L'assurance agricole s'adapte au réchauffement

Avec le réchauffement climatique, les assurances agricoles évoluent pour s'adapter aux risques croissants que font peser les aléas météorologiques sur les cultures et revenus des agriculteurs, aidées en cela par les progrès de la technologie.

Les assureurs estiment que l'agriculture subit 25% des dommages lors des catastrophes naturelles au niveau mondial, un pourcentage qui monte à 80% durant les épisodes de sécheresse. Face à cette menace, les compagnies d'assurances spécialisées proposent de plus en plus des produits spécifiques. "Nous avons toujours eu des aléas climatiques mais (l'assurance climatique) se développe de façon plus importante ces dernières années", déclare à l'AFP Jean-Marie Sander, président de la Confédération internationale du Crédit Agricole, lors de la présentation d'un livre blanc sur l'assurance agricole à l'occasion d'un congrès à New Delhi cette semaine.

"L'agriculture est une industrie lourde, avec beaucoup d'endettement, donc a besoin d'avoir des sources de revenus récurrentes malgré les aléas climatiques. Les aléas climatiques sont de plus en plus fréquents et de plus en plus forts", explique-t-il. Alors qu'en Europe l'assurance grêle existe pour les agriculteurs depuis près d'un siècle, l'assurance multirisques climatique ne se développe elle que depuis une quinzaine d'années. En France, environ 30% des surfaces agricoles (hors prairies) souscrivent actuellement à une couverture de ce type. Parmi les conséquences prévisibles sur la météo, le dérèglement de la planète semble renforcer les tempêtes océaniques et les inondations qui en découlent, rend les sécheresses et vagues de chaleur plus fréquentes et accroît les orages convectifs générateurs de grêle.

Satellites, drones

Alors que les assureurs dépendaient auparavant de stations météos au sol, ils estiment que les avancées de la technologie devraient leur permettre une meilleure identification des risques et faciliter le paiement des indemnités. Le recours aux images satellitaires, l'installation de capteurs au sol et même parfois le recours à des drones sont ainsi en plein développement et permettent d'affiner les produits, en proposant par exemple des assurances indicielles.

"Le croisement entre des outils d'observation de plus en plus perfectionnés et des outils de traitement des données, les fameuses +big data+, de plus en plus puissants devrait fournir à tous les acteurs de la chaîne, particulièrement aux assureurs, de nouvelles possibilités", dit Jean-Christophe Debar, directeur de la Fondation FARM. Face à la réticence des agriculteurs, qui jugent souvent ces cotisations comme un investissement trop cher, les assureurs appellent les États à subventionner les primes - ce qui est déjà le cas dans plusieurs pays - pour permettre la généralisation de cette couverture.

"La réalité est que le prix du risque est supérieur au prix actuellement facturé, avant subvention - qui est de 65% pour les exploitants en France", avance Thierry Langreney, directeur général adjoint du groupe Crédit Agricole Assurances, indiquant que ces assurances ne sont actuellement pas rentables pour les compagnies qui les proposent. Le marché de l'assurance agricole est concentré dans les pays à hauts revenus et les géants asiatiques émergents (Chine, Inde), avec les États-Unis représentant à eux seuls 38% des primes collectées au niveau mondial.

Du point de vue des assureurs, les agriculteurs à travers le monde n'ont pas encore pris totalement conscience de la nécessité de se protéger économiquement des menaces du réchauffement climatique. "Après des événements dramatiques, le taux de souscription augmente drastiquement. Quelques années après, s'il ne s'est rien passé, on peut avoir un retour en arrière" des agriculteurs, note Thierry Langreney.