Semis de maïs : les clés de la réussite

Les chantiers de semis de maïs démarrent. Mais il est recommandé d’attendre que le sol soit réchauffé (10°C) pour favoriser une levée rapide. Quand semer ? a Quelle densité ? Avec quelles protections ou engrais associés ? (régions centre, Ile de France)

Un début de campagne dans le sec

L’hiver 2020/21 a été plus froid que le précédent. Contrairement à l’an dernier, des périodes de plusieurs jours avec des températures négatives ont été enregistrées, notamment sur mi-février (-7°C à Orléans le 11/02). On peut donc s’attendre à une pression plus faible au niveau des ravageurs que l’an dernier sur les cultures de printemps.

La pluviométrie importante de cet hiver a permis de reconstituer les nappes. Les cumuls de pluie sont supérieurs aux normales, notamment en Ile-de-France. Ils varient de 250 mm dans le Val d’Oise (95) à 170 mm dans le Loir-et-Cher (41) sur la période du 20 décembre au 20 mars (pour une moyenne de 200 mm sur toute la région Centre / Ile-de-France).

Cependant, le mois dernier a été relativement sec, il est tombé quasiment moitié moins d’eau sur l’ensemble des départements qu’une année normale. Dans ces conditions, il est important de préserver l’humidité de son sol et de semer plus profond.

somme de pluie

Les semis précoces : intérêts et limites

La précocité des semis reste un levier essentiel pour la compétitivité du maïs. L’intérêt des semis précoces est tout d’abord d’avoir une offre en température plus élevée pour espérer avoir des dates de récolte plus précoce et/ou un niveau d’humidité plus bas, une économie de frais de séchage et une qualité sanitaire préservée. Les semis précoces permettent de valoriser des variétés plus tardives pour bénéficier d’un potentiel de rendement supérieur. Ils permettent aussi une « esquive partielle » par l’atteinte des phases clés de mise en place du rendement avant les stress, ou les éventuelles restrictions estivales d’irrigation.

potentiels derendements

Côté risque, le gel est souvent évoqué pour les semis précoces, mais ce n’est pas le principal facteur limitant aujourd’hui. Avec le réchauffement climatique observé depuis 25 ans, un semis de mi-avril en 2021 n’est pas plus exposé au risque de gel qu’un semis de début mai dans les années 90. Par contre, l’arrivée d’une période froide et humide juste après le semis est un des risques majeurs en semis précoces : ces conditions difficiles entraînent une durée de levée très longue et exposent la culture aux problèmes agronomiques (battance des sols, reprise en masse du lit de semence), voire aux attaques de ravageurs dans sa phase d’installation. Cela peut se traduire par un défaut de peuplement, très préjudiciable au maïs.

La possibilité de semer tôt dépend avant tout du type de sol et notamment des capacités de ressuyage et de réchauffement. En général, les possibilités sont plus limitées en sols lourds, froids battants ou hydromorphes, restreintes en sols limoneux ou sableux, et plus larges en sols aérés de type argilocalcaires et limons argileux sains. Néanmoins, la situation doit s’apprécier au cas par cas.

En limons battants, il faut être particulièrement vigilant aux préparations trop fines en surface qui pourraient s’avérer battantes au retour des pluies. Tout peut être compromis si la levée n’est pas assez rapide ! D’une façon générale, mais en particulier dans ces situations, la fertilisation starter est recommandée.

Préparation du sol : s’assurer du ressuyage en profondeur

Avant toute intervention, il est indispensable de s’assurer du ressuyage en profondeur du sol.

Les opérations de travail du sol ont pour objectif de créer une structure favorable à la levée et à l’enracinement. Un bon enracinement permettra une meilleure valorisation de l’eau et des éléments minéraux. Les discontinuités dans le profil de sol sont particulièrement dommageables. En conditions sèches, il est préférable d’éviter de créer des horizons foisonnants. Les préparations creuses et soufflées doivent être proscrites puisque le contact graine/sol et racines/sol sera limité, réduisant l’humidification de la graine et l’alimentation hydrique et minérale de la jeune plante.

La transition entre le lit de semences et l’horizon délimité par les outils de reprise doit être progressive car, au sevrage (stade 4-5 feuilles), les jeunes racines se développeront dans cette zone. Une telle structure facilite les remontées d’eau par capillarité et évite les semelles bloquant l’exploration racinaire.

plants

Semis : soigner la mise en place du peuplement

Une levée rapide et homogène garantit un bon départ pour la culture. La graine doit être placée au contact de l’humidité de la terre fine dans un sol meuble (aéré) et rappuyé (non creux).

Il est conseillé de mettre le grain à une profondeur régulière, d’environ 3-6 cm, dans le frais. Moins profond, il est plus exposé aux attaques d’oiseaux et risque de ne pas germer en cas de sec prolongé. Trop profond, la levée sera plus lente et moins régulière. De plus, semer à une profondeur trop importante accentue les risques d’attaque de taupins.

