« La robotique peut contribuer à relocaliser la production de légumes » (Fabien Arignon, Sitia)

Pour le fabricant du robot hybride et polyvalent Trektor, la robotique est un levier de compétitivité et d’attractivité des métiers. L’entreprise est en quête d’un partenaire pour assurer sa montée en charge industrielle et commerciale. Sera-t-il français ?

Basée à Bourguenais (Loire-Atlantique) et spécialisée dans les bancs d’essais automobiles et ferroviaires, la PME Sitia s’est lancée le défi suivant : concevoir un robot hybride (batteries rechargées par moteur diesel), polyvalent (vigne, arbo, maraichage), capable de valoriser les outils en parc, rentable et opérable par tout un chacun. Après sept ans de recherche et développement, le défi est relevé. « Le Sival consacre le début de la commercialisation du Trektor », annonce son directeur Fabien Arignon. Le constructeur propose une formule d’acquisition étalée sur 5 à 7 ans, au tarif compris entre 3500 et 4500 euros mensuels en fonction des services associés au robot. « En maraichage, le retour sur investissement est inférieur à deux ans », assure le dirigeant.

"Face aux difficultés de recrutement, certains de nos clients songent sérieusement à réduire leurs surfaces d’exploitation"

Distribué au sein du réseau Promodis, le Trektor a convaincu Vincent Jarny, président de Jarny MVS, distributeur de matériel agricole dans les Pays de la Loire. « Les restrictions d’usage du glyphosate engendrent davantage de passages et d’heures de tracteurs, explique-t-il. Face aux difficultés de recrutement, certains de nos clients songent sérieusement à réduire leurs surfaces d’exploitation ». Assurément pas le moyen de soutenir notre quête d’autonomie. En fruits et légumes, notre déficit commercial s’établissait à 2,1 milliards d’euros en 2019, selon FranceAgriMer, la situation empirant d’année en année.

Avec un robot susceptible de travailler 24 heures sur 24, « y compris la nuit et sans incommoder les riverains grâce au relais des batteries », précise Fabien Arignon, le Trektor peut apporter sa pierre à la préservation, sinon à la relocalisation de certaines productions.

"Il y a des tracteurs sous les hangars, mais le problème, c'est qu'il y a de moins en moins de chauffeurs"

En partenariat avec les Chambres d’agriculture des Pays de la Loire, Sitia vient d’apporter la preuve que son robot était capable d’assurer l’itinéraire cultural de planches d’épinard sous abri de A à Z, hors récolte. « Dans l’esprit des agriculteurs, la question n’est plus de croire ou de ne pas croire dans le robot : c’est de savoir lequel choisir », assure le dirigeant. « Il y a des tracteurs sous les hangars, mais le problème, c'est qu'il y a de moins en moins de chauffeurs ».

Sitia réalise systématiquement un audit des outils présents sur l’exploitation pour jauger leur adaptation au Trektor
Sitia réalise systématiquement un audit des outils présents sur l’exploitation pour jauger leur adaptation au Trektor

De l’usine au champ : attirer les jeunes (femmes)

Avec la compétitivité, l’attractivité est l’autre béquille de la robotisation, dans les exploitations, avec la promesse de tâches à la fois moins rudes et plus gratifiantes, mais aussi au sein des entreprises en amont. « C’est beaucoup plus facile d’attirer des jeunes talents quand l’entreprise s’inscrit dans une trajectoire de réduction des impacts environnementaux », relève Vincent Jarny. « On s’est aperçu que la robotisation participait à féminiser davantage nos métiers », se réjouit Fabien Arignon.

Le défi de l’industrialisation (made in France)

D’ici à la fin de l’année, le Trektor recevra toutes les certifications pour pouvoir travailler hors du champ visuel d’un superviseur, parachevant l’autonomie et la rentabilité. Le Trektor devrait aussi intégrer au fil du temps des capteurs servant l’aide à la décision en matière de conduite culturale. Sitia peut désormais se focaliser sur les enjeux industriels et commerciaux, un défi que l’entreprise ne se sent pas d’assumer seule. « Nous sommes en quête d’un partenaire industriel pour assurer notre développement », lance Fabien Arignon. Puisse-t-il être français, dans une logique de relocalisation industrielle, agricole et alimentaire.