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Apad : « On ne vendra pas la tonne de carbone en dessous de 60 euros »
L’Apad s’apprête à notifier son premier projet de Labellisation bas carbone (LBC), au nom de ses adhérents engagés dans la démarche Au cœur des sols (ACS). L’heure de la reconnaissance est venue pour les pionniers de l’agriculture bas-carbone.
Le compte à rebours est enclenché. L’Association pour la promotion d’une agriculture durable (Apad) s'apprête à notifier au ministère de la Transition écologique son premier projet de Label bas carbone (LBC).
La formalité administrative aura pour effet de déclencher le compteur à crédits carbone, générés par sa séquestration dans le sol et par la réduction des émissions de gaz à effet de serre, sur un pas de temps de cinq ans, conformément aux principes des méthodes LBC. Un diagnostic initial, un diagnostic final, et le tour est joué et les crédits carbone empochés. Simple. Enfin presque. « C’est l’aboutissement de deux ans de travail auprès de nos adhérents, confie Sophie Gardette, directrice de l’Apad. Mais ce n’est qu’un point d’étape car sitôt la notification, nous entamerons la phase de diagnostic en exploitations, qui va nous mobiliser toute l’année ». Au plus tard début 2023, l’Apad déposera son dossier au ministère de la Transition écologique, lequel aura deux mois pour avaliser officiellement le projet.
Entre janvier 2022 et janvier 2023, les agriculteurs engagés dans la démarche auront déjà capitalisé environ 1 teqCO2/ha (tonne équivalent), ce qui correspond à une estimation moyenne de l’Apad en système ACS.
A quel prix ? « On ne vendra pas la tonne de carbone en dessous de 60 €/t, répond Sophie Gardette. Nous avons la prétention de penser que nos crédits carbone sont très qualitatifs, avec des co-bénéfices en terme de lutte contre l’érosion, de restauration de la biodiversité, de fertilité du sol ».
A quel coût ? « Nous n’avons pas raisonné en terme de coût de la transition mais de valeur du service environnemental rendu. Nos adhérents ne cherchent pas à combler un manque à gagner car ils sont convaincus du bien-fondé de leurs pratiques pour leurs sols et pour leur environnement, en s’inscrivant dans un processus d’amélioration continue ».
Avec quel bénéfice financier ? « 60 euros la tonne, c’est vraiment un minimum pour que la valeur des services rendus par l’ACS soit reconnue. Nous réviserons d’ailleurs ce prix annuellement, et l’indexerons sur l’évolution du marché ».
Lancement officiel au Salon de l’agriculture
A titre indicatif, l’association France Carbon Agri, la première à avoir décroché le LBC en agriculture, rétribue ses 300 éleveurs au prix net de 30 €/t. L’Apad a décidé de contracter en direct avec des acheteurs, sans recourir, au moins au départ, à des opérateurs spécialisés dans la compensation carbone. « Depuis le lancement de notre projet, de nombreuses entreprises nous ont manifesté leur intérêt, indique Sophie Gardette. Mais elles attendaient la matérialité du projet pour s’engager ».
Le Salon de l’agriculture, où l’Apad est présente depuis plusieurs années, constituera la véritable rampe de lancement du projet, avec en point d’orgue une conférence programmée le lundi 28 février.
Des crédits « premium »
L’Apad escompte bien convaincre les acheteurs de la qualité « premium » des crédits carbone générés par ses adhérents. Les opérateurs spécialisés dans la compensation carbone, qui les courtisent depuis un certain temps, ne s’y trompent pas. Et pour cause. Avec leurs trois piliers – couverture maximale des sols, travail minimal et rotation longues – les agriculteurs en conservation des sols pratiquaient la décarbonation avant même que le terme n’apparaisse dans le paysage. Et s’ils s’inscrivaient dans cette agriculture bas-carbone qui ne disait pas encore son nom, c’était précisément pour capitaliser les externalités positives inhérentes à ce système : prévention du tassement des sols, rétention de l’eau et des nutriments, lutte contre l’érosion, préservation de la biodiversité etc. C’est ces co-bénéfices que l’Apad compte bien valoriser aujourd’hui à travers ses crédits « premium ». L’heure d’une autre forme de reconnaissance est venue pour les pionniers de l’agriculture bas-carbone.