Produits labellisés : ni ratio dans la loi Climat, ni ration à la cantine ?

Les défenseurs des Signes d’identification de qualité et d’origine (SIQO) souhaitaient voire inscrire un ratio de produits labellisés dans l’article 60 de la future loi Climat. Le ministre de l’Agriculture leur a signifié une fin de non-recevoir.

Adoptée en 2018, la loi Egalim assigne à la restauration collective publique l’obligation de s’approvisionner, d’ici au 1er janvier 2022, à 50% en produits de qualité et durables, dont 20% en produits bio ou issus d’exploitations en conversion. Le problème, dénoncé depuis quelques mois par plusieurs organisations comme le Synalaf (*) et FedeLIS (**), réside dans le fait que  la liste des « produits de qualité et durables » est très large et permet finalement à la production standard d’y rentrer. « C’est notamment possible par le biais de la certification environnementale de niveau 2 dont les critères ne sont pas adaptés à ce jour aux productions animales, et qui permet, sans exigence réelle, à la production standard de volailles et de veaux de rentrer dans les 50% », explique Benoit Drouin, éleveur bio, qui produit du lait et des volailles à Rouez (Sarthe), adhérant à ces deux organisations.

Les SIQO recouvrent les produits sous cahiers des charges Agriculture biologique (AB), AOC, AOP, IGP, Label Rouge et STG (Spécialité traditionnelle garantie).

En 2020, le Label rouge a fêté ses 60 ans (Crédit photo : Place Cliché)
En 2020, le Label rouge a fêté ses 60 ans (Crédit photo : Place Cliché)

Pas de ratio pour les SIQO

La loi Climat et résilience, dont l’examen par l’Assemblée nationale s’est achevé le 17 avril et dont le vote solennel est programmé pour le 4 mai, reprend la disposition à son compte, dans l’article 60. « Ce dernier aurait pu clarifier le sujet et rehausser le niveau de qualité des produits en ajoutant un pourcentage spécifique pour les SIQO, comme c’est déjà le cas pour la production bio, crédités d'un ratio de 20%, poursuit l'éleveur. Mais le ministre de l’Agriculture s’y est opposé alors que la proposition était soutenue par 157 députés de tous bords. Que va faire l’économe d’une cantine scolaire, contraint par des impératifs économiques ? Il prendra peut-être occasionnellement un produit labellisé mais cela ne deviendra jamais un réflexe d’achat. Il ne cherchera même pas à essayer ces produits pour découvrir leurs nombreux intérêts. Or, quand on vote une loi, c’est bel et bien pour changer l’ordre des choses, non ? »

« Le ministère renie ses propres labels »

Les défenseurs des SIQO se sont vus répondre que leurs produits étaient bel et bien considérés dans les 50% de produits de qualité et durables.

"Si certains pensent que l’on va monter en gamme sans mettre un euro de plus, c’est faux"

« Avec nos produits sous signe de qualité, on ne pourra jamais rivaliser avec des produits standards, y compris d’origine française, s’insurge Benoit Drouin. Je préfèrerais que l’on nous dise ouvertement que nos produits sont trop chers plutôt que de nous laisser croire, hypocritement, que l’on est pris en compte dans la loi. Si certains pensent que l’on va monter en gamme sans mettre un euro de plus, c’est faux. Avec cette opération, le ministère de l’Agriculture renie ses propres labels, dont les plus anciens remontent à 1965, avant de faire école en Europe. Et pourtant ces produits SIQO répondent à toutes les attentes sociétales, y compris en termes de production locale et durable ».

La certification environnementale hors sujet

Les produits issus d’exploitations ayant acquis la certification environnementale de niveau 2 rentrent de fait dans le champ de l’article 60, au moins jusqu’au 31 décembre 2027. Benoit Drouin jure que son combat n’est en rien dirigé contre la certification environnementale. « Avec les SIQO, on est sur des certifications produits avec de très fortes exigences concernant le mode d’élevage, on ne joue pas dans la même cour, déclare-t-il. La certification environnementale doit absolument intégrer des critères ciblés et exigeants pour les productions animales, sinon elle ne sera pas crédible ».

L’éleveur décerne tout de même un bon point à l’article 60, qui impose un minimum de 60% de viandes de qualité et durables (contre 40% de produits végétaux) entrant dans les fameux 50% de produits de qualité et durables. Avec le Synalaf et FedeLIS, l’éleveur ne compte pas lâcher le morceau.

(*) Synalaf : Syndicat national des labels avicoles de France

(**) FedeLIS : Fédération Label Rouge, IG et STG

L’étiquetage en vue

Le ministre de l’Agriculture a annoncé que l’étiquetage de l’origine de la viande servie en restauration hors domicile (RHD) entrerait en vigueur d’ici à l’été prochain. Cette obligation, qui ne concernait jusqu’à présent que le viande de bœuf, va s’appliquer à toutes les viandes, conformément à la loi relative à la transparence de l’information sur les produits agricoles et alimentaires votée en juin 2020 et dont le décret d’application se fait attendre. La RHD comprend la restauration commerciale (environ 15% des repas servis) et la restauration collective (85% des repas servis). Cette dernière représente près de 4 milliards de repas servis dans les secteurs de l’enseignement, de la santé et du social et du travail.