FertigHy projette de construire une usine d'engrais décarbonés en France

La commune de Languevoisin-Quiquery, dans la Somme, pourrait voir la construction d'une usine d'engrais bas carbone d'ici 2027. L'objectif ? Produire 500 000 tonnes d’engrais d’ici à 2030 et se défaire de la dépendance énergétique russe. Mais l'or vert, l'ammoniac, reste encore très cher à la vente et suscite également des implications environnementales.

Lundi, s’est ouvert le 7e sommet annuel Choose France au château de Versailles, rassemblant 180 grands chefs d’entreprises étrangères. Ce rendez-vous a pour ambition de mettre en avant l’attractivité française. Cette année, plus de 15 milliards d’euros d’investissements ont été annoncés, ainsi que 56 projets potentiels. Parmi eux, la création d’une usine d’engrais azotés bas-carbone à Languevoisin-Quiquery, dans la Somme, financée par le consortium d’usines européennes Fertigy. Créé en juin 2023, il a été fondé par EIT InnoEnergy, principal actionnaire, mais aussi par l’entreprise espagnole spécialisée dans le développement d’énergie renouvelable RIC Energy, la société d’ingénierie allemande Siemens, la coopérative agricole française InVivo, l’entreprise d'ingénierie italienne Maire Tecnimont ou encore le géant brassicole néerlandais Heineken. Le groupement d’acteurs a annoncé être prêt à investir 1,3 milliard d’euros pour la construction de leur première usine d’engrais bas carbone en France.

Vers une réduction des émissions d'ammoniac 

Jusqu’à présent, la production d’engrais tels que l’ammonitrate 27 ou (CAN27), se faisait exclusivement à partir de gaz naturel pour obtenir de l’ammoniac NH3. Ce dernier, additionné à de l’acide nitrique, produit du nitrate d’ammonium. Bien qu’indispensables, les engrais produits de cette manière sont extrêmement gourmands en énergies fossiles et engendrent d’importants rejets de CO2. Les engrais azotés ont également des impacts négatifs sur l’environnement, notamment lors des transferts de composés azotés vers le sol, mais aussi lors des jours précédant l’épandage par évaporation. En 2020, le secteur agricole était responsable de 93 % des émissions nationales d’ammoniac. Enfin, les engrais azotés constituent des polluants pour les eaux de surface et souterraines. Un plan national de réduction des émissions de polluants atmosphériques a été mis en place : - 13 % d’émissions d’ammoniac et - 57 % de particules fines d’ici 2030. 

Les engrais azotés bas carbone

Le consortium FertigHy espère révolutionner le processus en produisant de l’ammoniac vert,  réalisé à partir d’électricité et de l’électrolyse de l’eau, et non plus de gaz naturel. Pour FertigHy, cette méthode participe à la décarbonation de l’agriculture grâce à une production plus respectueuse de l’environnement en réduisant l’une des principales sources émettrices de gaz à effet de serre : la fertilisation azotée organique et minérale. L’entreprise s’aligne également sur la feuille de route de l’Europe qui vise à réduire activement sa dépendance à la Russie, premier producteur de gaz, via le plan REPowerEu. 

Une production plus verte mais coûteuse

La construction de l’usine à Languevoisin-Quiquery débutera en 2027. Il s'agit d'un choix stratégique, les Hauts-de-France consomment beaucoup d’engrais azotés. FertigHy espère produire 500 000 tonnes d’engrais d’ici à 2030 et ainsi répondre à 15 % de la consommation française et à 30 % des besoins européens. Le ministre délégué de l'Industrie et de l’Énergie, Roland Lescure, estime que ce projet est “une première mondiale pour la décarbonation de notre agriculture et pour notre souveraineté alimentaire, qui permettra d’éviter l’émission de près de 1 million de tonnes de Co2 par an et de réduire de 30 % nos importations d’engrais azotés”. Cependant, l’utilisation de l’électricité est plus coûteuse pour la fabrication des engrais azotés. Actuellement, les engrais chimiques restent plus rentables que les alternatives, notamment en raison d’un manque de capacité de fabrication. La France a cependant prévu d’investir massivement dans les infrastructures de production d’hydrogène vert. La décision finale d'investissement de FertigHy est attendue pour fin 2026.