La pulvérisation par drone autorisée à titre expérimental

Elle ne concerne que les produits phytopharmaceutiques utilisables en agriculture biologique ainsi que les exploitations certifiées Haute valeur environnementale (HVE), dans tous les cas sur des pentes supérieures ou égales à 30%. Certains produits sont proscrits. Une distance de sécurité de 100 mètres s’applique à différents lieux. L’expérimentation s’achèvera en octobre 2021 par une évaluation par l’Anses.

La possibilité d'expérimenter la pulvérisation par drone était inscrite dans la loi EGAlim du 30 octobre 2018, plus précisément à l'article 82. Elle est désormais une réalité, suite à la publication le 8 octobre de l'arrêté ministériel du 26 août 2019 encadrant sa mise en œuvre. L'expérimentation doit permettre de déterminer les bénéfices liés à l'utilisation d'aéronefs télépilotés (drones) pour limiter les risques d'accidents du travail et pour l'application de produits phytopharmaceutiques. Le législateur a intégré de nombreux garde-fous qui devraient limiter de fait le nombre d'essais.

Les trois principaux, à savoir le recours à des produits utilisables en bio, l'ouverture du dispositif aux exploitations certifiées HVE (au nombre de 2272 au 1er juillet 2019) et plus encore l'autorisation accordée aux seules parcelles affichant une pente égale ou supérieure à 30%, confine le dispositif à des pratiques anecdotiques. Il pourrait s'agir notamment de parcelles relevant de cette viticulture dite « héroïque » en terrasses et gradins tels qu'il en existe en Alsace, dans le Beaujolais, dans les Côtes du Rhône Nord, en Savoie, dans le Diois, le Ventoux ou encore à Banyuls et Collioure (Pyrénées-Orientales).

Contraintes administratives

Avant de survoler les parcelles et de faire fi de la topographie, il faudra aussi escalader le volet administratif du protocole d'essai. Celui-ci impose la constitution d'un dossier précisant notamment la localisation des parcelles (plan au 1/5.000), les points de ravitaillement du drone, lesquels doivent être assortis d'une aire de rétention ayant une capacité au moins équivalente au volume total de la bouillie. Le dossier est soumis à l'examen de trois ministères. En cas d'autorisation, préfet et maires concernés doivent être informés avant traitement.

Une distance de sécurité de 100 m doit être respectée vis à vis des habitations jardins et lieux accueillant du public ou des groupes de personnes vulnérables, bâtiments et parcs où des animaux sont présents, parcs d'élevage de gibier, parcs nationaux, espaces classés, réserves naturelles, sites Natura 2000, périmètres de protection immédiate des captages délimités, usines d'eau potable et réservoirs, bassins de pisciculture, conchyliculture, aquaculture et marais salants, points d'eau, canaux de navigation, d'irrigation et de drainage, littoral.

Indépendamment des exigences AB ou HVE, certains produits sont proscrits, notamment les perturbateurs endocriniens et les molécules très persistantes et très bioaccumulables, sans compter une liste de produits portant des mentions de danger, quasi identique à celle figurant dans le projet d'arrêté ZNT "riverains".

Réglementation spécifique aux drones

Il faut bien évidemment intégrer et respecter la législation propre à l'usage de drones. L'exploitant d'un aéronef utilisé pour des activités hors loisir doit déclarer son activité à la DGAC, et renouveler sa déclaration à chaque modification de son activité et de manière systématique tous les 24 mois. Il doit documenter son activité et la façon dont il satisfait à ses obligations règlementaires dans un manuel d'activités particulières (MAP) qu'il tient à la disposition des autorités en cas de contrôle.

En l'occurrence, les activités de traitement relèvent du scénario de vol S1, caractérisant une opération en vue du télépilote se déroulant hors zone peuplée à une distance horizontale maximale de 100 mètres du télépilote. L'arrêté du 26 août 2019 précise que les aéronefs doivent êtres utilisés hors agglomération et à plus de 150 m d'un rassemblement de personnes.

Les télépilotes doivent détenir un certificat d'aptitude théorique de télépilote et une attestation de suivi de formation pratique (ou une attestation d'aptitude aux fonctions de télépilotes, pour les télépilotes déjà en fonction au 30 juin 2018).

La Suisse pionnière

Particulièrement concernée par la présence de vignes en forte pente, la Suisse autorise depuis 2018 la pulvérisation par drone. La société Agrofly par exemple assure notamment le traitement au moyen de drones embarquant 16 litres de bouillie, la couverture d'un hectare étant assurée par 5 rotations (pour recharger la cuve et changer les batteries) dans un laps de temps de 40 minutes. Sur le plan de l'efficacité, l'organisme de recherche publique suisse Agroscope la situe entre le tracteur et l'hélicoptère et considère qu'il existe de marges de progrès, en jouant sur les paramètres de hauteur et de vitesse.

La France se donne jusqu'au 31 octobre 2021 pour faire le bilan du dispositif expérimental, avec une évaluation ultime par l'Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses).