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Accord UE-Nouvelle-Zélande : une avalanche de kiwis, approche plus ambiguë pour l’agneau

Un peu plus d’un an après la signature d’un accord de libre-échange entre la Nouvelle-Zélande et l'Union européenne, les filières kiwi et agneau n’ont que peu souffert de la baisse des droits de douane. Pour autant, les producteurs ovins restent particulièrement vigilants.

Depuis le 1ᵉʳ mai 2024, les échanges entre l’Union européenne et la Nouvelle-Zélande bénéficient d’un accord de libre-échange. Concrètement, l’Europe espère augmenter ses échanges de plusieurs millions d’euros avec ce pays insulaire situé de l’autre côté du monde, en lui ouvrant en contrepartie la porte aux exportations de produits agricoles. Sans surprise, près d’un an et demi après sa mise en œuvre, c’est le plus emblématique des produits néo-zélandais, le kiwi, qui a le plus bénéficié de cet accord. Ce fruit était soumis jusqu’à présent à un droit de douane de 8%. L’accord signé avec les Néo-Zélandais l’abaisse à zéro.

En 2024, année qui n’aura bénéficié de l’accord que de mai à décembre, soit 8 mois, les exportations de kiwi ont bondi de 52 millions d’euros pour atteindre 138 millions d’euros sur 12 mois. En volume, cela représente 41 242 tonnes, contre 23 561 tonnes en 2023. Des chiffres à comparer avec la production française : chaque année, ce sont 45 245 tonnes de kiwis qui sont produites par 1 500 producteurs sur 3 777 hectares de vergers. Avec l’accord de libre-échange, les importations ont donc presque atteint la capacité de production française. Et la tendance 2025 se poursuit sur la même dynamique. Entre janvier et juillet, les exportations sont déjà en hausse de 5 000 tonnes sur un an.

Les kiwis néo-zélandais arrivent en contre-saison de la production française. (Crédits photo : AM)

Des tonnages mais peu d’inquiétude

Si ces chiffres peuvent paraître impressionnants, ils n'inquiètent pas outre mesure la profession. Ces volumes de kiwis arrivent en contre-saison de la production française, n’impactant pas la commercialisation de ce dernier. « Cet accord n'a pas d'impact sur la commercialisation du kiwi français : malgré l'accroissement de ces importations (de contre-saison), la consommation de kiwi français en saison de commercialisation française est stable », analyse Adeline Gachein, directrice de l’AOPn Kiwi de France.

Des évolutions quasi nulles pour l’agneau

La viande ovine était l’autre produit inquiétant pour l’agriculture française inclus dans l’accord de libre-échange conclu avec la Nouvelle-Zélande. Les négociations ont abouti à l’octroi de 38 000 tonnes de viande ovine supplémentaire à droit de douane nul, qui viennent s’ajouter aux 113 000 tonnes de contingence de viande ovine déjà accordées historiquement. Là aussi, les chiffres peuvent paraître impressionnants sur un marché fragile comme celui de la production ovine en France. Pourtant, la Nouvelle-Zélande sous-utilise de longue date son contingent de viande ovine. En 2022, elle n’avait utilisé que 56% des possibilités d’export vers l’Europe. Vers la France en particulier, les chiffres des douanes ne montrent qu’une légère augmentation des importations entre 2023 et 2024. Interbev évoque même des chiffres en baisse entre 2024 et 2025.

La profession reste sur le qui-vive

Malgré ce constat plutôt rassurant, la filière reste très vigilante face à ce nouveau contingent de 38 000 tonnes. « C’est une épée de Damoclès que nous avons au-dessus de la tête. Si les débouchés vers la Chine et les États-Unis de la Nouvelle-Zélande devaient se fermer, il pourrait alors déverser tous leurs volumes vers l'Europe », craint Patrick Soury, président de la section ovine d’Interbev. Il se dit d’autant plus inquiet qu’un accord du même type pourrait voir le jour avec l’Australie qui produit deux fois plus d'ovins que la Nouvelle-Zélande, avec des coûts de production défiant toute concurrence. « Au Royaume-Uni, le mouton australien a pris la place de l’agneau néo-zélandais. Si ces deux pays entrent en concurrence en Europe, ça va être un massacre », s’alarme-t-il. D’autant plus que la production ovine australienne est orientée vers la laine, donc plus âgée et avec un goût plus fort que le modèle de production français. « C’est une viande qui émergera en restauration collective. Si vous la servez à des jeunes, vous les vaccinerez de la viande ovine », constate Patrick Soury.

 

Hausse de l’export de matière grasse de lait, fruits et légumes à surveiller

D’autres productions sensibles étaient concernées par la baisse des tarifs douaniers entre la Nouvelle-Zélande et la France. Les exports de matière grasse issue du lait ont ainsi augmenté de plus de 3 000 tonnes. Un chiffre à nuancer par la baisse de 1 800 tonnes des envois de beurre néo-zélandais vers la France dans le même temps.

L'oignon, dont 12 000 tonnes ont été exportées vers la France en 2023, n’a lui pas vécu d’effet « post-accord ». Seule la moitié de ce tonnage a été envoyée vers l'Hexagone en 2024. Même constat pour les pommes, fruit pour lequel les exportations néo-zélandaises ont très peu évolué entre 2023 et 2024.

En pleine saison de la tomate française, des tomates néo-zélandaises se retrouvent sur les étals des supermarchés... (Crédits photo : AM)