Céréales, est-ce la fin de la période baissière ?

Depuis mai 2022, le cours des céréales ne cesse de chuter. Mais un regain de fermeté est observé cette semaine. Caroline Bournand, consultante chez Argus Média France livre son analyse.

Depuis mai 2022, le cours des céréales ne cesse de chuter avec un plus bas, jamais vu depuis 2020. La semaine dernière, les cours du blé sont descendus à 190 € la tonne. 

Quels sont les éléments de lourdeur qui expliquent cette baisse ? 

Un contexte de prédominance des céréales en mer Noire (Russie et Ukraine). 

Russie, une superproduction depuis 2 ans

Depuis deux ans, la Russie produit un peu plus de 90 millions de tonnes de céréales. Le potentiel pour l'année prochaine est également très élevé pour la troisième année consécutive. Cette superproduction gonfle les chiffres du potentiel d'exportation du pays. Cette année, ils étaient de 51 millions de tonnes. 

À ce jour, la Russie a encore plus de 15 millions de tonnes à exporter jusqu'à la fin de la campagne. Cet élément de lourdeur restera prédominant. Il se reflète dès aujourd'hui sur les prix puisqu'un écart de prix FOB (Free On Board, c'est-à-dire des marchandises exportées sans les frais de transport) de + 10 $ est constaté entre un blé russe et un blé français, entrainant une mise en concurrence des prix à l'exportation des blés français et européens. 

Quid de l'Ukraine ? 

Dès le mois de décembre, le pays a augmenté de manière drastique ses exportations par voie maritime. Aujourd'hui, le rythme est équivalent à celui d'avant-guerre. Au mois de février, l'Ukraine a réussi à exporter 5 millions de tonnes de grains (blé + maïs). Un total - en matières premières agricoles - de plus 7 millions de tonnes sur le mois de février. Le pays concurrence les céréales européennes. Si à l'échelle mondiale - chez les grands exportateurs - les stocks ne sont pas au beau fixe cette année, la majorité est située en mer Noire et pénalise les cours européens et les exportations des blés français. 

Est-ce la fin de la période baissière ? 

Les cours sur Euronex ont touché un plus bas la semaine dernière. Mais, depuis une semaine, une tentative de rebond est observée avec un regain de fermeté et de soutien. 

De meilleures exportations 

Depuis le début de la campagne 2023-2024, un retard est constaté sur la campagne d'exportation en France jusqu'au mois de décembre. La France a réussi à trouver de nouvelles débouchées début janvier avec la Chine et le Maroc. Le pays a pu exporter un total de 1,6 million de tonnes et a continué sur un bon rythme début février avec 1,4 million de tonnes exporté, ce qui soutient les cours sur Euronex. 

Le Weather Market 

Les conditions printanières sont sous haute surveillance cette année, en raison des mauvaises conditions de semis. Les pays les plus touchés sont la France, l'Allemagne et l'Angleterre. En France, les emblavements ont baissé de plus de 11 %. La qualité n'est pas probante : seulement 68 % des blés sont notés bons à excellents. Autre inquiétude, un retard de semis des orges de printemps. 28 % des semis sont plantés contre 96 % l'année dernière. Il est encore trop tôt pour tirer une conclusion sur ce retard et le rendement final mais les craintes grandissent chez les producteurs. Cela participe au soutien des cours et sur la prime brassicole. 

Globalement, les éléments de soutien depuis une semaine commencent à arriver. Ils ne sont à ce jour, pas encore suffisants pour inverser la tendance mais ils limitent ce mouvement de baisse observé depuis plusieurs mois. 

Quels conseils pour les agriculteurs ? 

Profitez d'un éventuel rebond des cours sur la base des éléments de soutien pour avancer les ventes R23, voire les finir et éventuellement commencer progressivement les ventes de la récolte R24. 

Toutes les deux semaines, retrouvez notre analyse des marchés par les experts d'Argus Media France 

 

©Louise Delaroa