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Vendredi 31/10/2025

On manque de bras pour les pieds des vaches

Pédicure bovin en Loire-Atlantique, Edouard Mochet reçoit de plus en plus de demandes d’interventions chez les éleveurs, laitiers en particulier. Pour faire face à cet accroissement de travail, il souhaite recruter un premier salarié. Zoom sur ce métier méconnu, mais essentiel pour la santé des bêtes.

Plus de 60 000 lectures et 340 partages : la vidéo qu’Edouard Mochet, pédicure bovin en Loire-Atlantique, a postée en août dernier sur son profil Facebook, a été diffusée au-delà de ses espérances. Dans cette séquence de moins d’une minute, il explique son souhait de recruter quelqu’un pour le seconder, pourvu qu’il soit sérieux, à l’aise avec les animaux, ait des aptitudes pour un travail physique, et qu’il « n’ait pas peur de se salir ».

Pédicure bovin depuis 2011, Edouard Mochet fait en effet face à un accroissement continu de demandes d’interventions chez des éleveurs bovins : « Cela m’ennuie de de refuser des clients ». Mais avec plusieurs centaines de paires de pattes traitées chaque semaine, et des journées de parfois 12 heures, il ne peut pas travailler davantage.

Moins de sorties, moins d’usure des onglons

« Les pédicures bovins sont de plus en plus demandés, parce que les bovins, surtout les vaches laitières, ont tendance à moins sortir sur les prairies : le développement de la robotisation et l'agrandissement des élevages freinent le pâturage. Or, sur du béton, ou sur des tapis, les onglons des pieds des animaux ne s'usent pas suffisamment ou pas de manière symétrique », décrit Edouard Mochet.

« Notre travail consiste à retirer la corne des onglons qui a trop ou mal poussé, pour rétablir de bons aplombs, symétriques. On intervient de manière préventive, mais aussi parfois curative, en cas de lésions des pieds, de corps étrangers, mais aussi de maladies, comme les panaris ou la dermatite interdigitale ».

Une vache laitière boiteuse est en effet toujours une préoccupation pour un éleveur : elle risque de rester davantage couchée, de ne pas aller se faire traire au robot ou de ralentir la traite et c’est évidemment aussi un signe de mal être qu’il faut traiter.

« Un pied, c’est un livre ouvert pour nous : la forme, la couleur de la corne, la localisation des points d’impacts, nous donnent des indications sur les carences ou les stress qu’ont pu subir les animaux. Le vêlage, par exemple, a une incidence sur les onglons. Certaines maladies, comme la FCO, provoquent des panaris », décrit le pédicure, qui ne peut, toutefois, jamais se substituer à un vétérinaire.

Edouard Mochet travaille principalement avec une pince demi-lune qu’il a fait forger spécialement pour lui. (photo Catherine Perrot)

Un entretien systématique et des interventions au cas par cas

Chez les vaches qui passent une grande partie de leur vie en bâtiment, Edouard Mochet intervient le plus souvent de manière programmée, traitant les onglons de tout le troupeau une ou deux fois par an, avec une fréquence accrue sur les pattes arrières dont les onglons ont tendance à moins s’user.

A l’occasion de ces check-up des pattes, le pédicure repère les animaux qui ont besoin d’un peu plus de soin : en cas d’onglon lésé, il pose une talonnette qui permet de réduire la douleur à l’appui ; en cas de dermatite, il applique un désinfectant et un pansement.

Les animaux qui sortent beaucoup en pâtures, notamment les vaches allaitantes, sont aussi susceptibles de recevoir des soins de pédicurie, mais de manière moins systématique, avec des interventions de type curatif. « Un taureau qui boîte, par exemple, c’est une urgence ! », souligne Edouard Mochet.

La cage de parage : indispensable pour la sécurité

Faire rentrer ces animaux moins habitués aux manipulations dans la cage de parage est un peu plus sportif… « Mais on se débrouille, les éleveurs nous aident. J’ai même réussi à faire rentrer une Highland dans la cage de parage malgré son cornage impressionnant ! ».

La cage de parage est évidemment l’outil de travail le plus important pour la sécurité du pédicure. « Même pour un seul animal, je la sors ». Les autres équipements sont simples : une pince demi-lune et une rénette. Comme son père, Pierre-Yves Mochet, pédicure bovin également, Edouard travaille avec des outils « manuels ». « Je les trouve plus précis. Mais d’autres pédicures emploient des outils électriques, comme une meuleuse ».

Faire un parage régulier des animaux a un coût, mais il permet de faire vieillir les vaches : « Le coût du parage est amorti si on garde une vache de plus en production par an ». (photo Catherine Perrot)

Un nouveau pédicure à former

« Notre métier est assez peu connu. C’est pour cela que j’ai fait une vidéo pour dire que j’étais prêt à recruter et former quelqu’un ». Le pari a-t-il été concluant ? « Oui ! se réjouit Edouard, j’ai trouvé quelqu’un qui va bientôt commencer avec moi. C’est un entraineur sportif qui veut se reconvertir, il a 39 ans, il n’est pas du milieu, mais il aime les animaux et est prêt à apprendre ».

Edouard Mochet a donc commandé une deuxième cage de parage chez Socober, fabricant normand de matériel spécialisé : « Il y a un an d’attente pour une nouvelle cage, mais heureusement, on va m’en prêter une en attendant ». Pendant les trois premiers mois, sa nouvelle recrue aura un financement Pôle emploi reconversion, avant d’être salarié de sa société.

Certes, Edouard n’attend pas qu’il soit opérationnel au bout de trois mois. « C'est un métier d'apprentissage, il faut un an et demi à deux ans pour bien le pratiquer, et moi-même, j'apprends encore tous les jours ». C’est donc un pari sur le long terme que fait le pédicure bovin, en espérant que son salarié se passionne autant que lui pour ce métier singulier et essentiel.