Le caviar, un centenaire français

La France est le troisième producteur mondial derrière la Chine et l’Italie. La production est concentrée en Aquitaine et fait l’objet d’une demande d’IGP. En attendant, la crise sanitaire gâche la fête du centenaire et menace la filière, qui invite les Français à se faire plaisir, en oubliant le prix au kilo...

Les origines de production du caviar « made in France » remontent à 1920. La production était localisée en Aquitaine et plus précisément dans l’estuaire de la Gironde qui hébergeait alors des esturgeons sauvages, avant que ces derniers ne disparaissent et avec eux la production de caviar. Celle-ci renaitra dans les années 1990 à l’initiative de quelques producteurs disséminés en Aquitaine, à partir d’esturgeons d’élevage.

Le caractère historique de la production a son importance car il nourrit, en partie au moins, le projet de reconnaissance IGP Caviar d’Aquitaine, soutenu depuis 2013 par l’association Caviar d’Aquitaine. « Nous avons bon espoir de décrocher l’IGP dans les deux années à venir, déclare sa secrétaire générale Sandrine Rambert. L’association s’est d’ores-et-déjà dotée d’un cahier des charges relié à la marque collective Caviar d’Aquitaine qui préfigure celui de la future IGP et auquel se conforment les quatre producteurs adhérents. Ce cahier des charges stipule notamment que les poissons doivent naître et être élevés en Aquitaine ».

La région Nouvelle-Aquitaine concentre six des sept entreprises du secteur, la septième étant localisée dans le Loir-et-Cher. Pour maitriser l’ensemble du cycle de vie de l’esturgeon, la filière a développé un savoir-faire dans la reproduction des esturgeons de l’espèce Baeri, adaptée aux rivières et plans d’eau douce de la région.

10 ans pour produire du caviar

Avec une production de 43,5 tonnes (2019), la France se situe au troisième rang mondial derrière la Chine (entre 100 t et 150 t) et l’Italie (54 t). ). La production de chair d’esturgeon s’est élevée quant à elle à 425 tonnes. « Si la démarche IGP aboutit, elle viendra conforter la marque collective Caviar d’Aquitaine créée par les quatre pisciculteurs de l’association et confortera la stratégie de différenciation vis-à-vis de la concurrence », poursuit Sandrine Rambert.

Plus qualitatif, le caviar français est aussi le plus cher. Mais il faut faire le distinguo entre le prix du produit et la rentabilité des élevages. « Les producteurs de caviar sont des agriculteurs », déclare Sandrine Rambert.

La crise sanitaire constitue une grave menace pour la filière, qui écoule 70% de sa production dans les trois derniers mois de l’année, avec une prédilection pour la restauration, qui assure 60% de ses ventes. L’export assure 27% des débouchés, le caviar français étant jugé comme un produit d’excellence dans de nombreux pays, dont la Russie, référente s’il en est.

Les producteurs anticipent une baisse de chiffre d’affaires de 30% cette année. Certains esturgeons passeront une année de plus dans les bassins, ce qui alourdira les coûts. Pour produire du caviar, il faut compter deux ans pour élever et sexer les alevins puis au minimum sept ans pour atteindre la maturité des femelles.

Le caviar ne se consomme pas, il se déguste (Crédit photo : Caviar d’Aquitaine)
Le caviar ne se consomme pas, il se déguste (Crédit photo : Caviar d’Aquitaine)

Quelques grammes suffisent

Pour passer le cap de la crise sanitaire et de ses impacts, la filière en appelle au soutien des consommateurs, manifeste lors du premier confinement. Certes, mais à 2.000 euros le kilo, le prix n’est pas tout à fait aligné sur celui de la fraise ou de l’asperge d’alors.

« Il faut oublier le prix au kilo, rassure Sandrine Rambert. Le caviar est un produit qui se déguste à raison de quelques grains posés sur côté de la main et dont la saveur va se révéler sous la langue. Avec une cinquantaine d’euros, vous pouvez partager une expérience unique en famille ou entre amis, sur une rondelle de pomme de terre cuite à l’eau ou encore avec un œuf de caille, le tout accompagné par exemple d’une coupe de Crémant de Bordeaux rosé. Confinement mis à part, vous n’êtes pas obligé d’attendre Noël pour déguster du caviar français. Le caviar, c’est toute l’année ». En voilà une bonne nouvelle.