Météo : un début d’été marqué par des records d’orages et de chaleur

Marqué par une vague de chaleur historiquement précoce, le mois de juin 2022 a été l’un des plus chauds jamais enregistrés en France, dans la lignée du mois de mai. Les nombreux orages ont mis un terme à 5 mois consécutifs de déficit pluviométrique mais les chutes de grêle ont lourdement impacté les productions agricoles. Le point avec Nicolas Le Friant, météorologiste chez DTN.

Le mois de juin a poursuivi sur la lancée du mois de mai 2022, qui avait déjà été très chaud avec un excédent thermique de 2,7°C à l’échelle de la France. Nous l’expliquions déjà il y a quelques mois sur des contextes météorologiques atypiques et persistants comme les régulières conditions anticycloniques des mois de février à avril 2022, qui nous avaient apporté des températures régulièrement situées au-dessus des normales climatiques et de très longues périodes sèches (sécheresse précoce).

Comment expliquer cette chaleur ?

D’un point de vue purement météorologique, nous avons eu le positionnement d’un système dépressionnaire entre les Açores et la Péninsule Ibérique, qui s’est isolé du reste du flux perturbé océanique circulant sur le nord de l’Atlantique Nord. Au mois de mai 2022, cette dépression a été davantage positionnée vers l’archipel des Açores alors que pour ce mois de juin 2022, elle s’est décalée plutôt vers l’ouest immédiat du Portugal. La conséquence est qu’à l’avant d’un tel système météorologique, à la faveur d’une courbure de hautes pressions, c’est un vent de sud persistant qui s’est mis en place et c’est donc tout naturellement que l’air très (trop) chaud, présent sur le nord de l’Afrique du Nord, s’est dirigé vers la Péninsule Ibérique puis vers la France.

Résultat, nous avons vécu une canicule exceptionnelle qui s’est particulièrement illustrée par sa précocité car c’est la première fois qu’une telle vague de chaleur se produit aussi tôt au mois de juin et même avant le solstice d’été (début le 15 juin).

La journée du samedi 18 juin fut historique car 16 stations météorologiques ont battu leur record absolu (tout mois confondus) et près de 190 autres leur record mensuel de chaleur. L’indicateur thermique national (moyenne entre les valeurs minimales et maximales) a atteint les 27,38°C, ce qui en fait la deuxième journée la plus chaude après l’historique 27 juin 2019 avec 27,95°C. Néanmoins, ce fut l’après-midi la plus étouffante avec une moyenne des températures maximales de 36,18°C contre 35,82°C en 2019 ! Nous avons relevé des températures records culminant jusqu’à 42,9°C à Biarritz, 42,4°C à Hossegor, 41,9°C au Cap Ferret ou encore 40,6°C à Carcassonne et 40,1° à Niort…

Des vagues de chaleur plus fréquentes

On recense 43 vagues de chaleur en France depuis 1947. La dernière vague de chaleur observée en France officiellement a eu lieu en août 2020. Les vagues de chaleur recensées depuis 1947, à l’échelle nationale, ont été sensiblement plus nombreuses au cours des dernières décennies. Sur les 35 dernières années, elles ont été trois fois plus nombreuses que sur les 35 années précédentes. Le nombre de jours de vagues de chaleur a été multiplié par 9. Enfin, il est clairement visible sur le graphique ci-dessous que les vagues de chaleur, au mois de juin, ont été plus fréquentes lors des 20 dernières années (6 sur les 9 recensés depuis 1947).

Cette situation est réellement inquiétante dans le contexte de réchauffement climatique. En effet, cela donne une idée du potentiel possible une fin juillet/début août avec des masses d’air bien plus chaudes, et si un dôme de chaleur se mettait en place, comme en août 2003, les 50°C seraient alors clairement envisageables en France ! Rappelons, qu’en 2019, les chaleurs exceptionnelles ont provoqué des températures de 46°C dans le Gard…

Ce n’est donc pas une surprise si ce mois de juin 2022 se termine avec un excédent de près de 3 degrés (2,5 degrés si nous prenons en compte les normales climatiques calculées sur la période 1991-2020) par rapport à la normale climatique et sur tout le pays (d’1 à 2 degrés sur le nord-ouest et de 3 à 5 degrés sur les régions méridionales). Ce mois se classe à la troisième place derrière juin 2017 et surtout juin 2003.

