Le plafonnement de la production solaire favorise t-il l’installation des panneaux au Nord ?

Il peut être tentant de répartir les panneaux entre le Nord et le Sud pour baisser le productible moyen de la centrale et ainsi limiter le nombre de kWh vendus à bas prix. Est-ce que ce raisonnement tient la route ? En détail, quelques explications pour mieux comprendre.

Depuis fin 2021, dans le cadre de ces contrats d’achat d’électricité, l’Etat plafonne la production des centrales solaires les plus puissantes à 1 100 heures maximum. Au-delà de ce seuil, les kWh injectés sont achetés à un tarif très bas : 4 centimes d’euros contre environ 13 pour le tarif plein en vigueur.

En quoi consiste cette règle de plafonnement ?

Lorsque l’Etat a mis en place ses contrats d’achat d’électricité, un plafond de production à 1 600 heures a été fixé afin de limiter le risque de fraude. Traduisez 1 600 kWh d’électricité maximum pour 1 kWc de puissance installée sur le toit, soit pour une centrale de 100 kWc, 160 000 kWh/an de production maximum.

Au-delà, les kWh injectés ne sont plus achetés au tarif plein en vigueur mais à seulement 5 centimes d’euros.

Cette règle a changé en octobre 2021. Afin de mieux répartir les projets entre le Sud et le Nord de la France, ce seuil a été abaissé à 1 100 heures, uniquement pour les centrales comprises entre 100 et 500 kWc.  Au-delà, les kWh injectés sont achetés 4 centimes d’€, un tarif non soumis à l’indexation annuelle sur l’inflation contrairement au tarif plein.

Pour les centrales ≤ 100 kWc, le plafond reste à 1 600 h.

Quel manque à gagner génère cet écrêtement ?

Dans notre département, la perte financière sur 20 ans est relativement faible : environ -2% de bénéfice sur 20 ans pour un toit incliné à 17° et -7% pour un toit à 35°.

Avec leur 1400 kWh/kWc de productible, les projets du Sud de la France (Région PACA) sont quant à eux beaucoup plus pénalisés : -30%.

Avez-vous intérêt à limiter la puissance de la centrale pour ne pas injecter des kWh achetés 4 centimes ?

NON. Le calcul du plafonnement est lié au productible. Donc quel que soit la puissance de la centrale, si le productible est supérieur à 1 100 kWh/kWc, vous conserverez toujours une proportion de kWh à bas prix. Vous avez donc tout intérêt à couvrir le maximum de surface au Sud.

A puissance de centrale équivalente, faut-il chercher à répartir les panneaux entre le Nord et le Sud ?

NON. Chercher à répartir les panneaux pour tendre vers un productible moyen de 1 100 kWh/kWc n’est pas rentable. Plus le productible est élevé, plus vous générez de bénéfice.

Par conséquent, remplissez au Sud puis complétez éventuellement au Nord.

Les montages Nord/Sud sont-ils rentables ?

OUI. Mais cela dépend de la répartition.

De manière générale, les toitures peu inclinées des hangars agricoles sont des supports assez propices aux montages sur deux pans car moins impactés par l’orientation que les autres bâtiments. Une centrale orientée Nord perd 27% de productible sur un toit incliné à 17° contre 47% lorsqu’il est à 35°.

Une centrale 100% Nord n’est pas rentable. Mais une association 50% Nord/50% Sud, qui perd seulement 13% de production, soit sensiblement la même chose que Est/Ouest, peut l’être. Sachant qu’en terme de rentabilité, chacun place le curseur au niveau où il le souhaite. Certains voudront que l’investissement s’amortisse en 10 ans tandis que d’autres exigeront que la centrale paie le bâtiment qui en dessous. L’exigence n’est pas le même !

Côté technique, plusieurs paramètres peuvent jouer en faveur des montages sur deux pans.

Le premier concerne le dimensionnement des onduleurs.

