Les conséquences de la La flambée du coût de l’électricité menace l’élevage français

Un éleveur puydômois témoigne suite à la diffusion d’un communiqué d’INAPORC alertant sur les risques d’importations liés au surcoût de l’électricité et sur la nécessité d’instaurer d’un bouclier énergétique, à l’instar de l’Allemagne ou l’Espagne.

L’explosion des coûts de l’énergie, combinée à la forte hausse du prix de l’aliment des porcs, fragilise davantage les élevages porcins français. L’interprofession nationale porcine (INAPORC) reconnait que « le plan d’aide énergie proposé par la France est un premier signal positif », mais qu’il n’est « absolument pas à la hauteur de l’impact économique » subi par la filière, et appelle les pouvoirs publics à prendre des mesures complémentaires pour éviter la disparition de nombreux élevages porcins.
Surcoût de l’électricité
INAPORC alerte sur la perte de compétitivité de la France face aux principaux pays européens producteurs de viandes de porc et de charcuteries qui, eux, ont déjà mis en place des boucliers énergétiques : « l’Allemagne annonce ainsi un plafonnement du prix de l’électricité à 130 €/MWh (mégawatt heure), l’Espagne et le Portugal ont d’ores et déjà acté 200 €/MWh alors que plusieurs entreprises françaises ont dû acheter leur électricité à plus de 500 €/MWh », indique un communiqué de l'Interprofession, publié le 21 novembre.
Les exploitants français ayant contractualisé avec leur fournisseur d’électricité juste avant la crise limitent l’impact sur leurs factures, mais pour les autres, la note s'alourdit. Noël Thuret, éleveur dans les Combrailles témoigne : « la facture est 10 à 12 fois plus élevée qu’il y a deux ans » et ce malgré des mesures préventives prises quelques années plus tôt telles que « l'installation de panneaux solaires en autoconsommation, l’achat de matériel moins gourmands en énergie ou encore de l’isolation des bâtiments ».
Risques d’importations
Certains maillons de la chaîne sont plus impactés que d’autres car plus énergivores : c’est le cas des ateliers de transformation, des abattoirs et des ateliers naissage chauffés. Si la flambée des coûts de l’énergie impacte toute l’Europe, « tous les pays producteurs de porc ne sont pas soumis aux mêmes contraintes : chez nous, on a plus besoin de chauffer qu’en Espagne par exemple » souligne Noël Thuret.
Avec une France tout juste autosuffisante dans le secteur porcin (avec un taux de couverture de ses besoins de consommation de 105%), la disparition des entreprises et des élevages les plus durement touchés favorisera les importations, alerte INAPORC, qui précise que, sur les sept derniers mois, elles ont déjà progressé de 6,6 % sur le territoire.
Pour Noël Thuret, la délocalisation de la production et de l’abattage est inenvisageable : « on est très liés aux sols, il faut rester cohérent et assumer les investissements faits sur la région qui contribuent à notre souveraineté alimentaire ».
« La profession anticipe déjà une perte de 3 % de sa production en 2022 » indique le communiqué de l'Interprofession, qui appelle le gouvernement à « agir urgemment ».
Une chute rapide du prix d’achat
Sans un plafonnement des coûts de l’énergie par les pouvoirs publics et sans répercussion de cette hausse sur le consommateur, la profession craint une nouvelle baisse du prix du porc à l’achat auprès des éleveurs. Ce processus est déjà enclenché : le cours de porc au MPB (marché du Porc breton) est passé de plus de 2 € le kilo cet été à 1,80€ au 24 novembre 2022.
Selon Noël Thuret, la mise en place d’un bouclier énergétique est « primordiale pour la survie de l’élevage français, puisque nous n’avons pas la possibilité d’indexer notre prix de vente sur les fluctuations du marché de l’énergie ».
Surcoût des aliments
La problématique du surcoût de l’aliment reste la plus préoccupante d’après Noël Thuret, car elle touche tous les élevages, qu’ils soient hors-sols ou plein air. En 2021, l’alimentation animale représentait en moyenne 70% des coûts de production des éleveurs porcins. « Sur notre secteur (les Combrailles), ce serait intéressant de développer, par exemple, une filière "maïs humide" qui permettrait d’économiser le coût du séchage » évoque l’éleveur, qui travaille sur cette voie d'amélioration avec des céréaliers.
En attendant de trouver des solutions pérennes, « on peut s’attendre à un bilan très douloureux pour la filière », conclut l’exploitant.