Mayenne : la justice va se pencher sur les conditions de mise à mort dans un abattoir

La justice va se pencher sur les conditions de mise à mort des animaux dans l'abattoir municipal de Craon (Mayenne) après la diffusion par l'association L214 d'images « impressionnantes » de l'aveu même du ministère de l'Agriculture, relançant le débat sur le contrôle vidéo obligatoire dans les abattoirs pour améliorer le bien-être animal.

Une plainte déposée par L214 au parquet de Laval fera l'objet « d'une enquête judiciaire qui sera confiée à la gendarmerie », a déclaré jeudi à l'AFP la procureure de la République, Anne-Lyse Jarthon. L214, qui milite à terme pour l'arrêt de l'élevage, avait fait savoir qu'elle déposerait une plainte pour cruauté, sévices graves et mauvais traitements. « Les images tournées en fin d'année dernière montrent des animaux encore conscients après l'étourdissement : des veaux, vaches, boeufs, moutons relèvent la tête et se débattent avant et après l'égorgement », indique l'association dans un communiqué. « Des vaches réagissent aux coups de couteau et à la pince guillotine lors de la découpe de leurs pattes avant, de leurs cornes ou de leur tête. Pourtant, à ce stade de la chaîne d'abattage, les animaux devraient être mort », selon L214.

L'association dénonce des « problèmes structurels » dans cet abattoir, qui abat selon elle chaque année 4.500 animaux, et « l'absence d'intervention des services vétérinaires ». « Les quatre abattoirs d'animaux de boucherie que compte la Mayenne, parmi lesquels le site de Craon, font l'objet d'une inspection permanente par les services vétérinaires de l'État », a répondu la préfecture dans un communiqué. « Les services de l'État ont adressé le 21 avril 2023 à l'exploitant de cet abattoir une mise en demeure sur les conditions d'immobilisation des animaux avant leur étourdissement », mise en demeure levée « le 12 juillet suivant au regard des actions correctives déjà engagées », a fait savoir la préfecture.    

Des images prises avant le nouvel équipement de contention

Fin décembre 2023, « un nouvel équipement de contention plus adapté à toutes les tailles de bovins a notamment été mis en service », poursuit la préfecture, pour qui les installations filmées par L214 « ne sont donc pas celles actuellement en service au sein de l'abattoir de Craon ». « La vidéo montre très manifestement des non-conformités. Par exemple, l'opérateur commence à travailler le cuir de l'animal alors même que celui-ci n'est pas mort mais seulement inconscient », indique à l'AFP le ministère de l'Agriculture, tout en relevant que ces images « impressionnantes » ne « traduisent pas toujours pour autant un état de conscience ou de souffrance de l'animal ».

Le cabinet du ministre Marc Fesneau rappelle que le plan abattoirs lancé en 2021 a « renforcé les contrôles », « créé une brigade d'intervention nationale » et « mis sur la table 115 millions d'euros pour accompagner les abattoirs dans leur modernisation ».
Le ministère a dit souhaiter que soit « débattu en 2024 au sein du comité national d'éthique des abattoirs » le sujet de la généralisation du contrôle vidéo et sa « pertinence pour juguler ce genre de situations ». « L'expérimentation réalisée entre 2019 et 2021 a montré l'intérêt du contrôle vidéo mais aussi ses limites », ajoute-t-il.

La ville de Craon indique de son côté que « de lourds investissements ont été réalisés dans son abattoir » et « réfute » les accusations de L214 contre qui « Bertrand de Guébriant, maire de Craon, se réserve le droit de porter plainte », selon un communiqué.

Des associations de protection des animaux militent depuis des années pour imposer des caméras dans tous les abattoirs de France. Les seules images qui sortent de ces lieux sont tournées clandestinement par l'association L214 qui milite pour l'arrêt de la consommation de viande.
Au sein de l'Union européenne, l'Espagne se targue d'être le premier pays à avoir rendu, mi-2022, obligatoire la vidéosurveillance dans les abattoirs.