Net recul des ventes dans les pièces nobles

La concurrence des viandes UE pénalise l’écoulement des pièces nobles dans la RHF

Bovins de boucherie –  « La hausse des charges, la souveraineté alimentaire, le dérèglement climatique » sont les termes qui sont les plus employés ces derniers temps quand on parle d’élevage. Comme beaucoup de filières artisanales ou industrielles, le secteur agricole est frappé de plein fouet par la flambée des charges. Pour le secteur de l’élevage, cela se transforme en une accélération de la décapitalisation au point de provoquer un déséquilibre rédhibitoire pour la souveraineté alimentaire, mais également pour l’ensemble des acteurs de la filière viande avec une forte contraction des volumes à travailler.

La fonte du cheptel allaitant est plus qu’inquiétante. Après avoir perdu 457 000 vaches allaitantes entre 2016 et 2022 (750 000 en comptant le cheptel laitier), les projections de l’institut de l’élevage prévoient une baisse de 483 000 vaches de race à viande d’ici 2030. Cette raréfaction de l’offre entraîne une progression constante des prix de vente, avec un équilibre budgétaire toujours déficitaire pour les éleveurs face à la hausse des charges. Le renchérissement du prix de la viande vient buter sur le pouvoir d’achat des ménages, qui font des choix vers des produits plus basiques et moins onéreux. La montée en gamme de la production par le label ou le Bio se heurte à ce mouvement avec un très net recul des ventes. Face à la crise, les ventes de viande dans les magasins ont baissé de 15%, mais si la viande hachée subit une baisse mesurée, les pièces nobles sont fortement malmenées. La concurrence des viandes UE dans les filets, entrecôtes, rumsteaks ou autres pièces arrière est importante avec de 6 à 7€ d’écart de valorisation par rapport à la viande française (source Rungis). Ces écarts sont nettement moins prononcés sur les avants. La mise en avant du VBF dans les cantines ou les GMS, atténue cette concurrence, mais dans la RHF ce n’est pas le cas avec une très forte montée en puissance des importations.  

Ces abatteurs se retrouvent avec des stocks importants de sous vide dans les frigos. Ce déséquilibre n’est pas viable dans la situation actuelle, mais les solutions ne se sont pas simples à trouver. 

L’origine de ce déséquilibre vient de la valorisation de la viande dans ces pays ou par ailleurs le lait est beaucoup mieux valorisé. En semaine 39, FranceAgriMer indiquait des vaches O allemandes à 4,13€, irlandaises à 4,23€, espagnoles à 3,89€, polonaises à 4,17€ et des italiennes à 3,64€ alors que les O françaises dépassent le 5,00€.  

Ces déséquilibres sont-ils tenables sur un marché où l’offre va se faire de plus en plus rare ?

La réduction des cheptels a un autre impact important, au niveau de nos exportations. L’Italie engraisse plus de 900 000 bovins français par an et l’Espagne 460 000. Les importateurs sont inquiets du déclin de la production française pour la survie de leur filière. 45% des broutards issus du troupeau allaitants sont valorisés hors de nos frontières.  D’ici 2030, c’est 125 000 animaux/an qui ne seront plus disponibles, voir beaucoup plus au regard de la volonté des industriels de redynamiser la production de JB pour le marché français. L’Espagne se repositionne sur la production de JB laitiers ou croisés légers pour servir ses clients du pourtour méditerranéen.      

La filière viande est à l’aube de très grand changement dont les répercussions sont difficilement appréhendables, tant au niveau des éleveurs, des industriels, des marchés export, de la filière aval et en dernier lieu, le consommateur qui restera le maître du jeu dans le niveau de prix qu’il sera capable d’accepter dans le flux haussier des charges qui pèse sur leur budget.

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