De vétérinaire à éleveuse : Amélie ne peut pas vivre sans les vaches

Le métier d’éleveuse, Amélie Asselin, 32 ans, l’a choisi en toute connaissance de cause. Elle l’a préféré à celui de vétérinaire, qu’elle a exercé plusieurs années. Pour cette jeune femme installée depuis deux ans à Pornic (44), il n’y rien de plus passionnant, de plus diversifié et de plus épanouissant que d’être agricultrice.

Vétérinaire, c’est un métier de rêve pour beaucoup d’enfants et adolescents. Mais ce n’était pas vraiment celui de la jeune Amélie, au début des années 2000. Fille d’un éleveur laitier dans le Loir-et-Cher, son rêve à elle, c’était suivre les traces de son père et élever des vaches. Mais ses bons résultats scolaires, et la pression bienveillante de ses professeurs comme de ses parents, l’incitent à viser « plus haut, plus prestigieux »

Ce sera donc vétérinaire, mais, dans ce cas, en médecine rurale, pour soigner des vaches. Bac scientifique, deux ans de prépa, un concours réussi, cinq ans d’école à Nantes, une spécialisation en « animaux de production », des stages et des retours réguliers à la ferme familiale pour donner des coups de main... Tout ce parcours plait bien à Amélie : elle aime apprendre sans cesse de nouvelles choses, et elle apprécie autant la réflexion que demande une thèse, que la « débrouillardise » sur le terrain.

Une passion pour les vaches et le milieu des éleveurs

Amélie exerce ensuite quelques années en tant que vétérinaire salariée dans plusieurs cabinets : d’abord dans l’Est, dans les Vosges et en Haute-Marne, puis dans l’Ouest, de nouveau du côté de Nantes. Dans son métier, ce qu’elle aime : le contact avec les bêtes, les échanges avec les éleveurs, « savoir les écouter, établir des relations de confiance, voire amicales ». Ce qu’elle aime moins : les gardes de nuit, la médecine des animaux de compagnie, et, surtout, le côté commercial, « gérer une clientèle » : « J’avais l’impression de jouer un rôle ».

A son retour du côté de Nantes, Amélie est salariée dans deux cliniques, chacune à mi-temps. Elle saisit une opportunité qui se présente d’un emploi à mi-temps dans une exploitation laitière, pour ne garder qu’un mi-temps vétérinaire. Ce premier pas lui fait prendre conscience que c’est dans une ferme qu’elle se sent le plus à l’aise, le plus « à sa place ».

Comme son diplôme vétérinaire lui permet de s’installer, Amélie commence alors des démarches pour devenir agricultrice : elle s’inscrit au RDI (Répertoire départemental de l’installation) et se rend dans plusieurs fermes qui recherchent des associés. C’est dans l’une d’entre elles, le Gaec Marais du Chatelier, à Pornic (44), que le courant passe le mieux. Elle y réalise un premier stage, puis un contrat de salariée à mi-temps. Comme cela confirme sa première impression, elle abandonne définitivement son métier de vétérinaire et engage son parcours à l’installation. Elle est épaulée par la chambre d’agriculture et par le Crédit agricole : « J’ai de la chance, ils ont cru en moi ».

Installée depuis presque deux ans, Amélie Asselin s’épanouit dans le métier d’éleveuse. Même lorsqu’elle refait des clôtures, elle a le sourire ! (Photo Catherine Perrot)

Transmettre : une stratégie de long terme

Amélie rejoint donc, en juillet 2021, le Gaec où travaillent déjà Christophe et Stéphane comme associés, et Franck comme salarié, Clément comme apprenti. Elle y reprend les parts de Patrick, qui vient de prendre sa retraite, et qui n’est pas peu fier d’avoir réussi à faire passer la ferme de 100% familiale (lui, son frère et ses parents) à un Gaec 100% constitué de tiers. « Ça a été une vraie stratégie d’entreprise à long terme, de veiller à constituer un réseau de potentiels candidats à l’installation, en accueillant régulièrement des stagiaires, des apprentis… », confie-t-il. Et bien sûr, en créant les conditions pour que chacun des associés trouve sa place. « Aujourd’hui, la ferme continue. C’est ce que je voulais, et c’est ce que mes parents auraient souhaité aussi ».

Pour Amélie, la transition avec sa vie d’avant n’est pas trop difficile : « La différence, c’est que j’ai davantage de vaches en bonne santé ! », s’amuse-t-elle. Et au niveau conditions de travail, « c’est pas pire que véto, on n’a pas de gardes à faire ! ». Son arrivée n’a pas bouleversé l’organisation de la ferme : sans s’agrandir en surface (265 hectares au total, dont 35 de marais), ni en nombre de vaches (120), la production laitière a augmenté de 200 000 litres pour atteindre 1,4 million de litres, livrés à Agrial et à la fromagerie du Curé nantais (en lait cru). Le Gaec compte également un troupeau de 55 vaches limousines label rouge, et 70 hectares de cultures de vente.

« Le tracteur, je n’en faisais pas chez mes parents. C’est ici, à la ferme, que j’ai tout appris. Et j’aime cela de plus en plus… Cela pourrait même étonner les gens qui me connaissent ! », décrit Amélie. (Photo Catherine Perrot)

« L’agriculture, ça bouge toujours ! »

Ce qu’Amélie aime plus que tout dans son nouveau métier : la diversité ! « On alterne entre le travail de bureau, le travail physique, le soin aux animaux, la gestion d’entreprise, la conduite des machines…. Par exemple, j’ai bien aimé faire les semis de maïs, mais je ne voudrais pas faire que cela. En agriculture, ça bouge toujours, il y a certes, une « routine », mais on n’a jamais deux années pareilles. Il y a de l’imprévu, de l’improvisation, on a de quoi s’amuser, sans perdre d’intérêt ! »

Installée en Gaec, au sein d’un village où tout le monde se connait, la jeune femme apprécie aussi énormément « les relations humaines » qui vont avec l’activité agricole. Amélie et ses associés travaillent d’ailleurs cette question sérieusement : la jeune femme a suivi une formation « installation en société » durant son parcours préparatoire. « Cette formation devrait être obligatoire. Je pense que nous allons continuer à nous faire accompagner sur ce thème par un intervenant extérieur ».

Son « grand diplôme » de vétérinaire, Amélie ne le regrette pas, mais elle ne voudrait pas que cela impressionne ou crée une distance avec les autres. « Avec mon doctorat de vétérinaire, j’ai eu parfois l’impression que je ne savais « rien ». Je suis trop théorique, alors que pour être agricultrice, il faut aussi être pratique, créatif… Mais c’est ça qui est bien, en agriculture, je n’aurai jamais fini d’apprendre ».