Laurence Marandola (Conf') : “la simplification administrative est indispensable mais ça ne veut pas dire annuler toutes les normes”

La Confédération paysanne alerte sur le "mirage de la suppression des normes". Pour le 3e syndicat agricole, les vrais enjeux sont concentrés autour du revenu trop bas des agriculteurs et l'ultra libéralisme qui favorise une mise en concurrence entre eux.

Alors que la Coordination Rurale a lancé son appel à la mobilisation depuis quelques jours déjà, suivi par la FNSEA et les Jeunes Agriculteurs, la Confédération paysanne “tardait” à se prononcer. C’est désormais chose faite. Mercredi 24 janvier, le Comité national du syndicat agricole s’est réuni et a affirmé sa pleine solidarité avec les mouvements en cours. Laurence Marandola, porte-parole nationale du syndicat précise “qu’il y a beaucoup de départements déjà mobilisés, mais la confédération étant dotée d’instances nationales, nous avons dû attendre qu’on se rassemble”. 

Après la FNSEA, Jeunes Agriculteurs, la Coordination rurale, la Confédération Paysanne reçue à son tour à Matignon

Suite aux mobilisations agricoles sur le territoire, le premier ministre a reçu à Matignon, le lundi 21 janvier, les deux présidents des syndicats agricoles majoritaires, Arnaud Rousseau - FNSEA - et Arnaud Gaillaud - Jeunes Agriculteurs -. Une invitation qui a aussitôt irrité les autres syndicats, se sentant oubliés par l'exécutif. Omission réparée. Le gouvernement a entendu et reçu l'ensemble des syndicats. Mercredi, la Confédération paysanne était invitée au ministère de l’Agriculture et de la souveraineté alimentaire. Elle a pu réaffirmer ses deux principales revendications, déjà exprimées devant Gabriel Attal : le revenu des agriculteurs et la demande d’arrêt des négociations du Mercosur. 

“Interdiction d’achat du produit agricole en dessous du prix de revient”, une ouverture possible 

Face aux mécontentements des agriculteurs de l’application de la juste rémunération du prix qui tienne compte de leurs coûts de production, la Confédération Paysanne veut une interdiction d’achat du produit agricole en dessous du prix de revient. De la part de Gabriel Attal et de Marc Fesneau, “il n’y a pas eu de non définitif à transformer nos outils législatifs pour mieux prendre en compte les coûts de production pour les agriculteurs”, selon Laurence Marandola.  “Nous tenons à la notion de “prix de revient”, souligne-t-elle, car ça sous-entend un prix qui évolue. Ça peut être en fonction de la hausse des prix d’énergie”. D’après la syndicaliste, le gouvernement s’est engagé à dépêcher tous les contrôles nécessaires. 

L’ultralibéralisme, un danger pour le maintien de l’agriculture

L’accord commercial entre l’Union européenne et l’alliance économique du Mercosur, bien que n’ayant pas été signé, est de nouveau d’actualité suite à la rencontre entre les présidents brésilien et français. Un accord commercial qui ne fait pas l'unanimité, la vice-présidente du Sénat ayant même qualifié les pays du Mercosur de “rouleau compresseur agricole”.
Ces négociations qui inquiètent bien évidemment les agriculteurs en première ligne. Sur les nombreux points de barrages dans les cortèges, ils s’insurgent contre une concurrence déloyale. Les produits, jugés de moins bonne qualité, seraient non seulement moins chers mais avec des normes de production beaucoup plus souples qu’en France et en Europe. “Nous voulons stopper ces négociations, énonce Laurence Marandola, le premier ministre est favorable à la libéralisation des échanges et à la signature des accords. Le gouvernement est très attaché aux clauses miroirs qui "seront respectées scrupuleusement". Or nous trouvons ces clauses très insuffisantes. Il est clair qu’on n’arrivera pas à mettre des clauses de protection de la rémunération des conditions de travail”. 

Les normes : nécessaires mais pas la surcharge administrative

Alors que les agriculteurs dénoncent des normes “absurdes” souvent déconnectées de la réalité du terrain, un temps de gestion administrative bien trop long, la Confédération paysanne rappelle la nécessité d’avoir en agriculture des normes pour encadrer la profession. “Il y en a certes qui sont inadaptées, je pense notamment à l’élevage en plein air par exemple, mais ce qui est à changer c’est d’arrêter de compliquer la paperasserie. Les normes nous donnent un cadre commun que ce soit au niveau de la santé de nos paysans, des consommateurs ou de la qualité de nos produits”, explique Laurence Marandola. La Confédération paysanne conteste aussi l’idée qu’une réduction des normes engendrerait moins de contraintes et donc plus de revenus. “C’est faux. Moins de normes, c’est plus de libéralisation, moins de protection, plus de concurrence entre les agriculteurs, plus de ventes à perte”. 

La Confédération paysanne ne se prononce pas encore sur sa présence au salon de l’agriculture qui se déroulera à Paris du 24 février au 3 mars. “On reste très mobilisé sur le terrain”, conclut Laurence Marandola.