Pour garantir un semis homogène, il est recommandé de ne pas dépasser, en bonnes conditions, 7-8 km/h avec un semoir conventionnel. En conditions plus difficiles, la vitesse sera réduite à 5 km/h.

Densité de semis : les chiffres-clés

La densité de culture se raisonne en fonction du potentiel de la parcelle (en premier lieu sous l’influence des ressources hydriques), du groupe de précocité, du type de grain et de la destination de la culture.

Concernant la précocité variétale, les variétés précoces présentent moins de feuilles que les variétés tardives. Or, le rendement d’une parcelle de maïs est directement lié au rayonnement intercepté par le couvert. Par conséquent, il est préférable d’augmenter le nombre de plantes/ha pour les variétés précoces afin de contrebalancer ce déficit en termes de rayonnement intercepté par rapport aux variétés tardives.

Le type de grains (corné ou denté) entre aussi en ligne de compte pour définir les densités de culture. En effet, pour les variétés à floraison précoce qui ont des grains cornés, le nombre de grains est déterminés par le nombre d’ovules par rang différenciés de manière précoce dans le cycle de développement de la plante. Ce n'est pas le cas pour les variétés à grains dentés, leur offrant davantage de possibilités de compensation.

tableau2

Penser à l’engrais starter

L’utilisation d’engrais starter a de nombreux avantages : développement plus rapide, homogène, permettant une moindre durée d’exposition au parasitisme et un gain de précocité à floraison indispensable dans le choix d’une stratégie d’évitement du stress hydrique. Pour tirer les bénéfices de cette stratégie, il est primordial de bien positionner l’engrais starter. Trop loin, il est moins efficace et ne joue plus son rôle de « booster » de la culture ; trop près, l’acide phosphorique peut brûler le germe et provoquer une perte de pieds. Le réglage des distributeurs d’engrais starter est donc un élément incontournable pour réussir cette technique. La localisation devra se faire en dessous de la ligne de semis et décalée de 4 et 5 cm du rang.

La dose recommandée est de 130 kg/ha de 18-46 (ou 130 l/ha de 14-48), ce qui permet d’avoir un bon effet starter et d’éviter des irrégularités de répartition sur la ligne (surtout vrai en solide). Il est possible d’aller jusqu’à 150-170 kg/ha en cas de parasitisme (nématodes par exemple). Par ailleurs, il est déconseillé de baisser la dose en dessous de 100 kg/ha car on risque d’obtenir de l’hétérogénéité de répartition de cet engrais starter, et donc de favoriser des levées décalées.

Quelle protection au semis contre les ravageurs ?

Contre les corvidés, en situation à risque, privilégier des semences protégées avec du Korit 420FS (coût environ 10 € par dose) dont l’efficacité est démontrée, même si insuffisante en situations de fortes attaques. Il est également nécessaire d’adapter l’itinéraire technique pour tenter de limiter les attaques :
• Eviter tant que possible les semis de maïs décalés dans l’espace et dans le temps ;
• Eviter les sols soufflés (attention aux préparations de sol en conditions sèches) ;
• Rappuyer correctement la ligne de semis : différences importantes selon le type de préparation de sol et les éléments semeurs ;
• Si les conditions le permettent, privilégier un semis suffisamment profond (4-5 cm ou plus).

Des expérimentations en grandes parcelles seront menées en 2021, si vous êtes intéressés pour y contribuer n’hésitez pas à contacter le bureau régional Arvalis à Ouzouer-le-Marché.

Contre les ravageurs du sol, la solution efficace reste l’utilisation de microgranulés dans la raie de semis :
• Belem 0,8 MG / DAXOL : à base de cyperméthrine avec un diffuseur DXP,
• Fury GEO : à base de Zeta cypermethrine avec un diffuseur,
• Karate 0,4 GR : à base de Lambda-cyhalothrine à appliquer avec diffuseur Syngenta,
• Trika Expert + / Trika Lambda 1 : à base de lambda-cyhalothrine, est un microgranulé sur support organo-minéral à utiliser avec un diffuseur.

Il est important de rappeler que l’utilisation de ces microgranulés, quels qu’ils soient, doit être faite avec un diffuseur et que l’efficacité est moins bonne en sol motteux et avec des semoirs sans soc. L’utilisation d’un diffuseur est nécessaire mais pas suffisante : l’efficacité des microgranulés est aussi influencée par les conditions climatiques. Attention également au respect des doses d’utilisation. D’une façon générale, concernant la protection contre les taupins et les scutigérelles, tous les facteurs agronomiques doivent être utilisés en accompagnement d’une protection insecticide mais aucun ne permet de pallier un défaut de son efficacité.

tableau3

 

Manon BOISSIERES - ARVALIS