Faire communiquer le monde du handicap avec le secteur agricole

Le lendemain de la Conférence nationale du handicap à l’Élysée, le département du Cantal rebondissait en proposant une journée thématique autour de l’adaptation au milieu agricole.

Ce n’est pas un cours ordinaire qu’ont suivi, jeudi 27 avril, des élèves de  seconde pro et de première STAV(1) du lycée agricole Pompidou. Face à eux, pas de profs, mais deux élèves et une douzaine d’actifs invités. Le sujet ? “La ferme pour tous”, l’inclusion de personnes porteuses de handicap dans le milieu professionnel agricole. De vrais échanges - sans question tabou - ont contribué à faire évoluer le point de vue de la plupart des étudiants valides, lors de cette journée, nommée à juste titre “Ferme pour tous”. Mais avant d’entamer le dialogue, la soixantaine de lycéens étaient appelés à répondre à un quizz, en votant depuis leur smartphone, tandis que les résultats s’affichaient en direct sur grand écran.
Quizz
Le jeune public a ainsi pu découvrir que, “non, un Ésat n’est pas un établissement social en agriculture et territoires”(2), qu’on classait les handicaps en cinq grandes catégories : moteur, visuel, auditif, mental et psychique (et que l’on peut être polyhandicapé) ; que la première loi en faveur de l’emploi des personnes handicapées remontait à 1987 et qu’elle défendait depuis 2005 le principe d’égalité ; que les adaptations, comme la plate-forme élévatrice pour accéder au tracteur, ont un coût au moins égal à 12 000 €...  
Parmi les invités, des travailleurs de l’Ésat d’Anjoigny de Saint-Cernin à vocation agricole (bovins lait et transformation, bovins viande, œufs, porcs...) ; d’autres des services espaces verts de l’Arch et de l’Adapei, accompagnés de leurs moniteurs. Ils ont décrit leur quotidien qui ressemble bien à celui de n’importe quelle entreprise ou exploitation. “Ce n’est pas forcément les outils que l’on adapte, c’est le travail en fonction de la personne”, expliquent les moniteurs qui choisissent soigneusement les
missions que chacun peut accomplir sans mal. Une forme d’inclusion qui offre au travailleur handicapé le même matériel et les mêmes responsabilités qu’un confrère valide, la fierté d’y parvenir en plus.
Autonomie
Parmi les motifs de satisfaction, le travail en totale autonomie revient régulièrement, quelles que soient les missions confiées aux salariés handicapés ; un même constat chez les agriculteurs Mathieu Bruel et Grégory Daude qui ne cachent pas leur plaisir à savoir travailler seuls.
Finalement, la différence est-elle surtout dans le regard de l’autre ? Pour répondre à la question posée dans la salle, Thomas, qui a en charge l’entretien des espaces verts à l’Ésat de l’Arch, souligne que “tout le monde est différent”, que “personne ne se ressemble vraiment”, que “chacun a sa personnalité”... Alors effectivement, il y a des différences, mais comme chez tout le monde. Et donc pas de sentiment de gêne à ce niveau-là. Thomas pense même qu’il est bénéfique d’en parler. Il est atteint d’un handicap qui ne se voit pas (troubles musculosquelettiques) et considère que ne pas l’évoquer serait contreproductif. Un avis partagé par Damien qui travaille à l’atelier lait d’Anjoigny. Aucun ne va au travail en reculant. Surtout pas Grégory, éleveur près de Saint-Flour, qui admet qu’il s’agit “plus d’une passion que d’un métier”. Une passion qu’il prolonge même au-delà de la ferme, par un investissement au sein du syndicat des Jeunes agriculteurs dont il est référent lait départemental.
Après la pause déjeuner, les discussions se poursuivaient dans un autre cadre, celui de l’exploitation agricole du lycée qui ouvrait ses portes à tous.         

(1) Sciences et technologies de l’agronomie et du vivant.
(2) Ésat : Établissement et service d’aide par le travail qui permet aux personnes en situation de handicap d’exercer une activité professionnelle tout en bénéficiant d’un soutien médico-social et éducatif dans un milieu protégé.