Panorama du niveau de vie des ménages agricoles

Dans une étude publiée le 11 octobre, l’Insee analyse les conditions de vie des ménages agricoles en fonction de l’orientation technico-économique des exploitations. En moyenne, seul un tiers des ressources des ménages provient de l’activité agricole. Parmi tous les secteurs, le niveau de vie des ménages en bovin viande est le plus faible.

Selon l'Institut national de la statistique, 50% des ménages agricoles (dans lesquels au moins un membre est agriculteur exploitant) ont un niveau de vie inférieur à 22 210 euros par an. Ce niveau de vie médian, qui prend en compte le nombre d’adultes et d’enfants au sein du ménage, est comparable à celui de l’ensemble des ménages français ayant des revenus d’activité. « Cependant, les disparités au sein des ménages agricoles sont plus fortes et ils sont plus souvent touchés par la pauvreté monétaire », indique l’Insee.

Ainsi, le niveau de vie des 10% des ménages agricoles les plus modestes ne dépasse pas 9 800 euros par an. Il est 4,7 fois inférieur à celui des 10% les plus aisés qui disposent d’au moins 46 500 euros. Parmi l’ensemble des ménages français ayant des revenus d’activité, cet écart n’est que de 3,3.

18% sous le seuil de pauvreté

Les ménages agricoles sont également davantage exposés à la pauvreté monétaire : 18% de leurs membres vivent sous le seuil de pauvreté (13 000 euros par an pour une personne seule en 2018), contre 13% des membres des ménages ayant des revenus d’activité. La pauvreté y est de surcroît plus intense : le niveau de vie médian des ménages agricoles pauvres est de 9 400 euros, soit 1 300 euros de moins qu’au sein des ménages pauvres en France.

En revanche, le taux de pauvreté en conditions de vie des exploitants agricoles est deux fois moindre que celui de l’ensemble de la population. « Compte tenu de la nature de leur activité, une partie des dépenses privées des ménages agricoles (logement, dépenses d’énergie, etc.) peuvent être intégrées dans les comptes de l’exploitation. Plus souvent propriétaires de leur habitation que l’ensemble des ménages, ils ont moins souvent des difficultés de logement. Ils sont également moins affectés par des restrictions de consommation courante. En revanche, ils sont plus souvent sujets à des insuffisances de ressources », analyse l’Insee.

Seul 1/3 du revenu provient de l’activité agricole

Le revenu disponible moyen annuel des ménages agricoles s’élève à 52 400 euros en 2018. Seul un tiers provient de l’activité agricole. « La majorité de leurs revenus sont issus d’autres activités, en particulier celles du conjoint, et un cinquième sont issus du patrimoine, notamment sous la forme de fermages », précise l’Insee. Les conjoints d’agriculteurs sont salariés dans sept cas sur dix, et un agriculteur sur cinq est bi-actif.

Bovins viande : le niveau de vie le plus faible

« Globalement, les ménages agricoles disposent des revenus agricoles les plus faibles dans les territoires d’élevage », note l’Insee. En bovins viande, les revenus tirés de l’activité agricole sont les plus bas : 11 300 euros en 2018. Ces revenus représentent 30% des ressources des ménages. Peu d’éleveurs ont un emploi complémentaire, et ils vivent plus souvent seuls que les autres agriculteurs, bénéficiant donc moins souvent des revenus d’un conjoint ou d’un autre membre de la famille. Sur les territoires de production de bovins viande ou mixte, d’ovins ou de caprins, un éleveur sur quatre vit sous le seuil de pauvreté.

En élevage laitier, les revenus agricoles sont en moyenne de 17 000 euros en 2018 et ils constituent 38% des revenus des ménages agricoles. « Les couples de deux agriculteurs exploitants sont relativement nombreux. Aussi, les autres sources de rémunérations sont faibles », note l’Insee.

Dans les territoires d’élevage de granivores, les revenus agricoles s’élèvent en moyenne à 21 200 euros et représentent 43% des ressources du ménage. « En conséquence, les ménages sont moins touchés par la pauvreté que dans les autres territoires d’élevage », analyse l’Insee.

Décomposition du revenu disponible moyen des ménages agricoles selon la production agricole dominante du territoire en 2018 (Source : Insee, Filosofi 2018). 1 : Grandes cultures : territoires spécialisées en céréaliculture et en culture de plantes oléagineuses et protéagineuses. 2 : Autres grandes cultures : territoires combinant céréales, plantes oléagineuses et protéagineuses, plantes sarclées ou spécialisées en culture de plantes sarclées, légumes frais. 3 : Ensemble des ménages agricoles, y compris ceux ne résidant pas dans un territoire Otex.

Les productions végétales en haut du panier

« Globalement, les revenus agricoles des ménages des territoires de productions végétales sont plus élevés que ceux des territoires d’élevage. Ils sont cependant très hétérogènes de par la diversité des cultures présentes sur le territoire national », précise l’Insee.

Ainsi, au sein des territoires orientés dans la production végétale, les revenus agricoles des ménages agricoles sont les plus faibles dans les territoires de maraîchage et d’horticulture. De 13 100 euros en moyenne en 2018, ils ne composent qu’un cinquième de leurs ressources. « Ces ménages bénéficient en revanche d’autres sources de revenus bien plus rémunératrices, provenant de salaires et de revenus du patrimoine. Aussi, leurs ressources sont en moyenne supérieures de 30% au revenu disponible moyen de l’ensemble des ménages agricoles », indique l’institut.

1/4 des céréaliers bi-actifs

Dans les territoires de grandes cultures spécialisés en céréales et oléo-protéagineux, les ménages agricoles ont des revenus agricoles plus importants, (17 600 euros, proche de la moyenne). « De plus, leurs revenus du patrimoine et d’autres activités sont conséquents. En effet, les conjoints sont davantage salariés et plus diplômés que dans les autres territoires », fait savoir l’Insee, qui précise également qu'un quart des céréaliers exerce une activité secondaire salariée, proche d’un temps complet pour 40% d’entre eux.

En cultures fruitières et autres cultures permanentes (pépinières, arbres de Noël, joncs, etc.), « les ménages agricoles ont des revenus tirés de l’activité agricole supérieurs à ceux des territoires de grandes cultures, mais ceux issus d’autres activités sont plus faibles ; ces ménages sont davantage exposés à la pauvreté », analyse l’institut.

Les exploitations qui combinent céréales, oléagineux, protéagineux, plantes sarclées (pomme de terre, betterave, etc.) ou cultures de légumes, ont un niveau de vie plus élevé que la moyenne. Les revenus agricoles des ménages atteignent 28 200 euros. De plus, un quart de ces agriculteurs exerce une autre activité salariée. Parmi ces bi-actifs, un sur cinq est cadre.

Polyculture-élevage, intermédiaire

Les territoires de polyculture-élevage regroupent près de 40% des ménages agricoles français. Leur niveau de ressources est médian entre les ménages agricoles des territoires de productions animales et ceux des territoires tournés vers les productions végétales. Leurs revenus agricoles sont assez faibles, 15 800 euros en moyenne, et leurs autres sources de revenus d’un montant proche de la moyenne des ménages agricoles. « Ces ménages sont cependant moins sujets à des variations brutales de revenus du fait de la diversité des productions agricoles », estime l’Insee.

Enfin, l’Insee montre que les revenus tirés de la production viticole sont 1,9 fois supérieurs à ceux des territoires d’élevage bovin, mais sont très hétérogènes. « Ils sont très élevés dans les territoires producteurs de Champagne et de Bourgogne. Ils sont plus limités en Gironde, et particulièrement bas dans l’Hérault et l’Aude ».