Ré-homologation du cuivre : décision reportée

Réunis mardi et mercredi à Bruxelles, les experts de l’Union européenne, chargés de se prononcer sur la ré-homologation du cuivre, ont reporté leur décision. La proposition mise en débat portait sur une ré-homologation pour 7 ans, à raison de 4 kg/an, avec lissage possible pour les cultures pérennes.

Y-aura-t-il du cuivre après Noël ? La question reste en suspens. Le 31 janvier 2019 prendra fin l'homologation de la substance, dont l'efficacité contre le mildiou de la vigne, et de nombreuses autres espèces, n'a jamais été mise en défaut depuis 1886. Problème : le caractère toxique et persistant du cuivre le place sur la liste des substances à substitution et l'expose au processus récurrent de ré-homologation. Le Danemark et les Pays-Bas l'ont d'ores et déjà banni de leur catalogue de produits de protection des plantes. Réunis mardi et mercredi à Bruxelles, les experts de l'Union européenne ont reporté leur décision. « Des pays de l'Europe du Nord sont à l'origine du blocage », déclare Jacques Carroget, vigneron bio et biodynamique à Anetz (Loire-Atlantique), secrétaire national viticulture à la Fédération nationale de l'agriculture biologique (FNAB). « C'est un dossier très important au plan sociétal. Nous interdire le cuivre, c'est nous obliger à recourir à des produits de synthèse pour protéger nos récoltes. Je rappelle au passage que les usages les plus importants de cuivre sont enregistrés en agriculture conventionnelle ».

De 6 kg/ha à 4 k/ha

Le cuivre est aujourd'hui homologué à la dose de 6 kg/ha/an, avec un lissage sur 5 ans. La proposition mise en débat portait sur une ré-homologation pour 7 ans, à raison de 4 kg/an, avec toujours la possibilité offerte de lisser cette dose sur 5 ans, afin de s'adapter à l'épidémiologie de la maladie. En France, en viticulture biologique, l'utilisation de cuivre est d'environ 5 kg/ha/an en année à forte pression de mildiou contre 3 kg/ha/an en année de faible pression. « La dose de 4 kg/ha est un défi technique pour de nombreuses régions françaises », poursuit Jacques Carroget. « Les doses de cuivre ont été divisées par deux en 20 ans, donc nous sommes totalement en phase avec le Grenelle de l'environnement. Personnellement, je plaide pour un maintien de la dose à 6 kg/ha, dont les scientifiques nous disent qu'elle est acceptable en termes d'accumulation dans le sol. Ce n'est pas les bio qui diront qu'il ne faut pas respecter le milieu naturel ».

Fractionner les apports

L'écophytotoxicité du cuivre ne laisse pas indifférents les agriculteurs bio qui, par la voie de l'Institut technique de l'agriculture biologique (ITAB), ont demandé à l'Institut national de la recherche agronomique (INRA) d'étudier les leviers à disposition pour en réduire l'usage, non sans espoir (voir encadré). Jacques Carroget en est l'illustration. « En 2018, année à très forte pression, j'ai utilisé un total de 3 kg/ha », déclare le vigneron. «Mais il ne faut pas se rater au départ, être à la fois très réactif et très performant du point de vue de l'application, et enfin multiplier les passages avec des doses fractionnées comprise entre 150 g/ha et 300 g/ha alors que les recommandations officielles évoquent 500 g/ha. Je ne suis pas un exemple. 4 kg/ha, ce sera un défi pour de nombreuses régions françaises ». La FNAB appelle le gouvernement français à mettre en place un « plan cuivre », donnant aux organismes de recherche fondamentale et appliquée les moyens de progresser dans les domaines de l'épidémiologie de la maladie, des impacts du cuivre, des alternatives etc. L'enjeu est simple : « éviter la déconversion d'un très grand nombre de producteurs et productrices bio, en totale incohérence avec les objectifs du Plan Ambition Bio 2022 », estime la FNAB.