Précipitations très hétérogènes

Concernant les précipitations, ce mois de juin a été assez profitable mais arrivant bien trop tard pour enrayer la sécheresse débutée cet hiver 2021/2022. En effet, la France a subi deux épisodes orageux marqués, le premier entre le 2 et le 5 juin et le second, mettant progressivement fin à la canicule, entre le 19 et le 26 juin.

A l’échelle du pays, les précipitations sont au-dessus des normales mais, comme souvent lors d’épisodes orageux, les cumuls pluviométriques sont très hétérogènes. Résultat, nous avons encore d’importants déficits dans le domaine méditerranéen (0 mm à Ajaccio ou encore 5 mm à Marseille et 8 mm à Montpellier) alors que nous dépassons largement les 120 mm à Lyon et Dijon mais c’est surtout sur le Massif-Central où les cumuls sont le plus conséquents avec plus de 170 mm à Clermont-Ferrand par exemple.

"Pour enrayer une sécheresse, il faut surtout de la pluie en automne et en hiver"

En tout cas, ce mois de juin met un terme à 5 mois consécutifs de déficits pluviométriques. Malgré les bonnes quantités de pluie tombées, les arrêtés préfectoraux de restriction d'eau sont de plus en plus nombreux (143 arrêtés en cours à la date du 28 juin 2022). Rappelons que pour enrayer une sécheresse, il faut surtout de la pluie en automne et en hiver afin que les précipitations s’infiltrent plus facilement dans l’intérieur des sols afin de s’infiltrer jusqu’au niveau des nappes phréatiques. En effet, les pluies orageuses tombent trop fortement et ont donc tendance à ruisseler en s’évacuant trop rapidement dans les rivières, les fleuves ou en mer.

Beaucoup d'orages et de dégâts

A noter que ce mois de juin 2022 fut le plus orageux depuis 1989 au moins. Ces orages ont provoqué de conséquentes chutes de grêle. Conséquence directe, le vignoble français a été très fortement impacté comme le Bordelais (10% des vignes, soit 16 000 ha), la région de Cognac, le Sauternes, la Dordogne, le Roussillon, la Savoie ou encore la Touraine.

Quelles en sont les conséquences pour les vignobles ?

Sur le court terme, nous avons observé une perte sèche de feuilles et des fruits qui va induire une nette baisse des rendements. A moyen et à plus long terme, cela va également entraîner des conséquences sur la prolifération de maladies par les lésions provoquées par la grêle et il y aura un important impact sur les futurs bourgeons et donc pour la récolte 2023.

Pour terminer ce bilan climatique très riche de ce mois de juin 2022, l’ensoleillement fut légèrement excédentaire. Globalement, il n’y a pas beaucoup de différences entre les régions et tout le monde a pu profiter d’un bon ensoleillement sans réels excès (+20% à Paris notamment) ni déficits (-25% à Ajaccio).

Quelles sont les prévisions météorologiques en France pour la première décade de juillet ?

Après un dernier passage pluvieux et orageux prévu pour le dernier jour du mois de juin, les conditions anticycloniques se rétabliront rapidement sur tout le pays dès vendredi 1er juillet, ce qui devrait garantir un week-end ensoleillé et chaud mais sans excès (jusqu’à 30°C au nord, 33°C au sud et tout de même 35/36°C près de la Méditerranée).

A partir du lundi 4 juillet, la France passera sous les effets d'une dorsale océanique qui protègera la moitié nord du pays avec donc du soleil et quelques cumulus de beau temps sans conséquence. Les températures maximales seront estivales avec une moyenne de 25/26°C. En revanche, plus au sud, à l'exception des régions méditerranéennes, il fera nettement plus chaud mais les conditions seront également instables. Résultat, des ondées et des orages éclateront fréquemment des Pyrénées au Massif-Central au Jura et aux Alpes jusqu’en milieu de semaine prochaine. Sur ces régions, les températures maximales culmineront entre 28°C et 33°C mais les thermomètres grimperont entre 35°C et 40°C près de la Méditerranée où des records de chaleur mensuels seront possiblement battus !