Étiquetage, Mercosur, prix : les trois requêtes de la volaille de chair

L’interprofession de la volaille de chair presse l’État de publier les décrets concernant l’indication d’origine en restauration hors foyer et de renoncer à l’accord de libre-échange avec le Mercosur. La grande distribution est interpelée pour répercuter la hausse du prix de l’aliment.

A l’occasion d’une conférence de presse, l’Association nationale interprofessionnelle de la volaille de chair (Anvol) a dressé le bilan de l’année 2020, marquée par la double crise sanitaire due au Covid-19 et à la grippe aviaire, dont la volaille de chair est une victime collatérale. Avec la perte d’une majeure partie du débouché en restauration hors foyer (cantines et restaurants), la filière redoutait un impact sérieux sur la consommation de volaille. Il n’en a rien été même si toutes les espèces n’ont pas été logées à la même enseigne.

« Les consommateurs se sont reportés sur les achats en magasin, qui ont bondi de 9,3%, indique Anne Richard, directrice de l’Anvol. La consommation de volailles de chair n’a baissé que de 0,7% toutes espèces confondues, alors que l’on était sur des progressions de 3% par an les années passées. Le poulet a tiré son épingle du jeu, en progressant de 1,3%. En revanche, la pintade, la caille, le pigeon ou encore le canard rôti ont pâti de la fermeture de la restauration hors foyer, leur débouché majeur ».

La filière avait obtenu de la part de l’Etat une aide spécifique de 3 millions d’euros destinée à soutenir ces petites espèces, une des spécificités de la filière nationale. L’Anvol a indiqué que les éleveurs concernés pourraient constituer leur dossier de demande d’indemnisation à compter du mois d’avril. Les productions de canard à rôtir et de pintade ont baissé respectivement de 12,4% et 12,8% quand celles de poulet et de dinde ont crû de 0,6% et 0,3%.

L’étiquetage de l’origine toujours en souffrance

Au-delà des aides spécifiques, la réouverture de la restauration collective et commerciale est attendue de pied ferme pour sauver ces petites espèces. L’Anvol aimerait faire d’une pierre deux coups, en faisant coïncider la réouverture des cantines et des restaurants avec l’obligation d’indiquer l’origine des viandes. « Pour notre filière, et à des fins de reconquête du marché national, il est fondamental que l’obligation de déclaration d’origine s’applique dans tous les secteurs de la restauration pour les produits crus comme pour les produits transformés, explique Paul Lopez, président de la Fédération des industries avicoles (Fia). Avant la crise, 89% des Français disaient préférer consommer de la volaille française plutôt qu’étrangère. La crise sanitaire a encore renforcé cette exigence ».

Encore faudra-t-il que le citoyen-consommateur accepte de voir pousser ici ou là des bâtiments dédiés à la production, une problématique que l’Anvol a prise à bras le corps en outillant les porteurs de projet.

"L’étiquetage de l’origine avant la réouverture attendue de la restauration constituerait un réel avantage pour notre filière"

Adoptée en mai 2020, la loi relative à la transparence de l’information sur les produits agricoles et alimentaires impose aux viandes de porc, de volaille, d’ovin et de caprin l’étiquetage de l’origine de la viande bovine servie en restauration commerciale et collective, comme c’est le cas pour la viande bovine. « Nous attendons la publication des décrets d’application, déclare Jean-Michel Schaeffer, président de l’Anvol. L’étiquetage de l’origine avant la réouverture attendue de la restauration constituerait un réel avantage pour notre filière ».

Pas d’accord avec le Mercosur

La restauration hors foyer et ses contraintes de prix constituent une des portes d’entrée de la volaille importée, en provenance d’Ukraine, de Thaïlande ou encore du Brésil. En 2020, les importations ont légèrement reflué, respectivement de 2% et 3% pour l’ensemble des volailles et le poulet. Mais les niveaux d’importation culminent toujours à 33% et 41%.

"On demande solennellement à l’État d’arrêter les négociations sur le Mercosur. On n’a pas le droit de segmenter ces accords"

« L’accord signé entre l’UE et le Mercosur va se traduire par l’importation supplémentaire de 180.000 t de poulet par an, équivalent à presque 1 million de poulets par jour, indique Paul Lopez. Aujourd’hui, la Commission européenne souhaite dissocier les aspects commerciaux et environnementaux afin d’activer les premiers et de repousser les seconds à plus tard ». « On demande solennellement à l’État d’arrêter les négociations sur le Mercosur, renchérit Jean-Michel Schaeffer. On n’a pas le droit de segmenter ces accords ».

Des hausses d’aliment répercutées aux deux tiers

L’Anvol est par ailleurs revenue sur les négociations commerciales, dans le contexte de hausse des prix des matières premières. « Le prix de l’aliment s’est envolé de 24%, engendrant en bout de chaine une hausse du prix de la viande de volaille de 9%, explique Gilles Huttepain vice-président de la Fia. En début d’année, la grande distribution a accepté une hausse de prix de 6%. Nous espérons obtenir les 3% manquants au cours du printemps ».

L’Anvol a fait ses comptes : le défaut d’ajustement des prix sur les coûts de production coûte 400 millions d’euros à la filière. « C’est 25 à 30 centimes sur une barquette de 500 gramme de filets de poulet et 12 à 15 centimes sur celle de cuisse. Ce n’est pas mirobolant », conclut Jean-Michel Schaeffer.