Conservation des vins rosés en bouteilles

Afin de limiter au maximum l’évolution du vin rosé au cours du temps, il est important de déterminer quels facteurs ont le plus d’influence sur sa conservation et dans quelle mesure il est possible de les maîtriser.

Entre son conditionnement et l’arrivée sur la table du consommateur, une bouteille de rosé est soumise à plusieurs facteurs qui peuvent modifier ses caractéristiques, que ce soit sa couleur, son expression aromatique ou son équilibre en bouche. C’est d’autant plus vrai que le délai de stockage ou d’expédition est long, ou que les conditions de conservation ne sont pas optimales. Trois facteurs principaux ont un impact sur l’évolution des caractères d’un vin rosé pendant sa conservation :

  • l’oxygène dissous dans le vin au conditionnement, présent dans l’espace de tête, puis apporté pendant le stockage à travers l’obturateur ;
  • le niveau de SO2 libre présent dans le vin au moment du conditionnement ;
  • la température durant le stockage et lors des transports.


1. Oxygène, sulfites et température, un trio indissociable pour garantir une bonne conservation du rosé en bouteilles.

Des essais, menés d’une part au Centre du Rosé sur des rosés de Provence prélevés au sein de caves partenaires du Var, et d’autre part à la cave expérimentale d’Inter Rhône sur des rosés des Côtes-du-Rhône et de Tavel, ont permis d’étudier plus précisément l’effet conjugué de ces trois paramètres sur l’évolution du vin en bouteilles.
Plusieurs niveaux d’ajustement de SO2 libre et d’oxygène dissous au moment de la mise en bouteilles (conditionnement inerté ou non), ainsi que deux bouchons synthétiques ayant une perméabilité à l’oxygène différente ont été testés. Une fois conditionnés, ces rosés ont été stockés pendant un peu plus d’un an à 15°C ou à 20°C, analysés et dégustés régulièrement.

2. Quels sont les impacts des 3 facteurs sur la qualité sensorielle et gustative des rosés ?

Après plusieurs mois de conservation, un jury de professionnels a perçu des différences entre les vins de Provence en fonction du niveau de réajustement du SO2 libre à la mise : les vins moins sulfités présentaient des notes de fruits mûrs plus intenses, quand les plus sulfités exprimaient plus souvent de la réduction au nez, en étant toutefois jugés mieux équilibrés en bouche en moyenne.

A noter : la perméabilité du bouchon a plutôt influencé la perception des arômes thiolés et l’amertume, notée plus forte sur les échantillons avec le bouchon moins perméable à l’oxygène.
Les rosés en Côtes du Rhône stockés à 20°C, ou encore embouteillés sans inertage ou avec un bouchon plus perméable à l’O2 ont, quant à eux, été jugés un peu plus évolués au nez, exprimant moins d’arômes de fruits frais et de notes amyliques que les autres échantillons. Sur le rosé de Tavel, ces différences n’ont été perçues qu’après un an de conservation.

3. Attention à la température lors du transport

Pendant le transport, ce sont les variations de températures qui impactent le plus la qualité du vin. Plusieurs expériences simulant différentes conditions de transport à l’exportation ont permis d’étudier plus précisément l’influence de ce facteur sur la qualité des vins rosés. Des échantillons de vins rosés de Provence ont été placés dans le simulateur de la cave d’Inter-Rhône, mimant un transport vers la Chine, le Canada, ou encore appliquant des normes de transport du Laboratoire National d’Essai LNE1.

En positionnant les échantillons sur le nuancier des rosés de Provence, quinze jours après la simulation d’exportation, il est apparu que l’application de paliers de température élevée – 25°C et surtout 35°C – impacte le plus la couleur des rosés, qui ressortent plus foncés.

A noter : cette évolution de la couleur est la conséquence d’une baisse plus marquée du SO2 libre dans les bouteilles soumises à plus hautes températures.


La dégustation quelques semaines après la simulation d’export, puis un an après, révèle également une influence sur les caractères aromatiques des vins. Le jury de dégustateurs a jugé que les vins soumis aux températures les plus élevées ou à des écarts thermiques plus grands avaient tendance à exprimer d’avantage de notes de fruits mûrs (les autres modalités étant plutôt sur un profil « fruits frais »), et moins fréquemment de la réduction au nez.

Au final, il apparaît que les trois facteurs sulfites, oxygène et température pèsent chacun sur l’évolution du rosé lors de sa conservation. Il suffit que l’un d’entre eux soit fortement déficient ou extrême, pour gommer l’effet des deux autres.  D’où l’importance de raisonner ces trois paramètres ensemble et de viser le meilleur équilibre possible. Cela passera notamment par une bonne maîtrise des conditions de mise en bouteille, le choix d’un obturateur adapté au circuit de commercialisation ou encore le contrôle de la température de transport et de stockage.