Sécheresse : le déficit pluviométrique atteint -73% en France

Le mois de mai qui s’achève sera sans doute le plus chaud jamais enregistré en France et se place dans le top 3 des mois de mai les plus secs de l’après-guerre. Après plusieurs mois de déficit pluviométrique, la sécheresse de surface persistante est préoccupante. Jérôme Cerisier, météorologiste chez DTN, fait le point sur le bilan météo de ce printemps 2022.

D’ici quelques jours, nous basculerons dans l’été météorologique, lequel s’étend du 1er juin au 31 août. Cette différence avec l’été calendaire permet d’avoir une date fixe en début de mois, mais colle aussi davantage à la réalité climatologique de la France. D’ailleurs, ce mois de mai aura souvent eu un avant-goût estival dans sa deuxième quinzaine, même si nous observons actuellement un retour vers les moyennes de saison sur la moitié nord. Avant de faire le bilan saisonnier, revenons sur les évènements marquants de notre joli mois de mai, qui aura été fidèle au dicton.

Records de chaleur

En effet, après une première décade tout juste printanière, les températures ont nettement augmenté, et ont atteint des niveaux dignes d’une fin juillet pendant près de deux semaines. De nombreuses régions de l’hexagone ont même battu le record mensuel, et ce mois de mai sera sans doute le plus chaud jamais enregistré en France. Actuellement, il affiche une température moyenne sur la France de 17,6°C, soit un excédent de +2,8°C sur la moyenne 1981-2010. Jusqu’à présent, la valeur de référence était de 17°C en mai 2001 mais aussi en mai 1990. Les médias ont eu tendance à parler d’un dôme de chaleur sur l’hexagone lors de cet épisode. Ce terme, devenu à la mode lors de la canicule exceptionnelle au Canada l’an dernier, correspond à des conditions anticycloniques durables sans vent, où les hautes pressions agissent comme un couvercle, en entretenant et accentuant la chaleur d’un jour sur l’autre. C’est bel et bien ce qu’il s’est passé entre l’Espagne et le Maghreb, où le thermomètre a dépassé les 40°C.

En revanche, en France, les conditions étaient bien plus dynamiques. Le pays se situait en effet en limite des hautes pressions continentales, mais aussi de gouttes froides sur le proche-Atlantique, ce qui explique les nombreuses dégradations orageuses observées lors des conflits de masses d’’air. On ne peut pas non plus parler de vague de chaleur, car cette fois, cela implique des maximales mais aussi des minimales supérieures pendant trois jours et trois nuits à des seuils définis par Météo-France, souvent voisins de 18 à 22°C le matin et de 32 à 36°C l’après-midi. Ces conditions n’ont jamais été réunies lors de l’épisode de fortes chaleurs de ce mois de mai. Néanmoins, de très nombreux records mensuels ont été battus du sud-ouest au Centre et à l’est du territoire, avec jusqu’à 36°C ponctuellement.

Grêlons dévastateurs

Plusieurs salves d’orages violents ont accompagné ces fortes chaleurs, la plus marquée le dimanche 22 mai ayant été accompagnée de grêlons exceptionnels et dévastateurs. Le plus gros ont parfois dépassé les 10 cm entre le Poitou et l’Indre, causant de gros dégâts aux cultures et aux habitations. Cela s’explique par la très forte instabilité de la masse d’air et les très forts courants ascendants au sein des nuages orageux ce soir-là. Pourtant, malgré des pluies localement copieuses, ces dernières sont restées localisées et surtout peu efficaces, car très brèves avec beaucoup de ruissellement.

Ce mois de mai n’aura encore une fois pas vu de perturbations traditionnelles, en raison de conditions de bordure anticyclonique récurrentes. Ainsi, on observe un déficit pluviométrique remarquable de -73% sur l’hexagone, dans la lignée d’un début d’année très sec. Cela devrait le placer dans le top 3 des mois de mai les plus secs de l’après-guerre, avec 1989 et 2011. La seule consolation vient de l’ensoleillement, très satisfaisant pour la saison, avec un excédent de +20%.

Un printemps très sec

Concernant le printemps météorologique, il se sera montré très doux, puis chaud, et sec dans la durée. Peu d’intempéries à signaler hormis les gelées tardives du début avril et les chutes de grêle de la semaine dernière, mais plutôt un temps calme et anticyclonique. L’excédent thermique saisonnier atteint +1,5°C, ce qui ne place toutefois pas 2022 sur le podium, derrière 2011 (+2°C), 1945 (+1,9°C) ou 2007 (+1,7°C). Le plus préoccupant reste la sécheresse de surface persistante, avec un déficit saisonnier de -48%, malheureusement récurrent chaque mois et concernant une grande partie du territoire. Le seul point positif reste un niveau des nappes phréatiques acceptable, hormis en direction de la région PACA où il est critique. Enfin, le soleil se sera très souvent montré, avec un excédent de +15%.