La DEP, nouveau levier fiscal au service de l’épargne de précaution

La loi de finances 2019 intronise avec la DEP un nouveau mécanisme fiscal en remplacement de la DPA et de la DPI. Objectif : lisser les revenus en vue d’améliorer la résilience, la viabilité et la compétitivité des exploitations

Aucune justification requise

C'est l'une des différences marquantes entre la DEP et l'ex-déduction pour aléa (DPA). Les sommes épargnées peuvent être mobilisées à tout moment et sans conditions, c'est à dire indépendamment de la survenance d'un sinistre, d'un aléa reconnu par l'Administration ou encore d'une baisse de valeur ajoutée de l'exercice. Les sommes épargnées peuvent être réintégrées dans l'assiette fiscale et sociale dans les 10 ans suivant leur déduction.

Un plafond annuel proportionnel aux bénéfices

Le montant total de la Déduction pour épargne de précaution demeure plafonné à 150.000 €. Mais le plafond annuel est fonction du bénéfice de l'exploitation alors qu'il était dans tous les cas plafonné à 27.000 € en cumulant DPA et DPI (Déduction pour investissement). Les montants déductibles dans le cadre de la DEP sont les suivants :

- 100% du bénéfice pour un bénéfice compris entre 0 et 27.000 €

- 27.000 € + 30% du bénéfice excédant 27.000 € pour un bénéfice compris entre 27.000 € et 50.000 €

- 33.900 € + 20% du bénéfice excédant 50.000 € pour un bénéfice compris entre 50.000 € et 75.000 €

- 38.900 € + 10% du bénéfice excédant 75.000 € pour un bénéfice compris entre 75.000 € et 100.000 €

- 41.400 € pour un bénéfice supérieur à 100.000 €

Au moins 50 % de l'épargne sur un compte bancaire

La Déduction pour épargne de précaution s'applique à condition d'inscrire au minimum 50% des sommes sur un compte bancaire dédié. Encore faut-il disposer de la trésorerie... Pour pallier au moins en partie cette contrainte, il est possible, dans une certaine limite, de substituer à l'épargne monétaire une épargne constituée de stocks. Il est également possible de satisfaire la condition d'épargne par le biais des sommes mises à disposition au sein d'une société coopérative agricole, d'une organisation de producteurs ou d'une association d'organisations de producteurs, dans laquelle il est associé en exécution d'un contrat mettant en œuvre un mécanisme de lissage des prix.

La prise en compte des fourrages et stocks à rotation lente

Afin de tenir compte de la diversité des situations, l'exploitant peut, dans une certaine limite, substituer à l'épargne monétaire une épargne constituée des coûts engagés dans l'année pour acquérir ou produire des stocks de fourrages destinés à être consommés par les animaux de l'exploitation ou des stocks à rotation lente. Pour garantir un minimum de trésorerie immédiatement disponible, cette épargne en stock ne peut pas excéder le montant de l'épargne monétaire. La prise en compte de ce type de stocks permet notamment de répondre aux préoccupations des secteurs viticoles et de l'élevage.

Incompatibilité entre DEP et exonération de certaines plus-values

Les cessions de matériel roulant agricole détenu depuis moins de deux ans et acquis avec des sommes prises sur la DEP ne peuvent pas bénéficier de l'exonération des plus-values s'appliquant à l'actif immobilier des exploitations. Un garde-fou à deux visées : éviter le cumul d'avantages fiscaux et prévenir les risques de la primauté fiscale dans le raisonnement des investissements en matériels.

Une DEP subordonnée aux aides de minimis

Le bénéfice de la déduction – et non les montants eux-mêmes - est subordonné au respect du règlement UE n° 1408/2013 relatif aux aides de minimis dans le secteur de l'agriculture. Les aides de minimis correspondent au montant d'aides pouvant être versées sans être considérées comme des aides d'État. Elles peuvent être distribuées sous la forme d'allègement de charges, de prises en charge de cotisations sociales ou d'aides directes. En date du 26 novembre dernier, la Commission européenne a approuvé un projet de règlement qui porterait leur plafond à 25.000 €, contre 15.000 € actuellement, sur une période de trois exercices fiscaux. Toujours dans ce projet, le plafond national passerait de 1 % à 1,5 % (de la production agricole).