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Nutrition et santé : la viande sur le grill

[SOMMET 2025] Au plan international, une étude recommande de réduire significativement la consommation de viande rouge. En France, le projet de révision de l’arrêt de septembre 2011 régissant la qualité nutritionnelle des repas servis en restauration scolaire suscitent la crispation des filières agricoles et des acteurs de la restauration collective.

Haro sur la viande ? C’est ce que pourrait laisser penser le télescopage de deux publications scientifiques invitant à réduire la consommation de viande. La première est internationale et invite à adopter un « régime santé planétaire », majoritairement végétal, pourrait éviter jusqu’à 15 millions de décès prématurés par an dans le monde et limiter considérablement la pression sur les ressources naturelles. La seconde est française et concerne les exigences nutritionnelles de la restauration scolaire.

Pour l’adoption d’un « régime santé planétaire »

Dans un rapport publié le 3 octobre, la revue médicale de référence The Lancet et l’ONG Eat ont présenté leurs recommandations pour favoriser l’émergence de « systèmes alimentaires sains, durables et équitables » et l’adoption d’un « régime santé planétaire », les systèmes alimentaires actuels étant des facteurs majeurs de la hausse des maladies chroniques et de.la dégradation de l’environnement, transgressant les limites planétaires. La consommation moyenne de viande rouge devrait se limiter à 15 grammes quotidiens près de 100 g actuellement dans les pays occidentaux, au profit des légumineuses, noix, graines et céréales. Les produits laitiers devraient compter pour 250 grammes, les poissons ou fruits de mer pour 30 grammes, de même que les viandes blanches comme la volaille. Les légumes, fruits et céréales complètes devraient être consommés à hauteur respective de 200, 300 et 210 grammes par jour.

Pour une alimentation diversifiée et équilibrée et a préservation des prairies

En 2019, une première étude d’EAT formulait déjà des recommandations similaires, avec une consommation de viande rouge comprise entre 0 et 28 grammes par jour et par personne, soit 5 fois moins que le seuil maximal des recommandations de santé publique en matière de prévention en France et 3 fois moins que la consommation moyenne hebdomadaire actuelle des Français. « Ces niveaux demeurent très éloignés des recommandations officielles des autorités de santé publique, qui fixent la limite de consommation à 500 g de viande rouge cuite par semaine dans le cadre d’une alimentation diversifiée et équilibrée », a réagi Interbev dans un communiqué. L’interprofession des viandes estime que « 72 % des Français consomment déjà moins de viande rouge que le seuil de 500 g recommandé » et qu’un tiers de la population est constituée de très petits consommateurs, exposés « au risque de ne pas couvrir les besoins en nutriments essentiels » tels que les protéines de qualité, le fer biodisponible, le zinc, la vitamine B12, le calcium, l’iode….

Interbev pointe également les méfaits des alternatives végétales, favorisant le développement de produits transformés et ultra-transformés, « dont les effets sur la santé sont de plus en plus discutés » ou encore les recommandations misant sur une consommation trop importante voire excessive de légumineuses et de fruits à coque, pouvant engendrer « divers troubles pour certaines populations, tels qu’allergies, intolérances digestives… »

"Concilier santé et environnement ne doit pas passer par la stigmatisation de la viande rouge"

« L’élevage français de ruminants entretient 13 millions d’hectares de prairies permanentes, un atout majeur pour le stockage de carbone et la préservation de la biodiversité, rappelle Interbev. Ce modèle herbager unique au monde joue aussi un rôle économique et social majeur dans les territoires ruraux. Il est garant de notre souveraineté alimentaire et de la transition écologique. Concilier santé et environnement ne doit pas passer par la stigmatisation de la viande rouge ».

Vers de nouvelles recommandations pour la restauration scolaire

En France, c’est une autre publication qui indispose les filières, ou plus exactement la publication à venir d’un avis de l’Anses relatif aux recommandations nutritionnelles en restauration scolaire. Ce secteur est actuellement régi par un arrêté datant de 2011 et sa révision suscite des crispations de la part des interprofessions (viande, lait, oléoprotéagineux, fruits et légumes), des organisations représentatives de la restauration collective (Agores, Restau’Co, CNRC) et d’une fédération de nutritionnistes (AFDN).

Dans une lettre ouverte adressée le 2 octobre à Sébastien Lecornu, alors Premier ministre, les signataires évoquent un avis « discutable sur le fond » et remettant en question les « nombreux mois de travail des membres du groupe de travail Nutrition du Conseil national de la restauration collective (CNRC) sur la proposition de révision de l’arrêté, revenant à « nier le principe même de co-construction collective qui était jusqu’alors mis en avant comme la force du CNRC ». L’avis de l’Anses réviserait à la baisse les recommandations entourant la viande, mais aussi les produits laitiers. Les signataires estiment que l’avis « ne paraît pas tenir compte de la couverture des besoins nutritionnels des enfants (…). Il va de soi que sa publication comme son annexion au projet de révision de l’arrêté n’est pas concevable », concluent-ils.

Une réunion du groupe de travail Nutrition du Conseil national de la restauration collective est prévue ce mardi, qui est aussi la journée inaugurale du Sommet de l’élevage à Cournon (Puy-de-Dôme).