Nutrition animale : en 2018, la France a importé environ 2,8 millions de tonnes de tourteaux de soja

Gérer les contradictions d’une demande qui s’affine sans cesse

En 2018, la France a importé environ 2,8 millions de tonnes de tourteaux de soja, principalement en provenance du Brésil. Cela représente une augmentation de l'ordre de 60 % depuis 2011 et ces volumes couvrent plus de 45 % des besoins de l'alimentation animale en tourteaux de soja en France. Cette dépendance est d'ailleurs plus forte encore au niveau européen, avec 70 % des besoins en tourteaux de soja satisfaits par les importations. On peut aussi souligner que d'une manière générale la France importe entre 20 % et 25 % des matières premières utilisées en alimentation animale, dont un tiers d'autres pays de l'Union européenne, et les deux tiers en provenance de pays tiers. Là encore, parmi ces produits, les tourteaux de soja, légumineuse peu produite chez nous (400 000 tonnes environ) car peu adaptée au climat et aux sols français, se taillent la part du lion.

C'est cette dépendance que l'on voudrait battre en brèche aujourd'hui avec ce qu'on appelle le « plan protéine ». En effet, dans ce contexte, l'urgence de construire une filière protéagineuse compétitive en France même se fait plus sentir chaque jour : la construction des plans de filières, consécutive aux États généraux de l'Alimentation en 2018, lui fait une large place de la part des acteurs de la filière, conduits par la FOP (2). Il s'agit de réduire la dépendance nationale au soja à un tiers des besoins, soit 35 %, ou 10 points de moins, dans un délai de 5 ans maximum.

À l'origine de ce plan, il n'y a pas seulement le souci de retrouver de l'indépendance alimentaire. La France n'est d'ailleurs pas le pays européen le plus mal loti, tant du fait des surfaces dont elle dispose en général que de la quantité d'herbages et de la capacité en définitive assez grande qui a été préservée par nombre d'exploitations de produire leur aliment « à la ferme ».  C'est aussi parce qu'il est évidemment plus facile de tracer les produits d'origine quand ils sont produits sur place que lorsqu'ils viennent de loin. En particulier, l'obligation de s'appuyer sur des variétés végétales non génétiquement modifiées oblige, soit à passer des contrats spécifiques avec des opérateurs du pays exportateur - le Brésil s'est déjà mis en ordre de marche pour y répondre -, pays qui doit s'engager contractuellement, et accepter des inspections régulières, soit à ne s'approvisionner que sur une production domestique. Mais en ce qui concerne le soja, par exemple, celle-ci fait évidemment défaut.

Comment faire ? La solution passe sans aucun doute par les coproduits. Les coproduits sont les produits issus de la transformation agroalimentaire. Ils sont très divers : tourteaux de colza, tournesol, soja, pulpes de betteraves ou de raisin, sons issus de la meunerie et de l'amidonnerie, mais aussi : lactosérum, graisses et protéines animales transformées - PAT, à ne pas confondre avec les farines animales.

Or, l'efficacité croissante des technologies a permis un accroissement significatif des volumes de coproduits : selon le SNIA, syndicat national de l'alimentation animale, en 2016, 8,7 millions de tonnes équivalentes-matière sèche entrent dans les fabrications d'aliments, sur plus de 10 milliers de tonnes disponibles. Cela représente une augmentation de 70 % des volumes en moins de 10 ans

 (cf. graphique n°2 ci-après).

Ce cheminement n'est pourtant pas simple, ne serait-ce que parce que le volume de matière sèche ne préjuge pas de la

qualité du coproduit, notamment en termes de digestibilité pour l'animal. C'est en particulier la force du tourteau de soja qui offre un rapport particulièrement favorable, meilleur que le colza, le tournesol et a fortiori le maïs, entre sa teneur en protéines brutes et la proportion de cellulose issue des parois, moins bien valorisée notamment en porc et en volaille.

Article extrait de l'Analyse de la conjoncture et de l'actualité agricole et agroalimentaire - PRISME n° 28 - Janv.2020