Lorsque tous les panneaux sont orientés au Sud, l’onduleur doit être en mesure de convertir la pleine puissance de la centrale, particulièrement les pics du milieu de journée, au printemps ou l’été. Les installateurs comptent en général un ratio de 120% pour dimensionner l’ensemble :

100 kVA d’onduleur à 120 kWc de panneaux

Toutefois, il est envisageable de sous dimensionner un onduleur par rapport aux panneaux en acceptant d’écrêter les pics de puissance. Le raisonnement est économique. Les conditions météo idéales de pleine production solaire (beaucoup de soleil et peu de chaleur) ne sont pas si fréquentes sur une année. Perdre le peu de production correspondante n’implique pas une perte financière conséquente. Charge à l’installateur de trouver le bon compromis entre un onduleur moins puissant, donc moins cher qui va générer de l’écrêtement ou un modèle plus puissant donc plus cher, sans écrêtement. La qualité de son expertise a un impact direct sur la rentabilité de votre projet.

Lorsque deux champs solaires sont orientés différemment (Nord/Sud ou Est/Ouest), le soleil « n’éclaire » pas les deux champs au même moment. Pour la même puissance d’onduleur, on peut donc mettre plus de panneaux. Le ratio passe à 140% :

100 kVA d’onduleur à 140 kWc de panneaux

A puissance équivalente, une centrale solaire orientée Nord/Sud ou Est/Ouest coûte donc moins cher en onduleur. Ou, autrement dit, les kWh produits au Nord, à l’Est ou à l’Ouest coûtent moins chers que ceux au Sud.

Le second point est lié au réseau électrique. Ecrêter les pics de production permet de réduire le coût du raccordement (pas besoin de changer la puissance du transformateur présent). Sur la base de ce raisonnement, certains installateurs vont jusqu’à proposer des centrales de 440 kWc associées à une puissance d’onduleur de seulement 250 kVA !

Dernier atout, l’équilibre de poids sur la charpente. Répartir les panneaux sur deux faces peut limiter le coût d’un éventuellement renforcement de structure.

Une étude au cas par cas s’impose.

A RETENIR

  • Le plafonnement de la production a peu d’impact sur la rentabilité des centrales solaires de notre région.
  • Il pourrait même être considéré comme un avantage dans certains cas de figure. En cas de panne par exemple, le plafonnement limite la perte financière. Vous perdriez des kWh à 4 centimes au lieu de 13.
  • Ce n’est pas un critère de influant sur la décision d’équiper ou non le pan Nord de votre toiture.
  • La rentabilité d’une centrale solaire ne se raisonne pas uniquement en allant chercher la pleine production.
  • Chacun place le curseur de la rentabilité au niveau où il le souhaite

 

Faites la différence entre kWc et kVA

  • kWc :   C’est une unité de mesure spécifique aux panneaux solaires. Elle traduit la puissance maximale d’un panneau dans des conditions normalisées de mesure (intensité lumineuse, température, …), une valeur qu’il atteint rarement du fait du décalage entre ces conditions normalisées et les conditions réelle de production (notamment en termes de température). Dans de très rares cas, il peut la dépasser légèrement (tolérance de puissance). Le ratio kWc/m2 permet de comparer la performance des panneaux entre eux.
  • kVA : C’est l’unité de la puissance dite “apparente”. Elle correspond à la puissance mesurée à la sortie de l’onduleur, celle qui peut passer dans votre compteur électrique. Elle peut être, selon la stratégie de votre installateur solaire, bridée par le réglage de l’onduleur.

Sur une centrale solaire, la différence de valeur entre les kWc des panneaux et les kVA sortie onduleur s’explique par l’écart entre les conditions théoriques et réelles en termes d’intensité lumineuse et de chaleur, les pertes dans les câbles, dans l’onduleur, la température des panneaux, l’impact des ombrages, …

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Contact : Sylvain DESEAU : 06 86 40 98 16, sylvain.deseau@loiret.chambagri.fr