Tourisme à la ferme (1/4) : La vogue des séjours fermiers

Comme en 2020, les Français vont privilégier cet été des destinations moins urbaines, moins lointaines qu'avant, mais plus vertes. La demande pour des séjours à la campagne, et particulièrement à la ferme, est en hausse.

Selon un sondage BVA-Crédit Agricole-#Agridemain, réalisé en mai dernier, 71 % des Français ont une très bonne opinion de l’agriculture. La crise sanitaire, les confinements répétés, les pénuries ponctuelles sur des aliments de base, ont probablement contribué à leur rappeler le rôle essentiel et vital des agriculteurs.

Toujours selon ce même sondage, neuf Français sur dix aimeraient pouvoir échanger avec des agriculteurs. L'été qui arrive devrait leur en donner l'occasion, pourquoi pas lors de leurs séjours de vacances. D'autant plus que les vacances « au vert » sont particulièrement prisées en cet été 2021: selon l'Ademe, qui pilote un fonds de relance consacré au tourisme durable, 63% des Français envisagent pour cet été « des vacances en dehors des zones urbaines ».

Gîtes de France : l'acteur historique

En matière de tourisme à la ferme, les pionniers sont sans aucun doute les Gîtes de France. L'institution a d'ailleurs été créée, après la guerre, spécifiquement pour permettre aux agriculteurs d'avoir un revenu complémentaire issu de la location touristique. Connu et reconnu, ce label a eu, et continue d'avoir, un effet positif sur la création d'hébergements ruraux, en particulier sur les exploitations agricoles. Il garantit la qualité des hébergements, mais aussi celle de l'accueil des vacanciers, avec « des hôtes heureux de faire découvrir leur région, mais aussi leur travail quotidien », explique la chargée de communication de Gîtes de France.

Aujourd'hui, sur les 56 000 hébergements disponibles à la location, seuls 3000 sont enregistrés dans la catégorie « Vacances à la ferme ». Mais selon l'organisme, la crise sanitaire récente a considérablement augmenté les demandes sur ce type de séjour : « Les vacanciers recherchent de la nature, du local ».

Bienvenue à la ferme : diversifier les activités

Autre acteur de longue date en matière d'hébergement à la ferme et lui aussi label de qualité : Bienvenue à la ferme. Créée il y a 33 ans, la marque appartenant à l'Assemblée permanente des chambres d'agriculture (APCA) compte plus de 8000 adhérents et propose un vaste panel de prestations agritouristiques.

Aujourd'hui, ces prestations penchent un peu plus du côté des circuits courts avec 5000 points de vente de produits fermiers (magasins à la ferme, marchés, drive fermiers et même un réseau de commerces sous enseigne Bienvenue à la ferme). On compte néanmoins 1276 exploitations proposant des hébergements : chambres d'hôtes, campings, hébergements insolites.

Les hôtes font en sorte d'intégrer totalement les clients dans leur univers. D'ailleurs, la plupart du temps, les hébergeurs font aussi de la vente de produits fermiers ou des animations. « En proposant des séjours, ils boostent leurs ventes directes en faisant venir et rester des hôtes sur leur ferme », précise la chargée de communication de Bienvenue à la Ferme.

La recherche de contacts, le goût pour les nouveaux projets font également partie des motivations pour intégrer le réseau : « Chaque adhérent est accompagné par des équipes professionnelles des chambres d’agriculture, spécialisées en circuit court et agritourisme, et bénéficie de conseils, de formations et d’outils du réseau. Le producteur est également animé par cette volonté de développer des projets qui lui tiennent à cœur et qui ont du sens pour les consommateurs », décrit Jean-Marie Lenfant, le président délégué de Bienvenue à la ferme.

Des start-up sur ce créneau

A côté de ces anciens opérateurs qui ont su réaliser leur transition vers internet et le numérique, d'autres acteurs se sont lancés directement sur la toile. C'est le cas de la plate-forme Agrivillage, créée en 2019, et entièrement dédiée aux séjours à la ferme : elle propose aujourd'hui plus de 500 offres.

