« Polluants éternels » : pesticides et boues sous surveillance

Les pesticides et les boues de stations sont potentiellement émetteurs de PFAS, des substances persistantes, mobiles et bioaccumulables, qualifiées de « polluants éternels », aux nombreuses inconnues. Une règlementation européenne est attendue pour 2026.

PFOS, PFOA, PFHxA, PFHxS, PFHpA, PFPeA, 6:2 FTS... : ce sont quelques-unes de molécules appartenant à la famille des PFAS, ou substances poly ou perfluoroalkylées. Cette famille chimique en recèle en réalité environ 5000, dont 600 font l’objet de multiples usages : imperméabilisants pour les cuirs et textiles, papiers et emballages traités, enduits pour textiles et peintures, autres produits tels que les détergents, biocides (appâts pour fourmis et blattes), industrie photographique, photolithographie, semi-conducteurs, fluides hydrauliques, traitements de surface des métaux, pièces exposées à haute température (durites, etc.) ...

Les PFAS sont caractérisés par une chaîne carbonée dont au moins un carbone est complètement substitué par des atomes de fluor. Leur stabilité chimique en fait des substances non dégradées dans l’environnement, persistantes, mobiles et bioaccumulables, qualifiées de « polluants éternels ».

Interrogations sur leur présence dans les pesticides...

Dans un rapport publié en avril, l’Inspection générale de l’environnement et du développement durable (IGEDD – ministère de la Transition écologique) pose les bases d’une feuille de route listant toute une série d’actions destinées à mieux maîtriser les contaminations par les PFAS. Car si leur toxicité est encore méconnue, des effets nocifs et toxiques sur le métabolisme humain ont été observés pour plusieurs PFAS. Leur caractère cancérigène est suspecté. La principale voie de contamination humaine et animale est la consommation d’eau, puis d’aliments, ainsi que l’inhalation d’air et de poussières.

Dans le secteur agricole, les PFAS pourraient faire parler d’eux dans deux domaines que sont les épandages de boues d’une part et les pesticides d’autre part. Sur ce point, le rapport de l’IGEDD note que « le sujet des pesticides potentiellement concernés est très mal documenté, ce qui justifierait la mise en place d’une enquête auprès des fabricants pour déterminer les pesticides concernés, les quantités vendues en France, sur quelles cultures et dans quelles régions ». Le rapport préconise l’obligation de préciser la nature et les quantités de PFAS contenus dans les produits mis sur le marché et leurs volumes vendus en France, et de fournir tout élément technique permettant d’en déterminer les concentrations dans l’environnement, pour différentes matrices (eau, air, sol).

... et dans les boues issues de stations d’épuration

Cependant, les terres agricoles recevant des pesticides sont considérées comme des sites dits « secondaires » potentiellement émetteurs de PFAS, à l’inverses des usines de fabrication de PFAS, des zones d'entraînement aux incendies ou encore des aéroports militaires, considérés comme sources « primaires ». Les épandages de boues, composts et digestats issus de stations de traitement des eaux usées (STEU) sont également considérés comme de potentiels sites émetteurs « secondaires ».

Selon le rapport de l’IGEED, « il ne semble ni envisageable ni utile à court et moyen terme d’établir la cartographie des émissions diffuses. Des éléments de cartographie, de nature qualitative, pourraient cependant indiquer les secteurs d’épandage historiques ou actuels de boues issus de STEU rejetant du PFOS et les zones d‘épandage historiques et actuelles de pesticides contenant des PFAS ». Outre ses origines diffuses, les sources d’émission identifiées en France comptent quelques points de rejets industriels, d’ancien sites d’incendies à hydrocarbure où la lutte contre le feu a nécessité l’utilisation de mousses contenant des PFAS.