Colza : des grains dans le sac ou dans le sec

Pour la deuxième fois en trois ans, les semis de colza sont confrontés à une période de sécheresse, ponctuée de pluies très hétérogènes sur le territoire. Pour ceux qui ont pu en profiter, les colzas ont généralement bien levés. C’est plus compliqué pour les parcelles qui sont passées entre les gouttes.

Semer ou ne pas semer ? Alors que la date buttoir pour implanter du colza approche dans plusieurs régions, nombre de producteurs attendent désespérément les quelques millimètres de pluie qui leur permettraient de semer. En cette période d’orages de fin d’été localisés, la situation est très hétérogène, y compris au sein d’une même région de production. « À 30 km de chez moi, ils ont eu 15 mm vers le 15 août. Leurs colzas ont bien levé. Ici, nous avons regardé les précipitations avancer sur la carte, mais elles ne sont jamais arrivées jusqu’à notre secteur », témoigne Aurélien Legoux, jeune agriculteur installé depuis trois ans du côté de Verdun dans la Meuse. Cette répartition aléatoire des pluies rend très difficile d’établir aujourd’hui la sole de colza qui sera finalement implantée. « Les prévisions étaient plutôt bonnes. Les intentions de semis s’élevaient à 1,25 millions d’hectares, soit plus que sur la dernière campagne. Mais actuellement nous avons très peu de visibilité sur le chiffrage. Nous n’en saurons pas plus sur les surfaces réellement semées tant que les sacs de semences ne reviendront pas chez les fournisseurs », rapporte Afsaneh Lellahi, directrice de l’action régionale et du transfert chez Terres Inovia.

Dans le sac, semé ou levé

La semaine du 15 août, avec ses précipitations annoncées, semblait être la fenêtre idéale pour implanter le colza. Dans de nombreux secteurs, les producteurs ont semé juste avant la pluie, qui n’est parfois jamais arrivée. « Nous avons semé le 15 août, mais en guise de pluie nous n’avons eu que deux fois 2 mm. Le grain est toujours en terre », constate Aurélien Legoux. Dans son secteur, la date limite est presque atteinte. « S’il ne pleut pas dans les tous prochains jours, il sera trop tard pour le colza », ne peut-il que constater. Si ce n’est pas le cas, le jeune agriculteur pense mettre une céréale sur les parcelles dédiées au colza pour valoriser l’engrais localisé qui a été apporté au semis. Pour Afsaneh Lellahi, la partie n’est pas encore perdue dans de nombreuses régions. « En prenant un gradient Est-Ouest, les implantations de colza sont jouables jusqu’au 10 septembre. Avec un automne favorable comme l’an dernier, il est possible de réussir du colza même avec des semis de dernière limite », souligne-t-elle. Pour ce type de situation tardive, elle met en garde sur l’importance de réaliser l’implantation dans les meilleures conditions possibles. « Il ne faut pas réfléchir à deux fois sur le désherbage et bien raisonner l’alimentation azotée », conseille-t-elle.

Préparer les sols en amont

Dans le Gers, Eric Dugers a choisi d’attendre pour implanter sa culture. « J’ai profité des orages du 16 août pour préparer le sol, mais je n’ai pas osé semer. Le colza aurait germé puis il aurait explosé en plein vol. Sur nos coteaux argilo-calcaire, les températures sont montées à 35/37°C cette semaine », relève-t-il. Le gersois n’est pas encore inquiet pour ses semis. « Je suis dans une zone relativement douce où l’implantation est possible jusqu’au 20 septembre. Ce n’est pas la période idéale, mais je n’ai pas vraiment le choix avec la nouvelle Pac qui m’impose des oléagineux et protéagineux dans la rotation », constate-t-il.

Comme lui, de plus en plus de producteurs prennent le parti de préparer les sols en amont. « Pour de nombreux producteurs, ce n’est pas la première année de sécheresse. De ce fait, l’habitude de préparer les sols en amont du semis, voir juste après la récolte est en train de s’ancrer dans les pratiques culturales », constate Afsaneh Lellahi. Une parcelle déjà préparée offre l’avantage de pouvoir semer avec un peu moins d’eau que s’il fallait également travailler le sol.