Son fondateur, Adrien Gabillet, est fils d'agriculteurs bretons et c'est après une expérience personnelle qu'il a eu l'idée de sa start-up : « J’ai accueilli des amis citadins dans la ferme familiale pour une fête. Voir tous ces gens si curieux de comprendre le cycle de production d’un troupeau de vaches laitières, ou la conduite d’un engin agricole, m’a ouvert les yeux ». Adrien Gabillet souhaite « recréer du lien entre la société et le monde agricole » et c'est pourquoi, durant chaque séjour, un rendez-vous est pris entre l'agriculteur et son hôte pour partager une activité durant une heure et demie.

Dernière innovation de l'entrepreneur : vendre ou louer des « tiny houses » à des exploitants qui n'auraient pas la possibilité de créer des hébergements sur leur ferme. Ces petits logements « clés en main » sont pile dans la tendance du tourisme durable et responsable.

Exemple d'hébergement agritouristique insolite : des chambres en forme de tonneau sur une exploitation viticole. (Crédit photo : Catherine Perrot)

« Être acteur, pas seulement spectateur »

Sur le même créneau, mais offrant des expériences d'immersion encore plus intenses, on trouve la jeune entreprise Oh la vache !. Fondée par Clara Béniac, elle aussi issue de famille agricole, Oh la vache ! propose des séjours dans lesquels le visiteur participe à la vie de l'exploitation. « C'est intéressant d'être acteur, pas seulement spectateur », commente ainsi Solène à propos de son séjour en mai dernier dans une exploitation caprine savoyarde : elle a participé à la traite et fabriqué des savons et des fromages de chèvre.

Démarrée doucement, l'activité de Oh la vache ! s'est accrue en 2020, lors du premier été Covid et continue de progresser cette année. « Nos séjours avec animaux sont ceux qui ont le plus de succès, autant que ceux avec fabrication de fromages », confie Clara Béniac.

Particulièrement prisés sur la plate-forme Oh la vache ! : les séjours avec animaux. (Crédit photo : Oh la vache ! Séjours à la ferme)

Airbnb, incontournable même à la campagne

Enfin, en matière de start-up sur le secteur du tourisme, s'il en est une qui a bien réussi, c'est Airbnb ! Elle aussi constate une véritable « ruée vers le vert » de la part de ses clients, suite à la crise sanitaire : la part de séjours ruraux réservés sur la plate-forme a pratiquement doublé entre l'été 2019 (24%) et l'été 2021 (45% des réservations prévues). Pour l'été 2021, la première destination réservée sur Airbnb n'est plus Paris, mais le département du Var !

D'ailleurs, avant même la crise sanitaire, l'entreprise fondée en Californie avait déjà commencé à s’investir sur les séjours ruraux et la mise en valeur des territoires français. Pour la quatrième année consécutive, avec Bienvenue à la ferme et MiiMOSA, elle lance un appel à projets commun nommé « Tous à la Ferme ». Les agriculteurs ont jusqu'au 1er octobre 2021 pour publier leur projet touristique et lancer leur collecte de financement participatif. Airbnb et Bienvenue à la ferme choisiront 10 projets qui pourront bénéficier d'une dotation comprise entre 1 000€ et 4 000€. Au cours des trois dernières saisons, près de 500 agriculteurs ont pu proposer leur projet d'agritourisme. Et 150 ont lancé leur collecte.

Plus récemment, la plate-forme a créé « Campagne d'avenir », une nouvelle initiative en partenariat avec l'Association des maires ruraux de France pour soutenir l'accélération du tourisme rural. Enfin, depuis peu, elle propose à ses hôtes ruraux un programme de formation dédié : le Rural Boot Camp. Preuve supplémentaire que le tourisme rural et l'agritourisme ont un potentiel économique considérable.