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Blé 2025 : la hausse des surfaces ne suffit pas !
[Vidéo] Après une année 2024 marquée par des conditions climatiques difficiles et une baisse des emblavements, les surfaces de blé tendre repartent à la hausse en 2025, avec une progression d’environ 10% en France. Pourtant, ce rebond ne suffit pas à dissiper les inquiétudes des agriculteurs. Par ailleurs, la rentabilité des exploitations demeure fragile, malgré une demande mondiale soutenue.
Edouard Lasserre, Commidities et Financial Markets Broker chez Caceis dresse un état des lieux sur les différents éléments qui ont influencé les marchés des grains et des oléagineux ces dernières semaines.
La date du 2 avril, le « Libération Day », restera un souvenir impérissable pour de nombreux opérateurs des marchés financiers. L'annonce par Donald Trump de la mise en place de taxes à l'encontre de nombreux pays a entraîné une tempête sur l'ensemble des marchés. Il est important d'aborder ce point car, finalement, les marchés des grains et des oléagineux ont montré une certaine résilience face à la tourmente qui s'emparait de l'ensemble des places boursières.
Deux éléments ont cependant impacté le marché du blé. Le premier, est la hausse de la parité euro/dollar. Le second, est la baisse du prix du baril de Brent, qui est tombé à un plus bas depuis mars 2021, franchissant la barre des 60 $. Ces deux facteurs expliquent la baisse du contrat blé mai 2025 sur Euronext depuis mi-mars. Ce contrat, qui a perdu 15 €, constitue malheureusement une mauvaise nouvelle pour les producteurs, mais un avantage pour les exportateurs.
Depuis début avril, les exportateurs français ont réussi à écouler 180 000 tonnes de blé vers le Maroc, auxquelles s'ajoutent les 340 000 tonnes exportées en mars. Une dynamique similaire concerne les blés fourragers, avec de bons débouchés intracommunautaires en Europe pendant les mois de mars et avril. Ces éléments ont conduit FranceAgriMer à réduire cette semaine les stocks de fin de campagne de 100 000 tonnes, les estimant désormais à 2,8 millions de tonnes. En regardant vers la nouvelle campagne, les conditions de sortie d'hiver dans les principaux pays producteurs apparaissent plutôt favorables.
Hausse des surfaces, mais des conditions encore fragiles
En France, le ministère de l'Agriculture a rehaussé les surfaces semées de blé de 100 000 hectares : 4,63 millions d'hectares sont désormais consacrés au blé tendre pour la prochaine campagne, soit une hausse de 10 % par rapport au point bas de 2024.
Ce rebond reste toutefois modéré : il replace la sole juste au-dessus de la moyenne récente, mais en retrait par rapport aux décennies passées. Les semis d’hiver ont été plus tardifs que d’habitude, entraînant un certain retard dans le développement des cultures. Si 75 % des surfaces sont jugées en bon ou excellent état, ce chiffre reste inférieur à la moyenne quinquennale, bien qu’il soit meilleur que l’an passé à la même date.
À l’échelle internationale, la situation est contrastée. Aux États-Unis, malgré une baisse des notations « bon à excellent » par rapport à l’automne, les surfaces restent globalement dans les attentes du marché. En Russie, la part des surfaces jugées en mauvais état a nettement diminué depuis décembre, et les prévisions de production ont été revues à la hausse. L’Inde, de son côté, s’oriente vers une récolte record.
Prix sous pression et dynamique des marchés
Sur Euronext, le contrat blé mai 2025 a perdu 15 € depuis mi-mars, sous l’effet conjugué d’un euro fort et d’un pétrole en net repli, deux facteurs qui pèsent sur la compétitivité des céréales européennes à l’export. Les prix du blé restent ainsi orientés à la baisse, en partie à cause de la concurrence accrue des blés russes et ukrainiens, qui dominent les appels d’offres internationaux. Toutefois, la baisse de l’euro face au dollar a récemment soutenu les exportations françaises, notamment vers le Maroc et l’Europe, ce qui a permis de réduire les stocks de fin de campagne. Concernant le colza, la situation est différente : malgré la hausse de l’euro et la baisse du pétrole, le contrat mai 2025 sur Euronext a atteint de nouveaux sommets, dépassant les 550 € la tonne. Ce mouvement s’explique par la tension sur les disponibilités en fin de campagne et la volonté des triturateurs de sécuriser leurs approvisionnements. En revanche, les échéances sur la nouvelle campagne sont plus sensibles à la conjoncture internationale et à la volatilité des marchés pétroliers.