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Le beurre et l’argent du beurre… vers un produit de luxe ?
Que serait la cuisine française sans beurre ? Que deviendrait l'industrie agro-alimentaire, grande consommatrice de ce produit ? Auguste Escoffier, père de notre gastronomie, se retournerait dans sa tombe si nous devions limiter l’usage du beurre. Et pourtant, il y a danger : son prix s’envole et ne reviendra probablement jamais aux niveaux d’avant 2020 !
Entre 2022 et mai-juin 2023, le prix de la plaquette de 250 g en grande surface a augmenté d'environ 30%. Pour ce début d'année 2025, les perspectives sont encore mitigées. Cependant, les consommateurs se trouvent relativement protégés grâce aux négociations commerciales annuelles des grandes surfaces et la loi Egalim. Mais ce n’est rien comparé au beurre industriel qui a atteint des sommets vertigineux ! En septembre 2024, il est parvenu à son pic historique à 8 200 €/tonne, avant de baisser légèrement. En janvier, son prix tournait autour de 7 425 €/tonne.
Comment expliquer ces importantes fluctuations ?
La réponse est complexe, mêlant enjeux internationaux, aléas climatiques et évolutions sociétales. D'un côté, nous avons une demande mondiale en constante augmentation, de l'ordre de 1,5% par an. De l'autre, une production qui stagne, voire diminue dans certains des grands bassins exportateurs. Ajoutez à cela des épizooties comme la fièvre catarrhale ovine en Europe depuis août 2024, et vous obtenez le cocktail parfait pour semer la panique chez les acheteurs et déclencher une flambée des prix.
La France, bien que productrice historique, n'échappe pas aux turbulences. Paradoxalement, l'hexagone importe plus de 200 000 tonnes de beurre par an, tout en en exportant 82 000 tonnes. Cette situation illustre la stratégie complexe de l'industrie laitière française : se concentrer sur les produits à forte valeur ajoutée tout en important pour ses besoins industriels.
Que nous réserve l'avenir ?
L'émergence de nouveaux acteurs exportateurs, comme l'Inde (1er producteur mondial mais n'exporte quasiment pas sa production) pourrait bouleverser les équilibres actuels. Cependant, la filière laitière reste particulièrement soumise aux aléas climatiques et à la décapitalisation bovine comme nous pouvons le constater en France. Ces contraintes sont une épée de Damoclès sur les grands bassins laitiers traditionnels. Tout laisse à penser que les prix resteront élevés.
Si une explosion des prix en magasin n'est pas à prévoir dans l'immédiat, les consommateurs doivent s'attendre à une tendance haussière durable. Les experts prévoient une augmentation de 5 à 7% par an, principalement en raison de la hausse des coûts des matières premières et de l'énergie.
Faut-il pour autant faire des réserves pour nos tartines ?
Probablement pas. Si le prix du beurre industriel s'envole, celui que nous trouvons en supermarché reste relativement stable grâce à la grande distribution qui se refuse à augmenter les prix. Cependant, cette stabilité apparente pourrait n'être que temporaire.
Si le beurre n'est pas encore devenu le nouvel or jaune, son statut de produit classique de cuisine est certainement remis en question. La baisse continue de la production laitière française depuis 2012, avec des prévisions annonçant une production de 22 milliards de litres en 2033 contre 25 milliards en 2014, laisse présager un avenir incertain pour ce pilier de notre gastronomie. Fini l'ajout de beurre dans les épinards ...
Autre question qui suscite de grands débats depuis des siècles et pas des moindres : êtes-vous beurre doux ou beurre salé ?