Consommation électrique des ateliers laitiers : s’équiper pour moins dépenser

La ferme laitière de Derval (44) enregistre les consommations électriques des principaux équipements de son atelier laitier depuis 2012. Dans un contexte où la facture d’électricité pèse de plus en plus sur les coûts de production, cette ferme expérimentale, propriété de la chambre d’agriculture des Pays de la Loire, a présenté ses références le 12 décembre dernier, à l’occasion d’une journée portes ouvertes.

Longtemps, la consommation électrique des équipements des ateliers laitiers n’a pas été un sujet majeur de préoccupation pour les éleveurs : bien d’autres postes de dépenses étaient prioritaires à analyser et à optimiser pour réduire les coûts de production. Toutefois, avec la hausse récente des coûts de l’électricité, il devient désormais difficile de faire l’impasse sur cette source de dépense.

« La facture d’électricité, il faut s’y intéresser », commente Sébastien Bordereau, chargé de mission énergie à la Chambre d’agriculture des Pays de la Loire, lors de l’atelier qu’il animait le 12 décembre dernier, à l’occasion des portes ouvertes de la Ferme de Derval (Loire-Atlantique). Comme beaucoup d’autres exploitations françaises, cette ferme laitière expérimentale a vu ses factures d’électricité exploser au cours de l’année 2023.

Sébastien Bordereau, chargé de mission énergie à la Chambre d’agriculture des Pays de la Loire, a animé un atelier autour de la consommation électrique de l’atelier lait, le 12 décembre dernier, à l’occasion des portes ouvertes de la Ferme de Derval (44) (Crédit photo : Catherine Perrot)
Sébastien Bordereau, chargé de mission énergie à la Chambre d’agriculture des Pays de la Loire, a animé un atelier autour de la consommation électrique de l’atelier lait, le 12 décembre dernier, à l’occasion des portes ouvertes de la Ferme de Derval (44) (Crédit photo : Catherine Perrot)

« Sous l’effet de la hausse des tarifs et du changement d’opérateur, la facture mensuelle d’électricité de la ferme a été multipliée par 2,5 en une année, passant de 1072 € en janvier 2022 à 2672 € en janvier 2023 », commente Sébastien Bordereau, « et ce, alors que notre consommation était inférieure, à 9109 kWh en janvier 2023 contre 9683kWh en janvier 2022 ». La ferme a souscrit un contrat 54 kVA pour un prix du kWh à près de 0,3€

Une consommation suivie depuis 2012.

A la ferme de Derval, la consommation électrique est scrutée depuis 2012, et elle est détaillée pour les trois équipements les plus consommateurs : le robot de traite, le tank à lait et le chauffe-eau, qui ont été chacun munis d’un compteur individuel. « Grâce à ces enregistrements, nous disposons de références fiables, sur une longue durée. C’est notre rôle de ferme expérimentale de vous les communiquer », poursuit Sébastien Bordereau en s’adressant aux visiteurs.

Evolution de la facture d’électricité de la ferme de Derval. (Source : Chambre d’agriculture)
Evolution de la facture d’électricité de la ferme de Derval. (Source : Chambre d’agriculture)

La consommation électrique de l’atelier lait se situe depuis plusieurs années entre 45 et 55 kWh/1000 l de lait, pour une production annuelle d’environ 700.000 litres de lait. Ce niveau de consommation est très en dessous de la moyenne des fermes laitières, estimée autour de 100 kWh/1000 l selon les références de l’Idele, des Chambres d’agriculture et de l’Ademe. « A Derval, nous sommes dans un système performant », reconnaît Sébastien Bordereau.

Si on regarde les consommations détaillées, sur les 51 kWh/1000 l consommés en 2022, le tank à lait en a consommé 12, le robot 21 et le chauffe-eau 17. Ce dernier chiffre a interpelé les techniciens de la ferme : depuis la mise en place d’un récupérateur de chaleur sur le tank, le chauffe-eau consommait habituellement moins de 10 kWh/1000 l. « Nous étions revenus à la consommation d’avant l’installation du récupérateur. Nous avons compris que la hausse de consommation était due à l’entartrage des plaques de l’échangeur. Si on n’avait pas eu un compteur sur cet équipement, on ne l’aurait pas vu ».

Consommation des différents équipements de l’atelier lait de la ferme expérimentale de Derval (Source : Chambre d’agriculture)
Consommation des différents équipements de l’atelier lait de la ferme expérimentale de Derval (Source : Chambre d’agriculture)

Du bon entretien aux équipements qui réduisent la consommation

Pour Sébastien Bordereau, cette observation met en évidence l’importance du bon entretien des appareils. Elle souligne aussi combien un chauffe-eau est un équipement gourmand en énergie : avec une moyenne nationale de 18 kWh/1000 l de lait, une exploitation laitière de 700.000 litres dépense plus de 3500 euros chaque année pour chauffer son eau !

En dehors du récupérateur de chaleur, qui réduit de moitié cette consommation électrique, d’autres équipements participent à la performance de l’atelier laitier de Derval : d’une part, un prérefroidisseur, qui réduit la consommation du tank en évitant l’appel de puissance important lors d’un passage du lait de 35 °C à 4 °C ; d’autre part, l’installation du tank sous un abri en extérieur. « On trouve encore des tanks à lait dans des locaux fermés », décrit le conseiller, « un tank en intérieur, c’est 5 °C de plus dans la laiterie, donc 5 kWh/1000 l consommés en plus ! ».

« Il y a du travail à faire dans ce domaine », reconnaît Michel, éleveur laitier venu de Sainte-Anne sur Vilaine (Ille-et-Vilaine) à l’occasion de ces portes ouvertes. « Je me rends compte que nous avons du retard dans notre ferme. Jusqu’à présent, le retour sur investissement de ces équipements nous freinait ». Si, à présent, les équipements et installations sont rentabilisées en quelques années, leur installation n’est pas toujours entièrement du ressort des éleveurs : l’installation d’un récupérateur de chaleur par exemple dépend de la bonne volonté de la laiterie, qui est souvent la propriétaire du tank.

La ferme de Derval dispose encore de marges de progrès pour réduire sa facture électrique : d’abord, elle a testé durant 18 mois un nouveau type de tank (Serap) dont la consommation était nettement inférieure (7 kWh/1000 l contre 12 pour son tank habituel). Mais surtout, elle va prochainement installer des panneaux photovoltaïques (54 kWc) pour autoconsommer une partie de son électricité.

« Nous avons le projet d’effacer environ 30% de notre facture avec cette installation », commente Sébastien Bordereau. Ce taux d’effacement attendu est plus élevé avec un robot (qui fonctionne 24 h sur 24 h) qu’avec une salle de traite dont les horaires d’utilisation, tôt le matin et tard le soir, sont moins compatibles avec l’autoconsommation d’électricité produire par l’énergie solaire.