La méthanisation est bien verte, selon l’Inrae

L’Inrae a évalué les impacts environnementaux de la méthanisation en recourant à l’Analyse du cycle de vie (ACV). Comparativement aux systèmes sans méthanisation et sur la base de 16 indicateurs, les résultats des méthaniseurs « cultures » et « élevage » sont majoritairement positifs.

L’Institut national de la recherche pour l’agriculture et l’environnement (Inrae) publie les résultats d’une étude visant à quantifier les impacts environnementaux des méthaniseurs agricoles, alimentés majoritairement par les effluents pour les système dits « élevage » et majoritairement à base de résidus de récolte et de Cultures intermédiaires à vocation énergétique (Cive) pour les méthaniseurs dits « culture ». L’Inrae évacue d’emblée la question des cultures dédiées à la méthanisation, « qui ne correspondent pas au modèle de développement de la méthanisation en France ». L’étude compare donc les systèmes agricoles intégrant un méthaniseur avec les systèmes sans méthaniseur, mais avec des Cipan (Cultures intermédiaires piège à nitrates), la récolte de biomasse distinguant Cive et Cipan.

S’appuyant sur une Analyse du cycle de vie (ACV), l’étude présente un bilan environnemental global de la méthanisation agricole en intégrant ses trois fonctions associées (production d’énergie, gestion d’effluents et fertilisation des sols) et sur la base de 16 indicateurs (changement climatique, destruction de la couche d’ozone, formation d’ozone photochimique, particules fines, acidification, eutrophisation terrestre, épuisement ressources énergétiques etc.).

2 ou 3 indicateurs négatifs sur 16

Résultats ? Le scénario avec méthanisation montre de meilleures performances sur 7 indicateurs pour le scénario « culture » et 9 indicateurs pour le scénario « élevage », notamment une amélioration de 60 à 85% pour le changement climatique, l’épuisement des ressources énergétiques, et la destruction de la couche d’ozone. Pour 5 indicateurs, les écarts ne sont pas significatifs. Les performances en retrait sur plusieurs indicateurs (notamment radiations ionisantes, épuisement des ressources métalliques et minérales pour les deux scénarios, et eutrophisation des eaux douces pour le scénario « culture »), s’expliquent notamment par un recours accru à l’énergie électrique, nécessaire au procédé de méthanisation. A noter que l’analyse détaillée des résultats montre que la qualité des eaux n’est pas dégradée localement.

Des externalités positives

L’étude identifie plusieurs externalités positives, à commencer par le recyclage et la biodisponibilité comparée de l’azote dans les digestats et les effluents bruts et qui permet d’améliorer nettement le bilan sur la plupart des indicateurs environnementaux considérés par rapport aux scénarios sans méthanisation. La gestion des effluents d’élevage, via un stockage de courte durée, améliore également nettement les bilans environnementaux. En ce qui concerne les résidus de culture, dès lors que le digestat retourne au sol, les conséquences de leur mobilisation sur les cycles et la matière organique du sol sont très faibles alors que leur potentiel méthanogène est élevé, relève l’étude. Celle-ci pointe aussi, dans le cas de la méthanisation « culture », un stockage supplémentaire de carbone, comparativement au scénario sans méthanisation, et aboutissant à une réduction d’impact supérieure de 7,2% sur l’indicateur de changement climatique.

Des points de vigilance

L’étude point également des points de vigilance, à commencer par les Cive. Le fait que le scénario « élevage » ressort plus favorable que le scénario « culture » est lié à la faible quantité de digestat  excédentaire produit pour le scénario « culture », au regard des besoins en fertilisation des Cive. « Pour ces scénarios, des réflexions sur l’optimisation de la gestion des éléments fertilisants organiques sont nécessaires à l’échelle des territoires et des exploitations », note l’étude. En revanche, en scénario « élevage , la quantité de digestat produite et à épandre peut être très importante et nettement supérieure à la quantité que peuvent recevoir les surfaces de culture produisant la masse de Cive du mélange de substrat. « Minimiser ces interventions au champ et maximiser le retour au sol du digestat pour limiter, voire annuler, les émissions liées à la production des engrais minéraux constituent des bonnes pratiques à mettre en œuvre afin de limiter ces impacts environnementaux », recommande l’étude.

De la bonne gestion du digestat

L’étude de l’Inrae s’attarde également sur la gestion du digestat, de par les impacts directs et indirects dont ils sont potentiellement porteurs. La couverture du digestat et la pratique de l’épandage sont visées. Sur le premier point, l’étude relève que le défaut de couverture pourrait limiter les réductions d’impacts sur le changement climatique de la méthanisation de 75% à 50% par rapport aux scénarios de référence et une augmentation de près de 20% des catégories d’impact liée aux émissions d’ammoniac notamment (formation de particules fines, eutrophisation terrestre et acidification des milieux naturels).

La nouvelle réglementation ICPE 2021 impose du reste l’obligation d’utiliser une couverture étanche aux eaux de pluie mais n’exige pas la récupération du biogaz résiduel.

Concernant l’épandage du digestat, l’étude recommande les techniques d’injection (effluents liquides) et d’enfouissement (effluents solides) pour réduire les impacts sur l’acidification et l’eutrophisation des milieux terrestres et l’émission de particules fines, avec un doublement de la réduction des impacts du scénario avec méthanisation par rapport au scénario sans méthanisation.