. Protélis est indexé sur chaque production livrée à une coopérative, selon une logique simple : si le prix moyen annuel de la production est supérieur à la moyenne historique, le coopérateur est invité à placer tout ou partie de la différence sur un compte individuel « DEP » inscrit au sein de sa coopérative, dans la limite fixée par la loi fiscale.

L'offre est disponible aujourd’hui sur 19 productions végétales ou animales. « Quand une coopérative nous contacte et souhaite ajouter une nouvelle production qu’elle collecte, nous travaillons le dossier et l’ajoutons dans la mesure du possible », poursuit Franck Roger. Petite société, Protélis repose cependant sur trois solides actionnaires : Groupama, Bioline by In Vivo et Natup.

Un placement doublement garanti

Protélis se présente sous la forme d'un outil digital. Chaque coopérative distribuant Protélis dispose d’une connexion privée, qui lui permet de réaliser les ouvertures de compte à ses adhérents. Chaque adhérent a ensuite son propre espace, où il gère sa DEP, mise en épargne ou reprise. Il aura un contrat par production, et il peut disposer de plusieurs contrats dans plusieurs productions et même plusieurs coopératives. Tout est regroupé dans son espace Protélis avec une lisibilité totale de sa DEP.

L’épargne est collectée par chacune des coopératives concernées. Chacune est libre d’y associer une rémunération. Cela peut constituer un service proposé à ses coopérateurs, tout comme ces derniers peuvent avoir à cœur de contribuer à la solidité financière de sa coopérative. Une garantie supplémentaire est apportée par Protélis : les fonds placés dans ce cadre au sein des coopératives sont automatiquement couverts par une assurance fournie par Groupama.

 

>> Partie 4 : Epargne-retraite : pourquoi il faut s'y intéresser

 

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