Pommes de terre : désherber dès la prélevée pour garder le contrôle des adventices

En culture de pomme de terre, la période de sensibilité à la concurrence de la flore adventice s’étend de la levée à la fermeture des rangs. La nature et le stade des mauvaises herbes étant des facteurs décisifs dans le déclenchement du désherbage, les opérations de prélevée doivent être judicieusement choisies et positionnées. Quelques précautions sont également à prendre avec les herbicides à base de prosulfocarbe.

Le travail du sol est un levier majeur dans le contrôle des adventices. Le labour, très souvent réalisé avant la culture de pomme de terre, et les nombreux passages d’outils pour préparer la plantation et former les buttes participent préventivement à la gestion des adventices. Ces opérations minimisent la levée de certaines d’entre elles dans la culture.

Le choix de la variété est également un levier à prendre en compte. Des variétés avec un développement foliaire important seront plus compétitives. L’utilisation d’un plant sain, bien préparé et un sol réchauffé permettent également d’avoir une couverture rapide du sol et de résoudre les problèmes de manque de persistance des herbicides.

Adapter les associations herbicides à la flore adventice

L’idéal est d’intervenir sur butte ré-appuyée, suffisamment émiettée, légèrement humide et par temps calme pour bien répartir la pulvérisation sur les deux flancs de la butte et l’entre-butte.

Des interventions trop près de la levée de la pomme de terre ou des précipitations importantes dans les jours suivant le traitement peuvent entraîner, à la levée, l’apparition de symptômes de phytotoxicité mais sans conséquence grave, en principe, pour la culture.

Afin d’optimiser l’efficacité des herbicides, il est fréquent de les associer :
• Parcelles « propres » sans problème particulier : l’association Défi + Sencoral SC (3 à 4 l + 0,5 l) ou Arcade (4 l) reste toujours une base intéressante. Il est également possible d’utiliser des produits tels que le Toutatis Damtec (2,4 kg/ha), Metric (1,25 l/ha), Bastille (2,5 kg/ha), Proman/Soleto/Inigo (3 l/ha) et Tahoma (1,2 l/ha).

• Infestation faible à moyenne (renouée liseron, mercuriale, gaillet, morelle) : les associations à base de Challenge 600 + Arcade (2 l/ha + 3 l/ha), Toutatis D. + Sencoral SC (2,4 kg/ha + 0,3 l/ha), Toutatis D. + Défi/Roxy (2,4 kg/ha + 2,5 l/ha) sont à privilégier.

• Parcelles très « sales » ou méconnues (parcelles louées) : le mélange de trois produits peut s’avérer intéressant avec par exemple Défi/Roxy + Proman/Soleto/Inigo + Metric (3 l/ha + 2 l/ha + 1,25 l/ha) ou encore Défi/Roxy + Proman/Soleto/Inigo + Sencoral SC (3 l/ha + 2 l/ha + 0,3 l/ha).

Attention ! Challenge 600 ne peut pas être utilisé sur Monalisa en terre crayeuse.

Figure 1 : Arbre de décision pour l’utilisation de la métribuzine

.

 

Des pratiques à respecter pour l’application de produits à base de prosulfocarbe

Le prosulfocarbe est présent dans trois produits homologués sur pomme de terre : Défi, Roxy 800 EC et Arcade. Depuis l'automne 2017, les conditions d’emploi de ces herbicides ont été reprécisées, avec, d'une part, l’obligation de les appliquer à l’aide de matériel homologué pour réduire la dérive. Le ministère de l’Agriculture actualise régulièrement une liste qui recense ce type de matériel, composée principalement de buses à injection d’air et de certaines rampes de pulvérisateurs à assistance d’air. 

D'autre part, afin d’éviter la dissémination du prosulfocarbe, les conditions d'emploi sont renforcées en cas d’application sur une parcelle adjacente à certaines cultures comme :
• des arbres fruitiers (pommiers et poiriers)
• des cultures maraîchères, légumières (mâche, épinard, cresson des fontaines, roquette, jeunes pousses),
• des plantes aromatiques (cerfeuil, coriandre, livèche, menthe, persil et thym),
• des plantes médicinales (artichaut, bardane, cardon, chicorée, mélisse, piloselle, radis noir et sauge officinale).

A proximité de ces cultures non-cibles, il est important de respecter les règles suivantes :
• Si ces cultures sont situées à moins de 500 mètres de la parcelle à désherber : ne pas appliquer le produit avant leur récolte.
• Si ces cultures sont situées à plus de 500 mètres et à moins d’un kilomètre de la parcelle à désherber, il est recommandé de ne pas appliquer le produit avant leur récolte. En cas d’impossibilité, appliquer le produit uniquement le matin avant 9 heures ou le soir après 18 heures, en conditions de température faible et d’hygrométrie élevée.

L’outil Quali’Cible, proposé en accès libre par Syngenta, facilite le respect de ces conditions d'emploi vis-à-vis des cultures non-cibles. Consultez Quali’cible !

Combiner le mécanique au désherbage chimique localisé

Des combinaisons mécaniques et chimiques sont possibles, en sachant que :
• L’efficacité est dépendante des conditions climatiques,
• Les interventions sont à réaliser sur des adventices jeunes,
• Une phase d’apprentissage de l’utilisation des outils mécaniques est nécessaire pour éviter l’endommagement du système racinaire et des stolons, voire des tubercules, par des chocs ou des lésions, susceptibles d’engendrer des pertes de rendements,
• Les coûts de production et le temps de travail sont généralement augmentés.

Un désherbage localisé sur le rang en prélevée complété par du mécanique en postlevée (avec un passage d’outil de type butteuse à disques ou herse étrille pour les flancs des buttes) est une stratégie envisageable. L’application localisée nécessite d’avoir une rampe spécifique et des buses adaptées (à jet uniforme). Avec une largeur de traitement de 20 cm et un écartement entre buses de 80 cm (ex : buses Teejet TP), la localisation sur le rang réduit de 75 % la surface traitée (comparé à un passage en plein). L’économie en herbicides est donc significative.

La gestion de la flore adventice dépend ensuite du moment de l’intervention et de la technicité employée (outils et méthodes). En effet, les conditions pédoclimatiques favorables au désherbage chimique (humidité de l’air, sol frais) sont antagonistes à celles appropriées à la mise en œuvre des alternatives mécaniques (temps sec). L’efficacité du désherbage combiné sera optimisée en intervenant sur des adventices jeunes (stade cotylédons – 2 feuilles) avec une application chimique sur une butte réappuyée, suffisamment émiettée, et avec une intervention mécanique ultérieure en conditions séchantes.

Cécile ROQUES