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L'Anses met en garde sur les risques des variétés tolérantes aux herbicides
Les variétés rendues tolérantes aux herbicides (VTRH) font courir le risque d'un développement de résistances des adventices, et donc d'augmentation de l'utilisation de phytosanitaires, a averti l'Agence française de sécurité sanitaire (Anses).
L'agence s'est intéressée aux variétés de plantes rendues tolérantes à un herbicide par des techniques conventionnelles ou génétiques, alias "VRTH". "Après analyse des pratiques culturales, l'Anses confirme des risques de développement de résistances des adventices aux herbicides et in fine d'augmentation de l'utilisation d'herbicides, déjà mis en avant dans le rapport d'expertise collective Inra-CNRS de 2011", indique l'agence dans son avis du 28 novembre 2019. L'Agence pointe également "l'absence de traçabilité de l'utilisation de ces semences faisant obstacle à l'évaluation de leurs impacts sur les plans agronomique et sanitaire". Elle recommande donc de mettre en place "un dispositif de suivi afin de surveiller les éventuels effets indésirables liées aux VRTH". En effet, comme toutes les semences cultivables en France, les VRTH ne sont pas soumises à une évaluation des risques avant leur mise sur le marché et, à ce jour, il n'existe aucun suivi obligatoire de ces semences.
En France, la culture de VRTH transgéniques n'est pas autorisée, donc toutes les VRTH cultivées en France ont été obtenues par sélection variétale traditionnelle ou par mutagénèse aléatoire, indique l'Anses. La mutagénèse recouvre un ensemble de pratiques qui visent à introduire volontairement des mutations génétiques chez un organisme vivant. Elle est qualifiée "d'OGM caché" par ses détracteurs. Dans le cadre de la législation sur les OGM, les organismes obtenus par mutagénèse sont exemptés d'évaluation et d'autorisation de mise sur le marché, et aucun suivi obligatoire n'existe à ce jour, rappelle l'Anses. En France, les surfaces cultivées avec des VRTH en culture d'oléagineux représentaient, en 2017, 27% des surfaces de tournesol (soit environ 160.000 hectares) et 2% des surfaces de colza (soit environ 30.000 ha).
L'avis de l'Anses s'inscrit dans un contexte plus large de débat sur l'utilisation des biotechnologies en agriculture et d'un arrêt de la Cour de Justice de l'Union européenne susceptible d'avoir des répercussions sur leur encadrement réglementaire. Jeudi, la Confédération Paysanne et sept autres associations opposées aux OGM (Réseau Semences Paysannes, Amis de la Terre..) s'est alarmé de la situation exposée par l'Anses: "Le constat est accablant en matière de surveillance, qui se révèle défaillante, partielle et produisant des données inutilisables".
"L'avis de l'Anses confirme que l'opacité est toujours de mise quant aux impacts des herbicides sur la santé et l'environnement, quant aux contaminations génétiques et aux modes d'obtention de ces variétés", indiquent les organisations qui disent "craindre que le manque de données fiables cache une augmentation de l'utilisation des herbicides" et demandent "la suspension immédiate de l'autorisation de culture de toutes les VRTH".
Les plantes visées, essentiellement de tournesol et de colza, "absorbent des herbicides contenant également des coformulants comme le formaldéhyde et le métazachlore classés cancérigènes pour l'homme". Or, "ni les herbicides ni les coformulants ne sont recherchés dans les récoltes et les produits alimentaires, ni dans la plupart des nappes qui fournissent l'eau potable" dans le cadre des études menées, affirment les organisations.