Ceta : « les standards de qualité européens désavoués », « la disparition de l’élevage français actée »

Le vote sans surprise - mais serré - des députés en faveur du Ceta est condamné par les syndicats agricoles, qui relèvent son incohérence au regard de la loi EGAlim. Des arguments réfutés par le député Jean-Baptiste Moreau (LREM), pour qui le véritable loup réside dans le projet Mercosur.

« Quelle cohérence avec le vote par ces mêmes députés de l'article 44 de la loi Egalim qui interdit « de proposer à la vente (...) en vue de la consommation humaine ou animale des denrées alimentaires ou produits agricoles pour lesquels il a été fait usage de produits phytopharmaceutiques ou vétérinaires ou d'aliments pour animaux non autorisés par la réglementation européenne ou ne respectant pas les exigences d'identification et de traçabilité imposées par cette même réglementation » ? s'est interrogée la FNSEA à l'issue du vote par la voie d'un communiqué. « Il y a quelques mois seulement, ces mêmes députés adoptaient pourtant la loi sur les États généraux de l'alimentation et son article 44 qui interdit l'importation de denrées agricoles ou alimentaires ne respectant pas les exigences de la réglementation européenne », a réagi de son côté la Coordination rurale regrettant « ce manque cruel de cohérence et cette nouvelle preuve de versatilité de la part de la majorité parlementaire ».

Menaces sur l'élevage

Les syndicats agricoles ont tous ferraillé contre la ratification du Ceta mais tous ont assisté, impuissants, au vote ultime des députés de la majorité (266 pour et 213 contre), même si 52 d'entre eux se sont abstenus tandis que 9 ont voté contre.

La Confédération paysanne avait manifesté son opposition le 16 juillet dernier devant l'Assemblée nationale aux côtés d'un collectif de 70 associations anti-Ceta. « Acculés par les analyses et arguments des opposants, l'exécutif et la majorité n'ont cessé d'énoncer des contre-vérités pour tenter de garder leur cap, celui qui consiste à approfondir la mondialisation économique et financière et le commerce transatlantique, quel qu'en soit le prix, alors qu'il faudrait tout au contraire de toute urgence les réguler au nom du climat, de la santé, de l'emploi, d'une agriculture de qualité, et plus généralement au nom de l'intérêt général » a régi le collectif.

Le Modef estime que « la République en Marche va ruiner les paysans français ».

Pour la Coordination rurale, « les députés de la République actent la disparition de l'élevage français » et « remettent également en cause tous les efforts d'adaptation que les éleveurs ont réalisés depuis des décennies pour fournir aux consommateurs une viande saine et produite dans le respect des règles environnementales les plus strictes et du bien-être animal ».

Un point de vue évidemment pas partagé par le député Jean-Baptiste Moreau (LREM), qui a pris la parole quelques minutes avant le vote. « En tant que petit-fils, fils et éleveur de vaches limousines moi-même, si j'avais le moindre doute sur la mise en danger d'une de nos filières les plus fragiles, je serais le premier a refuser la ratification mais c'est n'est pas le cas », a-t-il déclaré. « L'agriculture française a besoin d'exporter, de créer de la valeur ajoutée sur les marchés mondiaux ».

Ce à quoi répond la FNSEA : « nous ne sommes pas opposés aux échanges internationaux mais souhaitons changer de modèle : raisonner en termes de complémentarité au service de la sécurité alimentaire des pays et traiter à part l'agriculture, pour qu'elle ne soit plus la variable d'ajustement (...). Ce traité qui menace l'équilibre de notre modèle agricole familial et pave la voie à de nouveaux accords internationaux aberrants comme celui du Mercosur ».

« Le Mercosur, le véritable loup »

Le Mercosur, il en a été question dans les travées de l'Assemblée nationale, toujours dans la bouche du député de la Creuse. « Le Ceta, c'est un mieux-disant par rapport aux réglementation de l'Omc (...). A force de crier au  loup sur le Ceta, qui n'est absolument pas un danger pour l'agriculture française, on risque de ne plus être entendu quand le véritable loup arrivée, ce loup il porte un nom : c'est l'accord Mercosur qui aura  un effet dévastateur sur l'agriculture français et européenne ».

Le député a tout de même concédé la nécessité de renforcer les contrôles de qualité. « Nous devons cependant entendre les inquiétudes des agri et des consommateurs », a-t-il déclaré. « L'Europe doit se doter de moyens de contrôle sérieux sur la qualité des produits que nous importons et que nous échangeons au sein du marché unique. Je rappelle que  le dernier scandale alimentaire en Europe ne mettait pas en cause de la viande canadienne mais de la viande polonaise et roumaine ».

Pas sûr que le député ait convaincu ses concitoyens. « Ils veulent se rassurer en prétendant qu'il y aura des contrôles sur les viandes d'importation, mais déjà qu'ils ne parviennent pas à faire appliquer la transparence des origines des viandes en restauration collective... Comment voulez-vous que l'on ait encore confiance en eux ? » s'alarme Noël Entraygues, éleveur dans l'Aveyron, cité par la Coordination rurale.